Un «jeu» tourne mal et Hamilton se fait tirer dessus avec une arme qu’il avait empruntée à un ami. Le tout se joue dans le quartier Gare au petit matin en 2017.
La victime a la mémoire qui flanche, l’auteur présumé brouille les pistes, des témoins qui manquent à la pelle et le propriétaire de l’arme du crime n’a rien vu, rien entendu. L’affaire débute bien et on mesure les difficultés qu’ont pu éprouver les enquêteurs de la police judiciaire à démêler cette histoire qui commence par une paire de fesses à l’air à la suite d’un jeu puéril à la sortie d’une discothèque et qui se termine en coup de pistolet dans la tête. Une affaire qui n’a visiblement pas mis du plomb dans le crâne de ses protagonistes.
Le 16 avril 2017, une bande de jeunes sort de discothèque après 6 h. Sur l’ancien parking de la poste à Hollerich, on se charrie bêtement, selon Ezequiel. Traduction : un jeune homme est déshabillé devant tout le monde. Il remonte son caleçon, récupère son pantalon et se tire ailleurs. Là où João et ses amis mangeaient un bout avant de rentrer se coucher. Ils se connaissent et João propose son aide. Tous se rendent sur le parking pour laver l’honneur du jeune homme. João évoque un échange de «pêches banales» jusqu’à ce qu’Hamilton pointe un petit pistolet sur les bagarreurs et tire.
João a senti la balle passer à quelques centimètres de lui, a-t-il raconté à l’expert psychiatre chargé de dresser son profil psychologique. Se sentant en danger, il a voulu désarmer Hamilton. Le coup serait parti tout seul. Deux cartouches de calibre 22 correspondant au petit pistolet Walther ont été retrouvées sur le parking. Une balle dans l’estomac d’Hamilton. Entrée par la tempe gauche, elle n’a pas transpercé le crâne et a été déviée. João a finalement ramassé le pistolet et l’a mis dans sa voiture où elle se trouvait encore à l’arrivée de la police.
«Rien vu et rien entendu»
Le jeune homme de 24 ans a refusé de la rendre à son propriétaire par peur qu’un nouveau coup de feu ne soit tiré, rapporte la présidente de la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg mardi. «Vous n’êtes pas tout à fait innocent dans cette histoire», lance-t-elle à Ezequiel. Il a montré son arme à Hamilton avant la bagarre et a participé «au petit jeu» de déshabillage, «des éléments déclencheurs» de ce qui a suivi, selon la magistrate qui a du mal à croire les explications du témoin. À la barre, il a affirmé n’avoir «rien entendu et rien vu». Cependant, selon des témoins interrogés par la police, il aurait déplacé son véhicule et serait revenu plus tard avant de reprendre la poudre d’escampette à la vision des premiers uniformes de police. «Dans la vie, je mens beaucoup, mais là, je dis la vérité», se justifie-t-il. Les juges apprécieront.
Hamilton, la victime, paraît hagard. «Les gens m’ont dit que João m’a tiré dessus, mais je ne sais pas qui c’est», précise-t-il avant d’expliquer qu’il a perdu la mémoire. «J’ai un suivi psychiatrique. Je prends beaucoup de médicaments.» Hamilton semble attirer les ennuis. Un an avant les faits, il est plongé dans le coma à la suite d’un traumatisme crânien et un an après, il est retrouvé par la police sur le rond-point Kennedy à Esch-sur-Alzette avec un couteau de 11 centimètres planté dans le dos. Heureusement pour lui, cette fois, la balle a été déviée. Son agresseur avait été condamné à douze ans de prison dont six assortis du sursis en octobre 2020. La présidente n’insistera pas, comprenant que le jeune homme n’était pas en capacité de lui répondre.
Aux enquêteurs, João qui aurait varié les versions lors de ses interrogatoires auprès de la police et du juge d’instruction, a dit avoir tiré sur Hamilton en cherchant à le désarmer. Les deux policiers ont tenté mardi, avec une de leurs armes personnelles déchargée, de démontrer que la version du prévenu ne tient pas la route. Il dit avoir tordu le poignet de sa victime en retournant l’arme contre elle pour se protéger. Son doigt se serait placé sur celui d’Hamilton sur la détente et le coup serait parti. Impossible, prétend l’enquêteur de la police technique : le pontet de ce type de petit pistolet est déjà étroit pour un seul doigt.
Que s’est-il vraiment passé vers 7 h 30 sur le parking de la rue de Hollerich ? Les analyses de la téléphonie des divers protagonistes ont permis d’écarter la thèse du rendez-vous pour procéder à un règlement de comptes. Avec des témoins absents et dont certains noms ravivent les souvenirs de la présidente de la chambre criminelle, difficile de remonter le fil. João, décrit par les experts psychiatre et psychologue comme un jeune homme normal et immature, pourra donner des explications sur les faits ce mercredi après-midi après le rapport de l’expert en balistique.
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