Fin 2017 en pleine nuit, un piéton avait été fauché par une voiture sur la N2 entre le rond-point Irrgärtchen et celui de Sandweiler. L’automobiliste au volant lors de l’accident est jugé depuis mardi. Le parquet lui reproche également un délit de fuite.
Il n’était plus là quand les secours et la police sont arrivés sur les lieux de l’accident cette nuit du 14 au 15 décembre 2017. Après avoir brutalement fauché le piéton avec sa voiture, il a continué sa route, laissant derrière lui la victime grièvement blessée.
C’est un autre automobiliste qui a donné l’alerte à 1 h 53 en découvrant le piéton sans connaissance sur la N2, route de Remich, entre le rond-point Irrgärtchen et celui de Sandweiler. «En roulant j’ai vu un crâne en sang sur le bas-côté. Je n’y croyais pas. J’ai fait demi-tour et je me suis rendu compte que c’était vrai», relate le témoin à la barre du tribunal correctionnel.
Lorsque la victime est transportée d’urgence à l’hôpital du Kirchberg, le chauffard qui l’a percutée est déjà bien loin. Il est rentré chez lui en Lorraine. Qu’il y a eu un choc, le prévenu, âgé aujourd’hui de 41 ans, ne le conteste pas. «Mais jamais je me suis rendu compte qu’il s’agissait d’un être humain. Je n’ai rien vu du tout», insiste-t-il face aux juges de la 12e chambre correctionnelle. «J’ai pensé avoir heurté un gibier.»
Cette nuit-là, il revenait de son travail au Kirchberg. Après son service, il y avait eu la fête de Noël. Sur le chemin du retour, il aurait fait tomber sa cigarette électronique dans la voiture… Et puis il y aurait eu ce «bruit dans la vitre. Je n’ai jamais pensé une once de seconde que c’était un individu. Jamais je n’aurais laissé une personne comme ça…» «Jamais!», répète le quadragénaire en exprimant ses regrets. Et d’embrayer : «Il faisait un temps terrible. J’ai regardé dans les rétros…» Le président le stoppe dans son récit : «Vous avez heurté un homme. Si vous étiez sorti de voiture, vous l’auriez vu… Il était grièvement blessé, vous l’avez laissé sur la route.»
Du vin et du cannabis «pour se calmer»
Il n’y a pas que les coups et blessures involontaires que le parquet reproche au quadragénaire, il y aussi le délit de fuite après l’accident, la non-assistance à personne en danger ainsi que la conduite sous l’influence de stupéfiants et en présentant des signes manifestes d’ivresse. L’expert toxicologue entendu mardi matin, lors du premier jour du procès, a en effet décelé la présence de cannabis dans ses analyses sanguines et urinaires. D’après le taux de THC détecté, il a pu être sous son influence lors de l’accident. L’heure exacte de la consommation de la drogue n’a toutefois pas pu être déterminée. La durée de détection varie entre 3 et 12 heures.
Depuis le départ, le prévenu déclare avoir fumé un joint après être rentré chez lui. Un vieux joint qu’il avait chez lui depuis un festival de 2016. «C’était pour me calmer après avoir vu l’état de la voiture», détaille-t-il face aux juges. «J’étais choqué. Je me demandais quel type de gibier j’avais pu heurter.» Il aurait eu l’intention d’appeler l’assurance le lendemain.
Mais les choses se sont quelque peu accélérées différemment. Sur les lieux de l’accident, la police avait ramassé le morceau d’un feu de brouillard d’une Mitsubishi L200. Les recherches étaient en cours pour retrouver le véhicule. Un appel à témoins dans la presse avait également été lancé pour mettre la main sur le fuyard. Ce qui a fait que le quadragénaire a fini par se manifester en cours de la journée. Interrogé par la police, il avait déclaré avoir bu deux à trois verres de vin en rentrant à la maison. Toujours «pour se calmer».
À pied pour rentrer à l’hôtel à Sandweiler
L’enquête a permis de retracer qu’il avait quitté à 1 h 39 son lieu de travail au Kirchberg après la fête. L’accident a dû se produire à 1 h 49. La victime, quant à elle, ne résidait pas au Grand-Duché. Elle s’y trouvait dans le cadre de son travail. Dans la soirée, elle avait participé à une conférence, puis à un banquet au restaurant. Grâce à son portable, la police a pu retracer qu’à partir de 0 h 20, elle tente d’appeler un taxi au Kirchberg. Mais ce dernier ne semble jamais être venu. Par le biais des messages que la victime a envoyés à sa femme, on sait qu’elle a pris la décision de rentrer à pied à son hôtel à Sandweiler. La suite, on la connaît. Le piéton percuté par le véhicule est resté longtemps hospitalisé. «Lourdement handicapé», l’homme, âgé aujourd’hui de 43 ans, est obligé de se déplacer en chaise roulante, ont fait savoir hier ses avocats qui le représentent pour le procès
Les débats se poursuivent ce mercredi après-midi avec l’audition d’un expert qui s’est penché sur les circonstances de l’accident. Sur le bord de la route limitée à 90 km/h un plot réflectorisé a été retrouvé fort endommagé. Sur le bas-côté, il y avait également des traces d’un véhicule.
Fabienne Armborst