Les deux prévenus ont été arrêtés à Differdange en possession de disqueuses et de sacs débordant d’objets. Pourtant, rien ne prouve qu’ils les aient volés. Ils assurent les avoir trouvés.
La rue, la précarité, la drogue, la prison, Jorge et Christopher en ont assez. À 49 et 39 ans, ils rêvent d’une autre vie, clament les deux prévenus. En attendant, ils doivent faire avec et répondre de leurs actes. La justice les soupçonne de plusieurs vols et tentatives entre les mois de mai et de juin derniers à Differdange notamment. Les prévenus s’en défendent.
Le 2 juin dernier, un habitant de la rue Marie-Rausch-Weynand à Differdange a prévenu la police : deux individus testaient les poignées de portière de voitures et de portes de résidences du quartier. L’homme a pris des photographies qu’il a transmises aux forces de l’ordre. «Nous avons retrouvé les deux prévenus sur le quai de la gare. Ils vivaient dans la rue et étaient dans un sale état», a constaté un officier de police judiciaire. «Nous nous sommes étonnés de les trouver en possession de deux vélos neufs et de sacs de sport pleins à craquer.» Plus étonnant encore, Jorge et Christopher étaient équipés de disqueuses.
Les deux hommes prétendent que les objets contenus dans les sacs – deux overboards et plusieurs téléphones portables, entre autres – appartenaient à Christopher. «J’ai des affaires entreposées chez ma maman. À l’époque, je dormais chez elle. Je possédais ces petits téléphones depuis des années. Je les avais trouvés, on me les avait donnés, de tout…», a indiqué ce dernier. Jorge a immédiatement reconnu qu’ils avaient volé les vélos le matin même dans le garage d’une résidence. «Il nous y a conduit. Nous avons trouvé un disque sur place. Ils avaient découpé les cadenas avec la disqueuse», poursuit le policier.
«Je cherchais un endroit où dormir. Je vivais dans la rue depuis deux ou trois mois», a indiqué Jorge à la barre. Les objets dans son sac? Il les avait trouvés dans la rue. «Les poignées des voitures, ce n’était pas moi.» Ni Christopher qui n’a cependant pas hésité à balancer que son acolyte «a essayé les portières pour trouver un endroit où dormir, pas pour voler».
Tous deux reconnaissent toutefois un vol de bouteilles d’alcool dans un supermarché Cactus pour Jorge et un vol de smartphone dans un magasin d’électroménager.
Cure de désintoxication
«Ils rôdaient dans le quartier avec des outils pour cambrioler et ils ont commis un vol de vélos. Leur dessein était de trouver des objets à voler», a conclu le représentant du parquet qui a demandé à la 16e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg de les condamner pour vol. Quant aux objets trouvés dans les sacs, le magistrat a «du mal à croire qu’ils leur appartenaient. Ce n’étaient pas des objets de première nécessité, mais des objets utilisés pour cambrioler ou à échanger contre de la drogue».
Le parquetier ne peut cependant pas prouver avec certitude que ces objets provenaient de vols. Il peut tout au plus demander à la chambre correctionnelle de retenir le recel ou le cel, le fait de s’approprier des objets que l’on sait volés ou qu’on a trouvé. Il a requis un an de prison contre les deux prévenus. Avec un sursis partiel pour Jorge dont le casier ne fait état que d’un unique antécédent judiciaire, contrairement à celui de Christopher.
Des réquisitions «un peu trop hautes» pour les avocats des prévenus. «Certaines choses ne peuvent être prouvées à l’encontre de Christophe», comme le fait qu’il ait tenté d’ouvrir des poignées de porte, selon Me Knaff. «Les infractions ne sont pas suffisamment étayées, même si on peut se demander pourquoi ils se promenaient avec des disqueuses dans leurs sacs.» En ce qui concerne les vélos, il ne peut nier l’évidence.
Me Soares s’est ralliée aux développements de son confrère. Elle a ajouté que les objets retrouvés sur Jorge, s’ils avaient été volés, «n’ont été réclamés par personne». Elle a plaidé en faveur d’un acquittement de son client qui se trouvait sous influence de stupéfiants au moment des faits. Si le tribunal venait à le condamner, l’avocate a demandé du travail d’intérêt général ou un sursis en sa faveur.
Invité à prendre la parole en dernier, Christopher a expliqué qu’il avait postulé pour intégrer un programme de désintoxication au Portugal dans deux mois. À bientôt 40 ans, il jure vouloir s’en sortir.
Le prononcé est fixé au 19 décembre.