Les premiers faits se seraient déroulés à Esch-sur-Alzette. La belle-fille a notamment parlé d’un viol qui aurait eu lieu en 2013. Condamné à huit ans de réclusion, dont six avec sursis probatoire, le quinquagénaire est venu mardi à la barre de la Cour d’appel de Luxembourg pour clamer son innocence.
«Je n’ai jamais abusé sexuellement de ma belle-fille. Je l’ai élevée comme un père.» Le quinquagénaire campe sur sa position. Son refrain devant la Cour d’appel, mardi après-midi, rejoint celui entendu lors de son procès en première instance. Le prévenu conteste énergiquement le viol, les attouchements… Toutes ces accusations seraient une pure invention de sa belle-fille, affirme le retraité de 59 ans qui se trouve actuellement sous contrôle judiciaire.
Son avocat propose qu’il se soumette à un détecteur de mensonges pour obtenir plus de clarté dans cette affaire. «La fille a manifestement dit des choses qui ne sont pas vraies. Elle voulait éliminer l’homme qui était trop sévère avec elle», argue Me Roland Michel. Mais pour le parquet général, hors de question de faire suite à cette demande. Car un tel test du polygraphe n’aurait aucune fiabilité et aucune valeur probante : «D’une personne à l’autre, les réactions changent en cas de mensonge, remarque sa représentante. Les premiers juges ont rejeté à juste titre cette demande.»
«On n’est ni au Moyen Âge ni en Chine!»
Et d’insister : «Au Moyen Âge, pour savoir si quelqu’un mentait ou non, on lui mettait de la farine dans la bouche. Si sa bouche devenait sèche, on jugeait qu’il y avait mensonge. Et on le condamnait. En Chine, la farine a été remplacée par du riz… Mais on n’est ni au Moyen Âge ni en Chine!»
Le parquet général est convaincu que ce que dit la belle-fille, âgée aujourd’hui de 21 ans, correspond à la vérité : «Elle n’avait aucun intérêt à inventer quelque chose pour nuire à son beau-père.» L’affaire avait éclaté au printemps 2014. À l’époque, à la suite de violences domestiques, une mesure d’expulsion avait été ordonnée contre le quinquagénaire. Suivie par le service d’assistance psychologique aux victimes de violence domestique, la jeune fille avait confié avoir été régulièrement abusée par son beau-père. Les premiers faits reprochés au prévenu remontent à fin 2006. À l’époque, elle était âgée de 9 ans.
Née au Brésil, elle venait tout juste de rejoindre sa mère au Luxembourg. Ils vivaient dans leur petit appartement à Esch-sur-Alzette. Plusieurs fois, son beau-père se serait introduit dans son lit en pleine nuit pour lui caresser les parties intimes. Ces abus sexuels auraient eu lieu régulièrement «quand il en avait envie», et se seraient poursuivis après leur déménagement dans une maison où elle disposait de sa propre chambre. Et à l’hiver 2013, il y aurait eu un viol sur le canapé…
«Elle n’a pas pris l’initiative elle-même pour faire la plainte pour abus sexuels», relève la représentante du ministère public. D’après l’enquête, le dernier attouchement aurait eu lieu dans la nuit du 1er juin 2014. Or les faits reprochés au prévenu ne s’arrêtent pas là. La belle-fille déclare aussi avoir été régulièrement suivie et harcelée, jusque devant son école, alors même qu’elle avait été placée dans un foyer. «Quand la jeune fille a rencontré son petit ami, le beau-père s’est comporté comme un adolescent jaloux : il devient violent, il la harcèle, il l’insulte. Il ne supportait pas que son objet ne soit plus à sa disposition exclusive.» Bref, pour le parquet général, le quinquagénaire s’est comporté comme «un amoureux éconduit».
S’il estime que les huit ans prononcés en mai dernier par les premiers juges constituent une «peine légale et adaptée», il demande une réduction de la durée du sursis probatoire à quatre ans. «La peine est trop clémente par rapport à la gravité des faits.» Pour rappel, en première instance, sa peine avait été assortie d’un sursis probatoire à hauteur de six ans. Il avait l’obligation notamment de verser 10 000 euros de dommages et intérêts à la victime. Me Michel Foetz, représentant la partie civile, a réitéré sa demande d’indemnisation hier après-midi.
La Cour d’appel rendra son arrêt le 24 avril.
Fabienne Armborst