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Ana Lopes : enlevée à Bonnevoie, retrouvée calcinée à Roussy-le-Village


La jeune femme avait disparu dans la nuit du dimanche 15 au lundi 16 janvier 2017. Son corps calciné avait été retrouvé à peine 24 heures plus tard dans son véhicule incendié, en Lorraine, non loin de la frontière, aux abords de Roussy-le-Village. (Photo : le républicain lorrain/Julio Pelaez)

La mort brutale d’Ana Lopes, domiciliée à Bonnevoie, avait secoué l’actualité en janvier 2017. Le procès de son ex-petit ami s’est ouvert mardi matin. Retour sur les lieux du crime avec l’enquêteur.

Elle devait aller chercher à manger en voiture au McDo. Peu avant 1 h du matin le 16 janvier 2017, sa sœur lui avait passé une commande par SMS. En sortant du café Pepper’s à Bonnevoie, Ana Lopes est bien passée au fast-food. Mais elle n’est jamais rentrée à la maison. Ce dossier de «disparition inquiétante» signalée à la police a très vite pris une nouvelle tournure… quand en cours de journée, les gendarmes français ont découvert un corps calciné dans une voiture incendiée en Lorraine, à 3,8 km de la frontière luxembourgeoise, aux abords de Roussy-le-Village. L’autopsie et l’analyse de l’ADN avaient confirmé qu’il s’agissait bien de la jeune femme de 25 ans.

Depuis mardi matin, la 13e chambre criminelle planche sur cette affaire. Sur le banc des prévenus : Marco B. (32 ans), l’ex-petit ami de la victime et père de leur fils en commun. Les débats s’annoncent long. Quatre semaines d’audience ont été fixées. Car le trentenaire, en prison depuis début juin 2017, conteste les faits. Une position qu’il a fermement réaffirmée à l’ouverture de son procès. Dans le fond de la salle, proches et amis avaient pris place. Avant que certains d’entre eux ne soient entendus comme témoins, c’est au tour de l’enquêteur de la police judiciaire luxembourgeoise. Un peu à l’image d’un immense puzzle que l’on reconstruit, il assemble cette affaire pièce par pièce.

Deux Happy Meal entre des traces de sang

La cause exacte du décès de la jeune maman domiciliée à Bonnevoie n’a pas pu être mis en évidence lors de l’autopsie. Mais l’«absence de suie macroscopiquement visible» indique que «la victime n’a vraisemblablement pas respiré» quand sa BMW est partie en fumée. Une expertise retient, en outre, que du «carburant a été déversé sur le corps de la victime ou à proximité immédiate».

Si l’on suit l’enquêteur, le lieu du crime, le «Haferbusch», à l’écart de la départementale D653, la route principale menant de Frisange vers Thionville, était «un bon endroit» qu’«on ne trouve pas comme ça part hasard». À part une ferme à proximité, aucune habitation dans les alentours.

C’est la découverte quatre jours plus tard, le 20 janvier, du sachet McDonald’s avec les deux Happy Meal payés par Ana qui avait permis de faire avancer l’enquête. Entre les deux voitures garées route de Thionville, on avait aussi trouvé sur un mur des traces de sang de la victime. Ce qui laisse dire à l’enquêteur qu’elle a dû être tuée à Bonnevoie, avant qu’on tente de la faire disparaître en France.

Un ex et une «relation compliquée»

L’expertise de la poignée du sachet et d’un attache-câble saisi avait mis en évidence les traces ADN d’un ami avec lequel Ana avait passé la soirée. Mais cette piste ne s’est pas concrétisée par la suite. L’enquête a vite penché vers son ex-petit ami, Marco B. Le couple s’était définitivement séparé en octobre 2016. Du côté de la famille et des proches d’Ana, la «relation compliquée marquée de violences physiques et verbales» est sur toutes lèvres. L’entourage parle aussi d’un «homme jaloux». L’un des problèmes aurait été la garde de l’enfant en commun. Son comportement bizarre aurait fini par interpeller la jeune maman : «Quelques jours avant sa disparition, il n’était plus derrière elle. Elle pensait qu’il était en train de préparer quelque chose», avait confié une connaissance à la police. La déclaration faite par une autre proche n’est pas anodine non plus : Marco B. aurait ainsi esquissé le projet «d’acheter une vieille voiture, mettre Ana dedans…» et la «brûler». Des propos que Marco B. conteste toutefois avoir formulés.

L’enquête avait mis au jour un certain nombre de contradictions dans l’emploi du temps du suspect. Lors de son audition, Marco B. n’avait dit rien de positif sur son ex. «Elle n’était jamais à la maison», avait-il déclaré faisant allusion au fait qu’elle était active dans le milieu de la drogue. «Elle me disait qu’elle avait une cache à proximité de la frontière franco-lux.» Toujours est-il qu’en passant la scène du crime au peigne fin, la police technique et scientifique avait découvert un ruban adhésif sur lequel des traces ADN masculines de la famille de B. ont pu être mises en évidence.

Dans le viseur des caméras à Bonnevoie

Parmi les indices recueillis, il y a aussi les images des caméras de vidéosurveillance dans le quartier de Bonnevoie qui interpellent. Elles ont permis de retracer certains déplacements de la VW Golf violette de Marco B. dans la nuit du 15 au 16 janvier 2017. Ainsi le voit-on passer à 22 h 48 à proximité du café Pepper’s, là où Ana a passé une grande partie de la soirée. On y voit aussi comment Ana, après être sortie du McDonald’s à 0 h 54, gare à 0 h 59 sa voiture route de Thionville à Bonnevoie. Le sac du fast-food en main, elle quitte sa BMW. C’est la dernière image qu’on a d’elle en vie.

Sur le reste des images épluchées par l’enquêteur, on aperçoit comment à 1 h 19 un homme se dirige et monte dans sa berline. Le véhicule en mouvement est aperçu ensuite sur diverses caméras route de Thionville, rue de Neufchâteau, rue d’Ivoix et… au Rangwee. Ensuite on perd toute trace visuelle de la berline. La conclusion de l’enquêteur : «Le 16 janvier, entre 0 h 59 et 1 h 19 le premier crime a dû avoir eu lieu.»

L’enquête n’a pu retracer l’itinéraire exact du ravisseur jusqu’à Roussy-le-Village. Mais le relevé des relais téléphoniques a permis d’attester l’arrivée d’Ana sur le territoire français autour de 2 h du matin. Dans ce dossier, les données téléphoniques ont aussi toute leur importance. L’enquêteur les fera parler ce mercredi après-midi, lors de la suite du procès.

Fabienne Armborst

Fort probable qu’il n’était pas seul

La BMW avec à son bord la victime est partie en fumée aux abords de Roussy-le-Village. La question qui se pose : comment l’auteur du crime at- il quitté les lieux? Fort probable qu’il n’était pas seul… Près de 4 km séparent en effet ce lieu abandonné et le village de Frisange en passant par la départementale. A-t-il choisi de s’enfuir seul à travers champs? En tout cas, les différentes pistes explorées par la police n’ont pas abouti. Ni à la gare d’Hettange-Grande, ni à la cabine téléphonique, ni par le biais des caméras de vidéosurveillance des stations-services du côté de Frisange, on n’a pu recueillir un quelconque indice. À l’heure actuelle, la question d’un éventuel complice n’a pas pu être résolue. Autrement il y aurait vraisemblablement une deuxième personne sur le banc des prévenus.