Condamnée à 15 ans de prison, dont 5 ans avec sursis, pour avoir poignardé son ex à Mertert début 2015, la quadragénaire a sollicité, lundi après-midi, l’acquittement en instance d’appel.
Trois fois, Tatiana D. (48 ans) avait planté le couteau de cuisine dans le corps de son ex, le 17 février 2015, à Mertert. Les trois coups témoignaient d’une certaine force : la lame ayant même pénétré, une fois, à 17 cm de profondeur. Reconnue coupable de meurtre, la quadragénaire, sortie de détention préventive en juin 2015, avait été condamnée en première instance à 15 ans de réclusion, dont 5 avec sursis. Un jugement avec lequel elle n’est pas d’accord.
«Si je ne m’étais pas défendue, je ne serais pas là aujourd’hui.» À la barre de la Cour d’appel, lundi après-midi, la quadragénaire a invoqué la légitime défense dans cette foire d’empoigne : après les insultes, la chute dans les escaliers, la poursuite à travers les pièces de la maison, son ex se serait accroupi au-dessus de son thorax, où il l’aurait menacée : «Du bist jetzt dran!» («Maintenant c’est ton tour!»). Il l’aurait prise par le cou et l’aurait strangulée. «Je pensais que je vivais ma dernière minute.» C’est alors qu’elle se serait emparée du couteau. Comment, elle ne peut se l’expliquer. Car cela s’est passé tellement vite.
Qu’elle entretenait une relation tumultueuse avec cet homme rencontré en 2010 et dont elle s’était séparée en 2014, ne fait pas de doute. Mais pourquoi donc avait-elle accepté de le ramener chez elle ce lundi de carnaval? D’autant plus qu’elle a prétendu avoir eu peur de lui… La Cour d’appel a tenté d’en savoir plus. «J’aurais pu me sauver. Mais je ne pouvais pas…», finira par lâcher la prévenue, qui glissera quelques regrets. Et d’insister : «Je n’ai jamais voulu le tuer! Je préférerais qu’il doive s’expliquer ici pour ce qu’il a fait…»
Les cris au petit matin avaient alerté un voisin. À l’arrivée des secours, la victime baignait dans son sang à l’extérieur de la maison, rue Basse à Mertert. Au moment des faits, elle avait 3 g d’alcool dans le sang, la prévenue près de 2 g : «L’influence d’alcool n’enlève pas la responsabilité pénale», a soulevé la représentante du parquet général. Dans son réquisitoire, elle a battu en brèche la condition de la légitime défense invoquée par Me Catherine Leidner.
Le ministère public dit non à l’acquittement plaidé par la défense. Car il y aurait suffisamment d’éléments dans le dossier pour dire que l’histoire de la prévenue ne colle pas avec les éléments du dossier : l’absence de traces de sang dans la cuisine où elle dit l’avoir poignardé, l’expertise des blessures ne décelant aucune strangulation… Autre détail signifiant : la chaise avec laquelle une témoin, qui avait été invitée à dormir cette nuit-là sur le canapé de Tatiana D., avait affirmé avoir mis l’ex encore en vie à la porte. Une chaise qu’un voisin confirme avoir bien vue ensuite dans la rue…
«Des coups portés par pure haine…»
«Il est prouvé qu’il a été mis à la porte non blessé, récapitule la parquetière. Il a donc dû rentrer de nouveau dans la maison.» Dans ces circonstances, impossible de parler de légitime défense. «Poignarder quelqu’un avec un couteau n’est pas approprié, peu importe ce qui s’est passé avant.» Sa conclusion : Tatiana D. n’aurait pas porté les coups de couteau «par peur, mais par pure haine».
Le parquet général demandera à la Cour d’appel de confirmer la peine prononcée en première instance : «15 ans de réclusion, c’est la peine minimale». Comme cinq ans de cette peine ont été assortis du sursis, la quadragénaire aurait déjà bénéficié d’une faveur. Surtout que son casier renseigne déjà une condamnation pour violences… Placée sous le régime du sursis probatoire pour la durée de 5 ans, elle a l’obligation de se soumettre à un traitement psychologique ou psychiatrique en relation avec ses problèmes d’alcool et d’agressivité.
«L’avez-vous fait entrer à nouveau? Comment pensez-vous qu’il soit rentré?», la questionnera une dernière fois la présidente avant de prendre l’affaire en délibéré. Des questions qui resteront toutefois sans réponse. La Cour d’appel rendra son arrêt le 12 février.
Fabienne Armborst