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Ouvrier grièvement blessé à Luxembourg : amende requise contre l’employeur


La victime, âgée de 36 ans, se déplace aujourd'hui en fauteuil roulant. (illustration Editpress)

En 2014, un ouvrier avait chuté de plusieurs mètres d’une charpente rue Chimay et s’était grièvement blessé. Le procès de l’employeur a eu lieu mardi. Le parquet reproche à la société de ne pas avoir mis tout en œuvre pour assurer la sécurité et la santé de ses ouvriers.

« La toiture était loin d’être terminée. On travaillait sur l’arrière. Le jour précédant ma chute, on avait terminé la partie avant », se souvient la victime de l’accident du travail, âgée aujourd’hui de 36 ans. C’est depuis sa chaise roulante que le trentenaire a livré, mardi après-midi, son témoignage. «J’étais en train de couper des poutres pour poser un Velux. Au moment de la chute, j’étais sur la partie la plus haute du toit. La latte a cassé…»

Au moment du drame, il n’y avait pas d’échafaudage. L’ouvrier ne portait pas non plus de harnais de sécurité. Résultat : il a subi une chute de quatre mètres et a été très grièvement blessé. Il a atterri sur le système de climatisation entreposé dans une boîte au grenier.

«En voyant la latte qui a lâché, je ne sais pas si j’aurais mis les pieds dessus», remarque le président de la 7e chambre correctionnelle. «On a toujours fait de cette façon. Il n’y a jamais eu de soucis», réplique la victime. Même réponse pour le non-emploi du harnais. Certes, lui et ses collègues en avaient un à leur disposition dans la camionnette. Mais ce n’était pas dans ses habitudes de s’équiper pour réaliser les travaux de charpente, à la différence de la pose des ardoises.

De l’enquête, il ressort que les jours précédents l’accident, le temps était mauvais. «Il fallait avancer», indique le trentenaire. Ce n’est pas la première fois qu’il effectuait des travaux de charpente à l’extérieur. «C’était un travail quotidien.» À l’époque, cela ne faisait pas loin de neuf ans qu’il travaillait au sein de l’entreprise.

Le parquet requiert 20 000 euros d’amende

Sur le banc des prévenus se trouvaient mardi ses deux gérants. Le premier indique ne plus avoir eu affaire avec le chantier après l’établissement des plans avec l’architecte. Le second explique s’être rendu en moyenne deux à trois fois par semaine sur le chantier, rue Chimay, à Luxembourg où ils employaient cinq ouvriers. Le reste se faisait par téléphone. À l’époque du drame, il était également responsable de la sécurité au sein de la société. Sur question du tribunal, il a confirmé que si des travaux étaient effectués à une certaine hauteur sans échafaudage, la consigne était d’utiliser un harnais. Cette consigne ne figurait toutefois pas sur le contrat de travail.

«Ils partaient du principe que le personnel avait appris cela lors de sa formation», a appuyé Me Edith Reiff. L’avocate à la défense de l’entreprise a parlé d’un «tragique accident». «C’est une cohabitation d’une série de circonstances malencontreuses», a-t-elle résumé avant de soulever le stress de l’ensemble des corps de métiers sur le chantier avant le congé collectif. Une boulangerie-pâtisserie était sur le point d’ouvrir au rez-de-chaussée. Me Reiff demande une simple amende.

«C’est à la société de veiller que le harnais soit porté par ses employés. Il ne suffit pas de mettre le matériel à disposition», a martelé le représentant du parquet dans son réquisitoire. Il note que la veille de l’accident, lors d’un contrôle, un coordinateur de santé et de sécurité avait relevé l’absence de plateforme sous la charpente. Cette réalité avait été communiquée à la société. «Il aurait soit fallu installer une plateforme ou stopper le chantier», récapitule-t-il.

De certaines dépositions, il ressort que le gérant aurait autorisé à son personnel de travailler sur l’arrière de la toiture. Le patron dit avoir compris qu’il était question de mettre le matériel à l’abri. «Peu importe ce qu’il a cru comprendre. En sa qualité de gérant et de responsable de la sécurité, le chantier devait être en état pour qu’on y travaille», conclut le parquet. Il requiert une amende de 20 000 euros. Il retient que l’entreprise de toiture poursuivie n’a jamais connu d’accident.

Prononcé le 5 octobre.

Fabienne Armborst