La défense du meurtrier présumé d’Ana Lopes a tenté une dernière fois, vendredi, de faire pencher la balance des juges d’appel vers l’acquittement en mettant en doute la valeur de l’ADN en tant que preuve ultime.
Les avocats de la défense ont répliqué au réquisitoire de l’avocat général, vendredi. Mardi, cette dernière avait demandé la confirmation de la condamnation en première instance de Marco B. Le jeune homme avait écopé en janvier dernier de la prison à perpétuité pour l’assassinat de son ancienne compagne et maman de son fils, Ana Lopes. Il continue de clamer son innocence. Me Penning et Me Pietropaolo essayent de faire acquitter leur client.
La défense du trentenaire remet en cause les expertises ADN. De faibles traces d’ADN masculin de la lignée de Marco B. ont été retrouvées sur la partie collante de l’entame du rouleau d’adhésif gisant à proximité de la voiture calcinée. De n’importe quel membre masculin de cette lignée. «Le rouleau d’adhésif a été l’élément déclencheur pour inculper notre client », avait expliqué Me Pietropaolo. «Il n’y a pas de traces compatibles avec son ADN. Dire qu’il se trouvait sur le lieu du crime est une hypothèse de l’accusation que nous contestons.» Pour l’avocat général, l’ADN était une preuve parmi d’autres.
Parmi les preuves, certaines ne suffiraient pas à condamner Marco B., explique la défense, qui regrette que certaines pistes et hypothèses n’aient pas suffisamment été suivies, notamment en ce qui concerne l’ADN. Me Penning interroge : «L’ADN masculin n’a-t-il pas pu être transféré de l’extérieur vers l’intérieur lors des manipulations effectuées par la police? On sait que l’entame a été collée sur le bord du rouleau dans l’enveloppe des scellés.» Pour l’avocat, «on ne sait strictement rien» de la manière dont cet ADN est arrivé sur l’entame, ni même «par qui et quand le rouleau d’adhésif a été manipulé. On n’a pas d’empreintes digitales.» Ces incertitudes auraient dû induire le doute dans l’esprit des juges, mais ces derniers les auraient balayées des deux mains.
L’avocat parle d’erreurs, de conclusions trop hâtives et lance à la présidente de la cour d’appel qu’elle est «la dernière chance» de Marco B. d’échapper à la prison à vie : «Vous n’avez pas le droit à l’erreur.» «Allez chercher des certitudes et ne tombez pas dans la tentation et le piège de la facilité qu’il y a toujours eu dans cette affaire», poursuit-il, lui intimant d’ordonner des expertises et des auditions complémentaires.
« On m’a pris ma vie »
Marco B. s’est, quant à lui, débattu comme un poisson hors de l’eau pour tenter une nouvelle fois de prouver son innocence. Il est convaincu d’avoir «le parquet, la partie civile et la police contre (lui), même (s’il est) innocent» et d’avoir été condamné à une peine «injuste», «moi qui suis innocent». «On m’a pris ma vie», estime-t-il à la barre.
Il a reconnu ne pas être parfait et dit avoir eu des raisons d’être jaloux à propos d’Ana, qui aurait changé au fil du temps passé ensemble. «Toutes vos relations commencent bien et, au bout de deux mois, ça dégénère », lui assène la présidente de la cour d’appel. «Je sais, c’est de ma faute», laisse entendre Marco B. avant de prendre tout le monde de court : «Je n’aurais pas dû choisir ces filles-là.»
Mardi, l’avocate générale l’avait traité de menteur et demandé la confirmation du jugement de première instance. Elle s’était opposée à un sursis en raison du caractère «particulièrement brutal» de ce crime «exécuté avec un sang-froid choquant et préparé minutieusement sur la mère de son enfant». Le jugement en appel sera rendu le 11 janvier.
Début 2017, le corps calciné d’Ana Lopes, 25 ans au moment des faits, était découvert à l’intérieur de la carcasse elle aussi calcinée d’une voiture abandonnée dans un bois de la commune frontalière française de Roussy-le-Village. La jeune femme avait disparu route de Thionville à Bonnevoie dans la nuit du 15 au 16 janvier 2017. Elle aurait été tuée devant chez elle à l’aide d’un serre-câble avant d’être emmenée au «Haferbusch».
Marco B. aurait passé la nuit des faits à promener trois chiens avec sa mère. La géolocalisation et l’utilisation de son smartphone sont venues malmener cet alibi, de même que des contradictions dans les déclarations des proches de Marco B. L’ADN masculin retrouvé sur le rouleau d’adhésif avait fini de convaincre les juges de première instance de la culpabilité du prévenu.
Sophie Kieffer