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Procès SchoolLeaks : « Une affaire sérieuse qui peut être sanctionnée »


Quatre prévenus sont poursuivis pour avoir divulgué et révélé, au printemps 2015, les épreuves communes du cycle 4.2. (illustration Fabrizio Pizzolante)

Le parquet estime que les professeurs qui ont divulgué les épreuves communes du cycle 4.2 en 2015 ont violé le secret professionnel et sont à sanctionner. Les quatre prévenus risquent jusqu’à six mois de prison et une amende de 5000 euros.

Y a-t-il eu violation du secret professionnel au sens de l’article 458 du code pénal ? C’est la question qui se trouvait, jeudi matin, au cœur des débats de la sixième et dernière audience du procès SchoolLeaks. Alors que les avocats de la défense estiment que l’article 458 n’est pas applicable au corps enseignant, le procureur d’État est d’un avis contraire. Les juges devront trancher.

Les trois enseignantes du lycée classique d’Echternach (LCE) ainsi que le mari de l’une d’entre elles sont poursuivis pour avoir divulgué et révélé, au printemps 2015, les épreuves communes du cycle 4.2. À la barre, les prévenus avaient déclaré avoir voulu dénoncer les problèmes de procédure existant à l’époque au niveau de ces épreuves pour le passage vers l’enseignement secondaire.

Pour le procureur d’État, la motivation des prévenus est sans importance par rapport au délit commis. «Ce qui m’a irrité dans ce dossier, ce sont les fonctionnaires d’État. Ils ont des droits, mais aussi des obligations», soulève Jean-Paul Frising dès le début de son réquisitoire. «De mon point de vue, les sujets des épreuves communes organisées dans l’ensemble du pays sont un secret par nature. Ils sont clairement visés par l’article 458 du code pénal, poursuit-il. L’enseignant, dans le cadre de sa fonction, apprend des choses par nature secrètes et qui sont à maintenir secrètes.»

Dans son réquisitoire, le parquet a balayé l’argument de la défense selon lequel la confidentialité de l’enveloppe contenant les épreuves communes n’avait pas été notifiée et que l’envoi des sujets aux enseignants du secondaire membres du conseil d’orientation avait été fait à titre de simple renseignement. «On dit que les documents ne sont pas notifiés du secret. Sur une ordonnance du juge d’instruction, il n’est pas non plus écrit que c’est un secret. Cela va pourtant de soi qu’on ne l’a transmet pas», note le procureur.

Selon le parquet, les trois enseignantes du LCE ont donc bien violé le secret professionnel. Quant au mari de l’une d’entre elles, poursuivi pour avoir manipulé une partie des documents révélés en les plaçant sur le cloud, il serait à considérer comme complice et devrait donc bénéficier d’une peine plus légère.

Le procureur d’État Jean-Paul Frising n’a pas requis de peines précises. Il laisse le tribunal décider des peines à prononcer à l’encontre des quatre prévenus : une simple amende ou également une peine de prison assortie du sursis.

Prononcé le 9 février

Le procureur d’État voit la peine «plutôt comme symbolique, comme signe que le fait de transmettre des choses confidentielles est une affaire sérieuse qui peut être sanctionnée».

Les réquisitions du parquet ne suivent donc pas les développements des avocats de la défense qui plaident l’acquittement. Ces derniers estiment que l’article 458 du code pénal n’est pas applicable au corps enseignant. «On n’a pas de violation du secret professionnel au sens de la loi. Ce n’est pas un secret confié par un particulier aux professionnels», a argumenté Me Sam Ries, l’avocat de Tatiana K., en début d’audience.

Pour Me Yves Kasel, l’avocat de Natacha F., les questionnaires divulgués ne contiennent pas non plus de confidences au sens de l’article 458 du code pénal. «Le devoir de discrétion et de réserve des enseignants découle du statut des fonctionnaires, argumente-t-il. Ce dernier est susceptible d’entraîner des poursuites disciplinaires, mais pas des poursuites pénales.»

Toujours selon Me Yves Kasel, sa cliente, Natacha F., au moment de communiquer les épreuves était intimement convaincue que celles-ci étaient publiques : «Il est absolument clair qu’il n’y avait aucune intention malicieuse dans le chef de ma mandante.»

Dans sa plaidoirie, l’avocat de la partie civile représentant l’État, Me Michel Molitor, a quant à lui parlé d’une «opération bien structurée et organisée», qui aurait été initiée par Tatiana K. et son compagnon, membre du CSV, pour créer en premier lieu un scandale politique.

Le 9 février, la 18e chambre correctionnelle rendra son jugement.

Fabienne Armborst