Dean est suspecté d’avoir violé trois jeunes femmes en moins d’un an. Le prévenu, qui conteste les faits, n’a pas assisté à son procès qui se tient depuis mardi après-midi à Luxembourg.
«Après les faits, j’ai longtemps porté plusieurs pantalons et plusieurs pulls les uns sur les autres», s’est souvenue Jennifer, une des victimes présumées de Dean, à la barre de la 13e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, mardi matin. «Je me lavais dix fois de suite.» À l’évocation des faits qui remontent à mars 2012, la jeune femme éclate en sanglots. Elle a rencontré Dean lors d’une soirée après un concert. Il l’aurait draguée et aurait insisté pour la raccompagner chez elle après qu’elle se fut sentie mal. C’est là qu’il l’aurait forcée à avoir un rapport sexuel non consenti avec lui. Les faits se seraient répétés le lendemain matin.
Dean, qui n’a pas jugé utile d’assister à son procès mardi et mercredi, avait nié les faits face aux policiers. Il a également nié le viol qu’il aurait commis sur Nathalie après une soirée au terme de laquelle la jeune fille – avec laquelle il aurait déjà eu un rapport sexuel non consenti en 2010 – se serait également sentie mal. Dean aurait insisté pour qu’elle passe la nuit chez lui, refusant de la laisser seule.
Le prévenu, quant à lui, a dit aux policiers et au juge d’instruction qui l’ont entendu après les faits avoir été dragué par les deux victimes présumées. Elles auraient également pris les choses en main une fois seules avec lui. À l’expert psychiatre chargé d’établir son profil psychologique, il a confié ne jamais les avoir forcées et estimer être en mesure de distinguer le consentement d’une femme. Le jeune homme dénonçait un complot ourdi contre lui par les jeunes femmes. La troisième, Cindy, ayant fait son apparition dans l’enquête à la suite d’un témoignage.
L’expert psychiatre a estimé que Dean était pleinement responsable de ses actes. Il n’a pas décelé chez lui de maladie mentale. Seulement des traits narcissiques, un besoin d’être admiré et un goût pour le commandement. Dean aurait fait état d’une vie sexuelle riche, d’une libido très forte et d’un tempérament de séducteur. «Mais il a dit avoir été très respectueux envers ses partenaires», précise l’expert, qui ajoute qu’il s’est qualifié de «petit cochon».
«Respectueux de ses partenaires», ce n’est pas ce qui ressort des récits que les jeunes femmes ont faits à la barre mardi et à l’expert psychologue chargé de réaliser leurs expertises de crédibilité. Il a jugé ceux de Jennifer et de Nathalie crédibles au vu de leur constance et des nombreux éléments et détails de vécu authentique qu’ils comportaient. De plus, il a décelé des symptômes de stress post-traumatique chez les deux jeunes femmes.
Il a cependant émis une réserve quant au témoignage de Cindy en raison de son inconstance tout au long de la procédure. Une inconstance qui, tempère-t-il, pourrait s’expliquer par son intelligence inférieure à la moyenne, son trouble de déficit de l’attention et le stress.
«Tout ce qui compte, c’est lui»
Le procureur décidera de s’en tenir à la version corroborée par la mère de Cindy, selon laquelle il n’y aurait eu qu’un seul acte sexuel non consenti entre elle et Dean, le deuxième soir de leur rencontre. En tout, il ne retient que cinq viols contre Dean au lieu de six. Il requiert son acquittement pour le viol présumé de Nathalie en 2010, l’infraction étant insuffisamment caractérisée. Pour les quatre viols restants, il requiert une peine de six ans de prison. La peine maximale pour ce type d’infractions étant de dix ans.
Le représentant du parquet retient que les jeunes femmes n’avaient aucune raison de mentir et rappelle qu’aucune d’elles ne voulait porter plainte contre lui. Jennifer culpabilisait de l’avoir ramené chez elle, Nathalie avait déjà porté plainte pour un viol en 2009 et sa plainte avait débouché sur un non-lieu, Cindy avait peur de Dean.
Il estime que les versions des faits données par le jeune homme à la police et au juge d’instruction ont été contredites par l’instruction. S’ajoute en sa défaveur un mode opératoire presque identique pour chaque agression, la multiplicité des faits dans une période courte et sa personnalité narcissique qui, selon le procureur, est compatible avec les faits.
«Un non ne l’arrête pas. Tout ce qui compte, c’est lui», lance le procureur. «Il a pris ce qu’il voulait.» L’intention criminelle est donnée, Dean est pénalement responsable, il ne nie pas les relations sexuelles, mais il n’aurait pas pris en compte l’absence de consentement des jeunes femmes. De même qu’il n’y a pas eu de prise de conscience de sa part ou de repentir. «Les faits sont pourtant graves», rappelle le procureur, qui pointe l’état dans lequel se trouvent et se sont trouvées les jeunes femmes ainsi que les conséquences que ces actes ont eues sur leur vie de femme.
Les jeunes femmes ont toutes dit avoir peur de le recroiser. Toutes ont été prises de panique en croisant un homme qui lui ressemblait. Toutes ont fait des cauchemars et ont eu du mal à retrouver une sexualité normale. Le reste leur appartient.
Le prononcé est fixé au 20 octobre.
Sophie Kieffer