Plusieurs hommes étaient convoqués mercredi après-midi devant le tribunal correctionnel pour violences domestiques. Dans une affaire, de la porcelaine avait volé en éclats. Mais le couple a tenu bon. Dans l’autre, le couple est aujourd’hui brisé. La plaignante a témoigné comment son mari l’avait prise par les cheveux et tirée à travers leur appartement…
«Est-ce parce que les terrasses ont rouvert aujourd’hui qu’on arrive en retard?» Il est 15 h passées, mercredi après-midi. Dans la petite salle d’audience TL. 1.04, l’escorte policière vient juste de repartir avec le détenu venu pour la lecture de son prononcé. C’est l’heure de l’appel des affaires. Mais le quinquagénaire poursuivi pour avoir frappé et menacé sa conjointe n’est pas là. Le tribunal décide d’évacuer l’affaire sans lui. Au bout de quelques minutes, il finit par pointer le bout de son nez par la porte. Ou plutôt son masque.
«Vous n’avez pas trouvé la salle?», l’interroge le président. Pas de réaction. «Il parle juste italien et anglais», intervient le policier. Un interprète prend le relais. Ce ne sera pas très compliqué. Car Francesco (56 ans) veut garder le silence.
Son épouse (55 ans), pour sa part, est plus bavarde. C’est elle qui s’est rendue au commissariat de police le 26 mars 2019. «Il m’a prise par les cheveux et tirée à travers le couloir dans la cuisine. Il a commencé par me cogner la tête contre les plaques chauffantes», témoigne la plaignante. Elle porte toujours de longs cheveux noirs. Mais elle en a perdu un paquet ce jour-là. Les policiers avaient découvert ses touffes de cheveux dans l’appartement à Niederkorn. À ces coups et blessures s’ajoutent des menaces de mort. «Quand il a consommé de l’alcool, il devient toujours agressif.» Il avait été expulsé, mais elle lui avait donné une seconde chance. Ce qui n’a rien donné. De sorte qu’elle réclame aujourd’hui 9 000 euros de dommages et intérêts. Son avocate versera aussi un certificat attestant la fracture du 5e doigt de la main gauche. Des faits plus tardifs dont le parquet n’avait pas connaissance.
Hématomes, céphalées et traumatisme crânien
«Le doigt, ce n’est pas moi», finira par se défendre le prévenu à la barre. Pour le reste, sa position n’est pas très claire. N’empêche que pour le parquet, les déclarations de la plaignante sont «crédibles». Un certificat médical du CHEM fait état d’hématomes en voie de formation, de céphalées, d’un traumatisme crânien… et d’une incapacité de travail de deux jours.
«Elle a dit que ce n’était pas la première fois. Même si le tribunal n’est pas saisi de tous ces faits, cela donne une image du comportement de Monsieur», considérera la parquetière avant de requérir douze mois de prison et une amende. Les époux ne sont pas encore divorcés, mais leur relation semble être finie pour de bon. «Je ne cherche pas à la voir», précisera le prévenu avant de quitter la salle.
Dans l’autre affaire de violence domestique dont s’est saisi le tribunal dans la foulée, de la porcelaine avait volé en éclats. Mais le couple a tenu bon. Du moins, c’est l’impression qu’il donnait hier après-midi assis côte à côte au fond de la salle. «Vous vous êtes réconciliés?», a d’emblée demandé le tribunal au prévenu Renato (52 ans). «On est toujours ensemble. Là, elle vient juste d’aller aux toilettes…»
C’est le 8 décembre 2019, vers 17 h 30, que la police avait reçu l’appel de la conjointe (39 ans). À l’arrivée des agents dans l’appartement situé à Mondorf-les-Bains, elle s’était réfugiée chez un voisin. «Madame saignait du nez et était pleine de sang au visage. Elle tremblait de tous les côtés», se souvient le policier. Difficile de reconstituer le déroulement exact de cette scène de ménage. En tout cas, le service de porcelaine se trouvait en mille morceaux sous le canapé. La police avait aussi découvert quelques gouttes de sang au sol. Enfin, la plaignante avait raconté qu’il avait menacé de briser une tasse de café sur sa tête. Et elle avait parlé de coups de poing, d’insultes.
La garniture de l’appart au lieu de sa conjointe
Mais à l’entendre, tout cela, c’est de l’histoire ancienne aujourd’hui. «Après que je l’ai dénoncé à la police, il a changé. Il boit moins d’alcool.» Des hauts et des bas, il y en aurait toujours. Mais il ne s’en prendrait plus à elle. Il casserait juste des choses. «C’est donc la garniture de l’appartement qui prend…», remarquera le président.
Renato, pour sa part, ne se souvient plus de rien. Le tribunal est sceptique : «Ici, on a toujours affaire à des gens à la mémoire courte. Vous n’êtes pas un Alzheimer précoce non plus…» Et d’insister : «Quand ça arrive une fois et que la police débarque, on s’en rappelle.»
Pour le parquet, il faut retenir la circonstance aggravante que le prévenu cohabitait avec la victime. Il requerra six mois de prison et une amende. Mais vu son absence de casier, il ne s’oppose pas au sursis.
La 7e chambre correctionnelle rendra son jugement dans les deux affaires le 18 juin.
Fabienne Armborst