Mohamed est soupçonné d’avoir battu, menacé et violé Gaby alors qu’il était sous l’empire de l’alcool. Malgré une expulsion du domicile, il serait revenu à la charge.
Mohamed a l’alcool mauvais, très mauvais. Et Mohamed en boirait beaucoup. Cinq à six bouteilles de vodka par jour, selon Gaby, son ancienne compagne et victime. Ensuite, il s’écroulait. Avant cela, selon la femme de 65 ans, il la battait souvent et la menaçait de mort ou de mettre le feu à son appartement en permanence. «Je vis encore dans la peur», affirme la dame, diminuée physiquement, face à la 9e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, où elle était appelée à témoigner, ce jeudi. «Dès que je ne répondais pas à ses attentes, il devenait fou.»
Gaby a rencontré Mohamed en mai 2018 dans une structure sociale qu’ils ont tous d’eux fréquentée. À cette époque, l’homme de 52 ans vivait dans la rue après un parcours à travers divers pays d’Europe au départ du Mozambique, où vit une partie de sa famille. Pour l’aider, la sexagénaire lui propose de participer à son déménagement. «Il n’est jamais parti», précise Gaby, qui dit l’avoir accueilli dans son petit studio de Luxembourg et avoir essayé de le mettre sur le droit chemin. Selon elle, il a même voulu l’épouser. «Il aurait pu me tuer et personne ne l’aurait su si nous nous étions mariés.» La sexagénaire a refusé. Elle raconte que le quinquagénaire a été expulsé de son domicile, mais qu’elle lui a à nouveau ouvert sa porte.
Les 24 octobre 2020 et 18 mars 2021, il s’emporte, selon Gaby, après qu’elle lui a demandé de l’argent pour s’acheter un manteau et du parfum. Il aurait à chaque fois avalé une bouteille entière de vodka et l’aurait battue. Lui dit ne plus se souvenir du premier fait et aurait des bribes de souvenirs du deuxième. Selon les policiers, son alcoolémie cinq heures après les faits du mois de mars était de 2,9 grammes par litre de sang.
L’expert psychiatre évoque des hallucinations auditives participant d’une psychose non spécifiée et sa dépendance alcoolique avant de conclure à une légère atténuation de ses capacités de contrôle au moment des faits. Cette psychose fragilise les mécanismes de défense du prévenu et joue sur ses réactions.
«Pas besoin d’un alcoolique chez moi»
Mohamed comparaissait également ce jeudi pour un troisième fait à la suite duquel il a été incarcéré. Le 24 juillet 2021, il aurait refusé de quitter le petit studio de la victime présumée et l’aurait violée dans l’après-midi. Le temps que la police arrive sur les lieux, Mohamed était inconscient. Son alcoolémie était cette fois, selon la police, de 4,4 grammes par litre de sang. Gaby affirme avoir refusé ses assauts dans un premier temps, l’avoir repoussé et avoir appelé de l’aide avant d’accepter sous le coup de menaces. Des analyses de prélèvements ADN ont confirmé les dires de la victime. «Il m’a tapé dessus pendant trois heures avant que je lui dise de passer à l’acte pour éviter qu’il ne me tue», a-t-elle raconté avant de s’effondrer en larmes à la barre. «Les voisins m’ont entendue et n’ont pas appelé d’aide.» Elle l’avait mis, dit-elle, à la porte de chez elle trois mois plus tôt. Le prévenu avait voulu la revoir et elle avait refusé de l’accueillir, a-t-elle témoigné.
Elle explique avoir cru qu’une amie avait frappé à sa porte, avoir ouvert et être tombée nez à nez avec le prévenu. Il est entré et s’est endormi sur son canapé, selon elle. Les propos de Gaby sont confus et ne correspondraient pas toujours à ce qu’elle a indiqué aux policiers et à un médecin au moment des faits. Aux policiers, elle a expliqué être sortie dans le couloir après avoir entendu du bruit à la porte d’entrée principale, avoir vu Mohamed et s’être enfermée chez elle. Le prévenu aurait ouvert la porte du studio d’un coup. Seulement, la porte n’aurait pas été endommagée.
La confusion règne dans la salle d’audience. La présidente de la 9e chambre criminelle lui avait demandé plus tôt si elle souffrait de problèmes de mémoire depuis qu’elle a eu un AVC. Le prévenu a, selon elle, profité de son état pour la menacer de mort.
Les jours précédant le troisième fait, la victime présumée lui aurait envoyé des messages lui demandant de revenir chez elle. L’un d’entre eux, que lit la présidente, dit : «La porte est ouverte». «Il avait l’habitude de casser la porte pour entrer», se justifie Gaby. Questionnée par le procureur, elle répond qu’elle aurait accepté sa venue s’il n’avait pas été sous l’empire de l’alcool. «Je n’ai pas besoin d’un alcoolique chez moi», a-t-elle conclu.
Les débats se poursuivront le mardi 15 mars. La parole sera notamment donnée à Mohamed et à son avocat.