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Luxembourg : 18 mois requis contre l’élève policier


(Illustration : Fabienne Armborst)

Fin février 2015, le jeune homme avait été impliqué dans une rixe devant une discothèque. Le parquet lui reproche d’avoir porté un coup de couteau.

Comment la victime a-t-elle pu décrire le couteau si ce dernier n’a pas été sorti lors de la rixe? Voilà le principal argument avancé vendredi matin par la représentante du parquet dans le procès où un élève policier comparaît pour avoir blessé un homme avec un couteau. La défense de l’élève policier, quant à elle, soulève qu’à l’hôpital le médecin n’a pas défini l’origine de la blessure. Elle plaide l’acquittement.

C’est impossible de condamner mon client. Car il n’a pas été prouvé qu’il a sorti le couteau pendant la rixe, qu’il l’a utilisé et que la blessure provient d’un coup de couteau. » Pour M e Pol Urbany, les seuls qui prétendent dans cette affaire que l’élève policier s’est défendu avec un couteau, ce sont les coprévenus.

Les faits reprochés remontent au 22 février 2015. Il est peu avant 6 h quand la police reçoit un appel d’un homme qui déclare avoir été blessé avec un couteau à la sortie d’une discothèque au Limpertsberg. Un couteau qui ne sera toutefois jamais retrouvé par les agents.

La description d’un témoin permet d’identifier le présumé agresseur. Il s’avère qu’il s’agit d’un élève policier. Ce dernier reconnaît avoir eu un couteau pliable sur lui, conteste toutefois l’avoir employé. Au total, quatre hommes se trouvent aujourd’hui sur le banc des prévenus : l’élève policier, son frère ainsi que deux autres hommes. Tous étaient mêlés à cette bagarre.

Au cours de sa plaidoirie, vendredi, M e Pol Urbany a critiqué l’enquête. Le médecin qui a examiné la victime saignant à la tempe n’a en effet pas défini l’origine de la blessure : elle pourrait être due à un coup de couteau, mais pas forcément. Il remarque, par ailleurs, que dans le cadre de la recherche du couteau seul son client a fait l’objet d’une fouille corporelle. Bref, pour l’avocat à la défense de l’élève policier, qui à la suite de cet incident n’a pas été assermenté comme policier par le ministre, il n’a pas été prouvé, à l’abri de tout doute, qu’il a porté des coups et blessures volontaires. Il a plaidé l’acquittement. Comme l’ont aussi fait les avocats des trois autres prévenus.

« Comment mon client a-t-il pu décrire le couteau? Il faut en conclure qu’il a été sorti au moment de la rixe », argue M e Mathieu Gibello. Il soulève que c’est son client blessé à la tempe qui a appelé la police : « S’il avait quoi que ce soit à se reprocher, il ne l’aurait pas fait. »

La défense plaide la légitime défense

Mais d’après Me Philippe Penning, à la défense du frère de l’élève policier, le couteau a dû tomber par terre au moment de la rixe. Il estime que c’est à cet instant que « les coprévenus ont vu le couteau. Et aujourd’hui c’est l’excuse de la grave attaque qu’ils ont faite. » Son client, quant à lui, aurait juste riposté par un coup de poing après les coups de boule encaissés. De la même manière, M e Sébastien Lanoue avait demandé de retenir la légitime défense pour le coup porté par son client.

Alors que les avocats ont tous plaidé l’acquittement, pour le parquet il y a lieu de condamner les quatre prévenus pour coups et blessures volontaires. « Il est impossible de reconstituer toute la bagarre. Mais c’est un fait qu’il est allé en boîte de nuit et qu’il est tombé sur sa petite amie accompagnée d’une copine. Ils ne s’étaient pas donné rendez-vous. À mon avis, cette situation a provoqué une certaine méfiance quand à la sortie il les a ensuite vues parler avec les deux hommes », considère le substitut principal Dominique Peters. Même si elle rejoint M e Urbany sur le point que l’enquête n’a pas été faite correctement, elle retient toutefois que la victime blessée à la tempe a dit que la lame du couteau de son agresseur était noire. « Pour affirmer cela, elle a dû voir le couteau », conclut-elle. Elle appuie son argument avec la déclaration d’un témoin par rapport au couteau que portait l’élève policier. «He uses it for self-defense». Voilà les mots notés à l’époque par la police. « Un volontaire de police n’a pas à s’équiper de telle sorte quand il sort en discothèque », considère le substitut principal.

Le parquet a fini par requérir 18 mois de prison et une amende à l’encontre de l’élève policier et 12 mois et une amende contre la victime. Des dépositions, il ressort qu’elle a aussi été l’auteur de coups de boule durant la rixe. Enfin, contre les deux derniers protagonistes de cette rixe, le parquet requiert une simple amende.

Prononcé le 31 mai.

Fabienne Armborst