Ils ont des prénoms de footballeurs, mais ce ne sont pas dans les ballons qu’ils frappent. Les deux jeunes hommes aux dreadlocks comparaissaient lundi après-midi pour une histoire de dents cassées et deal suspect.
Nilton et Edinson se sont battus l’un avec l’autre à Differdange le 14 juillet 2016 après 23h. Nilton dit qu’il aurait été arnaqué lors d’un deal de cannabis par Edinson. Ce dernier prétend que Nilton aurait tenté de le raquetter. «Je n’ai rien vendu du tout», jure Edinson. «Je lui ai demandé de me rendre mon argent», raconte Nilton. Les deux jeunes hommes étaient convoqués lundi devant la 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour une affaire de coups et blessures volontaires, insultes ainsi que vente et achat de stupéfiants.
Kelly, l’ancienne petite amie de Nilton, skateboard, tatouages et look de surfeuse, se souvient qu’ils se promenaient tranquillement quand Nilton, consommateur occasionnel, lui a proposé d’acheter du cannabis dans un lieu qu’il savait réputé pour cela à Differdange. Nilton aurait alors acheté pour 25 euros de cannabis à Edinson. Revenu près de Kelly, il aurait remarqué que le cannabis avait été coupé. Il serait retourné auprès d’Edinson pour récupérer son argent. «Je suis restée en retrait. J’ai entendu que le ton montait entre eux, mais ils parlaient créole donc je n’ai rien compris. Soudain, ils étaient au sol», se souvient la jeune femme.
L’un aurait donné un coup de boule à l’autre. Mais aucun des deux ne reconnaît avoir frappé le premier. Son ancienne compagne témoigne qu’Edinson aurait frappé le premier. Nilton, lui, a perdu des dents dans la bataille et serait encore soigné actuellement à cause de complications. Une affirmation difficile à prouver : son dentiste aurait perdu son dossier médical. «C’est formidable !», s’exclame le juge.
À la barre, les versions restent contradictoires. Edinson prétend que Nilton l’aurait confondu avec un dealer. Il rentrait du travail et d’ailleurs, argumente son avocate, ni drogue ni argent n’auraient été trouvés sur lui par les policiers. «Nilton m’a abordé et m’a réclamé 50 euros, se défend-il. Je ne l’avais jamais vu avant.» «Quand il a vu que j’appelais la police, il a tout caché», répond Nilton. «Ce n’est pas l’affaire du siècle», résume le juge et s’adressant à Nilton: «Il aurait été plus sage de lâcher les 25 euros, et de garder vos dents.»
«Au mauvais endroit au mauvais moment»
Leurs deux avocats ont plaidé la légitime défense et le bénéfice du doute et demandé l’acquittement de leurs clients. L’avocate d’Edinson a indiqué qu’«il était au mauvais endroit au mauvais moment». Son client ne serait pas connu à Differdange où ont eu lieu les faits pour cultiver et vendre du cannabis. «Qui sait ?, rétorque le juge. Il l’est peut-être au parc Gerlache ?»
Côte à côte, les deux campent sur leurs positions. Le procureur ne «croit pas une seconde» à la version d’Edinson. D’autant qu’elle serait à géométrie variable. Edinson aurait bien donné le coup de tête dans les dents à Nilton. «Cela ressort du témoignage de Kelly et des certificats médicaux au dossier», assure-t-il. La version déposée à la barre par Edinson serait «en totale contradiction avec ce qu’il a dit aux policiers le soir des faits», poursuit le procureur. Notamment sur l’emplacement de ses blessures. Il aurait bien essayé de vendre du cannabis. La jeune femme le raconte et «quel intérêt Nilton aurait-il de mentir et de s’accuser d’acheter de la drogue ?». Il a requis une peine de 15 mois de prison avec sursis et une amende à l’encontre du jeune homme.
Il a requis l’acquittement pour les chefs de coups et blessures volontaires et d’insultes retenus à l’encontre de Nilton et une amende appropriée concernant le chef d’achat de drogue, le jeune homme étant en aveux. Nilton et Edinson seront fixés sur leur sort le 29 juin.
Sophie Kieffer