La nuit de la mort brutale d’Ana Lopes, son ex prétend avoir un alibi : il était occupé à promener les chiens. C’est l’explication qu’il a livrée à l’enquêteur qui a épluché l’activité sur son portable…
«Il ne restait pas grand-chose du portable qu’Ana Lopes portait avec elle lorsqu’on a découvert la voiture incendiée derrière la frontière au « Haferbusch », aux abords de Roussy-le-Village.» Au deuxième jour du procès, mercredi après-midi, l’enquêteur de la police judiciaire a décortiqué l’activité des portables de la victime et de son ex-petit ami Marco B. (32 ans) qui se trouve sur le banc des prévenus.
Difficile de tirer quelque chose du portable carbonisé. L’enquêteur a donc fait parler les données téléphoniques saisies auprès de l’opérateur. Elles ont permis de retracer l’arrivée de la victime sur le territoire français après son enlèvement à Bonnevoie le 16 janvier 2017. Entre 1 h 23 et 1 h 44, le portable est passé par les pylônes de Howald, Frisange, Bettembourg… et enfin Dalheim. C’est là où le portable bornera une dernière fois. Ensuite plus aucun mouvement n’a pu être observé, d’après l’enquêteur : «2 h 13, c’est l’heure où le portable de la victime quitte le réseau.On peut en déduire que le téléphone était alors en feu.»
À ce moment-là, Marco B. prétend avoir été chez lui. Et il aurait été bien occupé avec leurs chiens. C’est du moins ce qu’il a déclaré à la police lorsqu’on l’a confronté à l’appel manqué sur son portable à 1 h 17. Outre cet appel venant de sa mère, l’enquête avait pu retracer deux SMS échangés à deux heures bien tardives. À 3 h 07, c’est sa mère qui lui avait envoyé un message. Et à 6 h19, c’est lui qui lui en avait envoyé un.
Deux SMS effacés qui interpellent
Ces deux SMS interpellent d’autant plus qu’ils ont disparu du portable des deux interlocuteurs. «J’efface toujours tous les messages. C’est une habitude», dira la mère lors de son audition avant même que la police ne lui en parle.
Mais selon Marco B., cet échange de SMS en pleine nuit n’avait rien d’inhabituel. Il fallait qu’ils sortent leurs compagnons à quatre pattes pour éviter qu’ils fassent leurs besoins dans la maison… Il avait l’habitude de promener Rocky, le plus grand des chiens, tandis que sa mère se chargeait des deux petits. Et comme le premier allait toujours plus loin et qu’il n’avait pas de clé de la maison familiale, ils auraient eu l’habitude de s’envoyer un SMS… «pour dire que j’arrive avec le chien… et qu’elle m’ouvre la porte».
Si l’on suit les déclarations de toute la famille B., promener les chiens en pleine nuit n’a rien d’inhabituel. Et c’était «normal» qu’ils s’écrivent un SMS. Ce n’est toutefois pas ce qui ressort de l’analyse des relations téléphoniques. Sur les six derniers mois précédents, entre minuit et 6 h, l’enquêteur avait pu déceler une trentaine de contacts téléphoniques entre Marco B. et sa mère. «De là à parler d’une régularité, on en est bien loin», constate l’enquêteur. Aucun indice non plus qu’il était question des chiens.
Un film qui interroge
L’enquêteur a également exprimé ses doutes quant à la version livrée par la sœur de Marco B. Elle avait étayé son alibi en affirmant qu’elle avait regardé avec lui le film Warcraft d’une durée de 120 minutes à partir de 21 h 30. Une version qui ne colle toutefois pas avec les investigations de la police. Car les images de vidéosurveillance ont révélé que peu avant 23 h, il est passé en voiture devant le café Pepper’s à Bonnevoie. Impossible donc d’être au lit en train de regarder un film…
Ce qui interpelle aussi, c’est que la nuit de la disparition d’Ana, à partir de 22 h 06 jusqu’au lendemain soir 20 h 36, aucune activité internet n’a pu être retracée sur le portable de Marco B. Ce qui est contraire à ses habitudes. Il faut attendre le 17 janvier pour que cela reprenne son cours normal.
Lors de son audition, Marco B. a également été confronté au serre-câble découvert le 20 janvier entre deux voitures garées route de Thionville avec le sachet qu’Ana avait ramené de chez McDonald quelques minutes avant son enlèvement. Il était de la «même marque et même taille» que ceux saisis lors de la perquisition début mai. Pour Marco B., il s’agit d’un «pur hasard».
L’expertise de la poignée du sachet avait mis en évidence les traces ADN de l’ami avec lequel Ana avait passé la soirée. Mais cette piste avait rapidement pu être écartée. L’enquêteur a précisé hier que lors de sa troisième audition, cet ami avait fini par donner une explication : durant la soirée, Ana et lui avaient eu un rapport sexuel dans la voiture…
Suite du procès ce jeudi après-midi.
Fabienne Armborst
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