Surpris fin 2019 dans une maison au Kirchberg avec des chaussettes par-dessus leurs souliers et des gants, le duo a tenté de faire croire à la barre qu’il voulait juste y dormir. Une histoire décousue, a trouvé le tribunal.
En franchissant la porte de la salle d’audience, jeudi après-midi, l’un des deux prévenus, actuellement détenu à Schrassig, portait, à côté d’un masque et de lunettes de protection, aussi des gants. Crise sanitaire oblige… Mais enfiler des gants, ce n’est pas une nouveauté pour Necolai (46 ans). C’est en effet ganté que la police l’avait surpris avec son acolyte Luis (35 ans) le 27 décembre dernier dans une maison, sentier de Bricherhof au Kirchberg. Il était 2 h 41. Le duo muni d’une lampe de poche sortait de la salle de bains au moment où les agents montaient au 2e étage.
C’est le voisin d’en face qui avait donné l’alerte après avoir été réveillé par trois bruits. En jetant un coup d’œil par la fenêtre, il avait aperçu deux individus : l’un faisait le guet dans le jardin, l’autre se trouvait près de la porte coulissante de la terrasse. Une porte dont la vitre était cassée au moment de l’arrivée de la police. Effraction de porte, habitation fouillée, armoires et tiroirs ouverts… L’état du rez-de-chaussée et du premier étage en disait long sur le passage du duo.
Lorsque la police les avait interpellés, ils portaient non seulement des gants, mais aussi des chaussettes par-dessus leurs chaussures. Sans doute pour éviter qu’on les retrouve par leurs empreintes… Mais à les entendre jeudi après-midi à la barre, ils ne voulaient que «dormir» dans la maison inoccupée cette nuit-là. Ils se seraient introduits par «la fenêtre ouverte».
«Vous êtes conscient qu’ici vous n’êtes plus au cinéma?»
L’aîné raconte avoir passé la soirée au cinéma. En sortant, il aurait rencontré une connaissance qui logeait comme lui à la Wanteraktioun au Findel. N’ayant plus de bus pour rentrer, ils avaient eu l’idée de pénétrer dans cette maison. Une action spontanée. «Normalement je pensais dormir et repartir le matin. C’était pas pour voler.» Necolai était sur le point de se lancer dans une explication pour justifier pourquoi il avait enfilé ces chaussettes. Mais le juge l’a coupé : «Vous êtes conscient qu’ici vous n’êtes plus au cinéma?»
Me Philippe Stroesser tentera de sauver les meubles après s’être entretenu avec son client. Ce dernier aurait finalement reconnu les faits reprochés. Il parlera encore de la promesse d’embauche par son frère, propriétaire d’une exploitation agricole en Roumanie. «À partir du 1er juin, il est disposé à l’engager pour le travail dans les champs.»
«Juste par curiosité : qui a cassé la fenêtre et qui a fait le guet?», tentera de revenir à la charge le juge. C’était peine perdue. Necolai retombera sur sa position initiale : «La fenêtre était déjà cassée…»
Son acolyte Luis, qui a bénéficié d’une mise en liberté provisoire mi-mars, n’a présenté que des excuses à la barre. Et son avocate, Me Claude Jost, de plaider : «Ils étaient à la recherche de nourriture et de vêtements.» Une position que le parquet ne partage toutefois pas. «S’ils entrent pour prendre des vêtements, pourquoi ne sortent-ils pas après les avoir trouvés?», soulèvera son représentant. En raison de l’équipement du duo et de l’état des lieux, c’est bien la «tentative de vol avec effraction» qu’il faudrait retenir. Il requerra douze mois de prison contre Necolai, déjà condamné pour vol à un parcmètre, et neuf mois contre Luis, lui sans casier judiciaire. Pour une éventuelle amende, il se rapporte à prudence de justice.
«La Lituanie, c’est ma patrie, mais…»
Dans la foulée, les juges se sont saisis d’une autre affaire de cambriolages. Le prévenu Jurij (47 ans) a un casier long comme le bras. Il renseigne une douzaine de condamnations en Lituanie et au Luxembourg. Et ce n’est pas fini. Car hier il devait répondre de toute une série de vols : une caisse à outils, 19 bouteilles d’alcool, des lunettes, une petite caméra, une BMW S1… et une boîte à mouchoirs. Le polytoxicomane avait sévi entre l’été et fin 2018 à Luxembourg-Cents. Il est en aveu, mais ses souvenirs sont très diffus. Ce qu’il sait toutefois, c’est qu’un retour dans son pays d’origine ne l’attire pas. «Je suis conscient que c’est ma patrie. Mais je n’aime pas la politique de ce pays.» Les peines de prison encaissées y seraient-elles pour quelque chose? Après avoir égrené son impressionnant casier, le parquetier a finalement requis 24 mois de prison et une amende contre le quadragénaire. La victime qui s’est fait voler sa caisse à outils souhaite récupérer la valeur du contenu, soit quelque 3 000 euros.
La 12e chambre correctionnelle rendra son jugement dans les deux affaires le 14 mai.
Fabienne Armborst