Fin 2017 en pleine nuit, un piéton avait été renversé sur la N2 entre le rond-point Irrgärtchen et celui de Sandweiler. Le tribunal correctionnel a rendu jeudi matin son jugement. L’homme qui a poursuivi sa route après l’accident écope également d’une amende de 2000 euros et d’une d’interdiction de conduire de trois ans.
Il n’était plus là quand les secours et la police sont arrivés sur les lieux de l’accident cette nuit du 14 au 15 décembre 2017. Après avoir brutalement percuté le piéton avec sa voiture, il a continué sa route, laissant derrière lui la victime grièvement blessée. C’est un autre automobiliste qui a donné l’alerte à 1 h 53 en découvrant le piéton sans connaissance sur la N2, route de Remich, entre le rond-point Irrgärtchen et celui de Sandweiler.
«Cette victime, je ne l’ai jamais vue. J’ai pensé avoir heurté un gibier. Cette affaire a aussi détruit ma vie…», avait répété le prévenu de 41 ans à la barre. Outre les coups et blessures involontaires, le parquet lui reprochait le délit de fuite, la non-assistance à personne en danger et la conduite en présentant des signes manifestes d’ivresse.
«Après le choc, il n’est pas descendu de sa voiture.» Pourtant, cela aurait été son obligation, avait martelé la parquetière dans son réquisitoire. «Il n’est pas resté sur les lieux. Il est rentré chez lui. Et il ne s’est pas non plus manifesté immédiatement à la police dans les heures qui ont suivi.» Ce n’est qu’après l’appel à témoins dans la presse qu’il s’était rendu à la police.
Acquitté pour l’alcool et le cannabis
Les tests ayant été réalisés 21 heures après le drame, on n’avait trouvé aucune trace d’alcool. Mais pour le parquet, on pouvait s’appuyer sur les images de vidéosurveillance sur son lieu de travail où il monte les escaliers lors de la fête de Noël en se tenant à la rampe : «Il est environ 1 h 16. Il a un problème d’équilibre.» L’expertise toxicologique avait révélé un taux de THC. Or, vu le délai de détection, le parquet ne pouvait pas prouver qu’il avait conduit sous l’influence de cannabis. Le prévenu, lui, affirmait avoir fumé un joint à son arrivée chez lui en Lorraine «pour (se) calmer après avoir vu l’état de la voiture».
«Beaucoup était en jeu.» C’est avec un certain soulagement que l’avocat Me Philippe Penning a entendu le prononcé, jeudi matin. Son client écope de six mois de prison assortis d’un sursis intégral, d’une amende de 2 000 euros et d’une interdiction de conduire d’un total de 36 mois. Pour la moitié de cette peine, il bénéficie d’un sursis intégral, pour l’autre moitié les trajets professionnels sont exceptés.
La défense est contente que la 12e chambre correctionnelle n’ait au final retenu que deux infractions : les coups et blessures involontaires et le délit de fuite, mais pas la non-assistance à personne en danger. «Moralement cela aurait fait mal d’être condamné pour avoir laissé quelqu’un au bord de la route.» L’acquittement pour la conduite sous l’emprise d’alcool et de stupéfiants a aussi son importance pour le quadragénaire. Car en cas d’une condamnation, son assureur en France aurait pu former un recours contre lui.
La victime se voit allouer 150 000 euros
Le volet civil sera réglé par expertise. Le tribunal a décidé qu’il n’y a pas lieu d’instaurer un partage de responsabilités. Un expert médical et un expert calculateur ont ainsi été nommés afin d’évaluer le préjudice de la victime. En attendant, une provision de 150 000 euros lui a été allouée. «Lourdement handicapé», l’homme, âgé aujourd’hui de 43 ans, est obligé de se déplacer en chaise roulante, avaient fait savoir ses avocats qui le représentaient pour le procès fin février.
La victime se trouvait dans le cadre de son travail au Grand-Duché. Dans la soirée, elle avait participé à une conférence, puis à un banquet au restaurant. Grâce à son portable, la police a pu retracer qu’à partir de 0 h 20, elle a tenté d’appeler un taxi au Kirchberg. Mais ce dernier ne semble jamais être venu. Par le biais des messages que la victime a envoyés à sa femme, on sait qu’elle a pris la décision de rentrer à pied à son hôtel à Sandweiler.
Le piéton percuté par le véhicule est resté longtemps hospitalisé. Quatre membres de sa famille se sont aussi constitués parties civiles. Pour évaluer leur préjudice, un expert calculateur a été nommé.
Le tribunal est resté en dessous des réquisitions du parquet. À voir s’il interjette appel contre le jugement.
Fabienne Armborst