Une responsable de vente était citée, lundi matin, par son ancien employeur devant le tribunal correctionnel pour violation du secret professionnel.
« La société ne diffuse pas sa liste de clients. C’est le fruit de plusieurs décennies de travail. Ce sont des données essentielles pour prospérer dans la vente d’engins de chantier. » Parce qu’elle lui reproche d’avoir soustrait puis utilisé le fichier clients dans le but d’exercer une activité concurrente, l’entreprise avait cité son ancienne employée devant la 12e chambre correctionnelle.
Pendant cinq ans, l’actuelle quinquagénaire a occupé la fonction de responsable de vente (sales manager) avant de donner sa démission au printemps 2016. Après quelques mois sans travail, elle a intégré une autre société de vente d’engins de chantier. «Le préjudice a été découvert quand des clients fidèles ont signalé avoir reçu une lettre circulaire de sa part», poursuit Me Saliha Dekhar. Pour l’avocate de la partie requérante, il n’y a aucun doute que la quinquagénaire «a essayé de capter la clientèle de son ancien employeur. Elle a siphonné le fichier clients Outlook en ne laissant que quelques données secondaires sur son ordinateur.» La partie requérante réclame aujourd’hui 50 000 euros de préjudice ainsi que 2 000 euros pour indemniser les frais de procédure. «Cet incident a donné une mauvaise image de la société. Elle a dû déployer des efforts de communication», argue Me Dekhar.
L’ex-employée, quant à elle, clame son innocence : «Je n’ai pas emporté de contacts. Je ne vois pas l’intérêt. Je n’ai aucune animosité envers mon ancien employeur.» À la barre lundi matin, la quinquagénaire a expliqué avoir donné sa démission quand son père est décédé. À l’époque, elle n’aurait eu aucun nouvel employeur en vue. Après avoir passé plusieurs mois sans travail, elle avait démarré dans la nouvelle firme début octobre 2016.
La citée directe conteste également être à l’origine du fameux courrier circulaire adressé aux nombreux clients. Même si sa signature y figure, cela aurait été la décision de son supérieur, dit-elle. Quant à la disparition des contacts sur son ordinateur, elle déclare qu’en février-mars 2016 un virus avait attaqué son ordinateur. À la suite de quoi, son disque dur aurait dû être remplacé et le programme Outlook réinstallé.
La défense déballe l’annuaire téléphonique
Son avocat a plaidé l’acquittement, demandant au tribunal de rejeter les préventions de la violation du secret professionnel et du vol domestique. «La liste de clients ne constitue pas un secret d’affaires», considère Me Nathan. «Une simple recherche sur Editus vous donne toutes les informations nécessaires. Il est possible d’y trouver 374 adresses d’entreprises du secteur au Luxembourg», argue-t-il. Toujours selon la défense, le document de la mise en route de la garantie des engins pouvait également livrer les contacts des clients. «Toutes les entreprises qui ont acheté du matériel sont enregistrées au siège de la société.»
En effet, l’ex-employeur de la quinquagénaire a, pendant de longues années, représenté cette firme allemande au Grand-Duché en vendant ses machines de chantier. Si l’on suit le témoignage du gérant technique, le chiffre d’affaires pouvait atteindre deux millions par an. Me Nathan n’a pas manqué d’insister sur l’accord de résiliation de cette représentation en 2016. Selon lui, les accusations contre la quinquagénaire trouveraient leur origine dans la dégradation de ces relations.
Or, pour la partie requérante, les explications de la défense ne tiennent pas la route. «Pourquoi le magasinier, qui s’occupe de la logistique, a-t-il également été destinataire de l’e-mail ?, a enfin soulevé Me Dekhar. Il semble qu’elle ait oublié de retirer le contact de son ancien collègue avant de faire partir la lettre circulaire. Car son nom ne figure pas sur Editus», a appuyé l’avocate.
Dans cette affaire, le parquet se rapporte à prudence de justice. Prononcé le 7 décembre.
Fabienne Armborst