Deux prévenus qui avaient été jugés par défaut ont eu une nouvelle chance de plaider leur cause face au tribunal, vendredi. Dans une troisième affaire, c’est le témoin-clé qui manquait. L’affaire a été remise à plus tard.
«Je ne suis pas un voleur!», jure Dakhli. S’il s’est introduit dans une maison à Luxembourg, ce n’était pas pour la cambrioler, mais pour passer une nuit au chaud. Les juges de la 19e chambre correctionnelle semblent avoir du mal à le croire. Notamment en raison d’une condamnation pour vol datant du mois de février de cette année figurant à son casier judiciaire et aussi parce que la police technique n’a retrouvé que ses empreintes sur la fenêtre brisée par laquelle il s’est introduit dans la maison.
Dakhli est éboueur. À l’époque des faits, il était séparé de son épouse. «Je suis un Tunisien marié à une Luxembourgeoise. Je n’avais pas de famille ni de travail», raconte celui qui se défend seul, faute de moyens financiers suffisants pour se faire assister d’un avocat. Des personnes rencontrées au foyer Ulysse lui auraient indiqué l’adresse du squat. Des gens s’y seraient rendus régulièrement et deux personnes s’y seraient trouvées le soir où il a été arrêté, prétend le prévenu. Pourtant la police n’a pris personne d’autre.
Dakhli était en possession d’un tournevis quand il a été arrêté. Il dit l’avoir utilisé pour fixer une planche en bois devant la fenêtre cassée pour la calfeutrer et empêcher le froid d’entrer dans la maison. Le père de trois enfants jure être de bonne foi. Il aurait repris sa vie en main depuis et retrouvé son épouse. Condamné par défaut le 13 novembre 2020 à 9 mois de prison et à 700 euros d’amende pour cette affaire, il dit vouloir «être écouté» et rejugé.
Le procureur indique vouloir bien croire certaines choses, mais avoir plus de mal pour d’autres. Il juge la peine à laquelle le prévenu a été condamné par défaut appropriée et ne s’oppose pas à un sursis étant donné les regrets prononcés par le prévenu et sa volonté de reprendre sa vie en main. Le juge lui propose de commuer la peine qui sera prononcée mercredi prochain en travaux d’intérêt général. Le prévenu ne s’y oppose pas. Il est interdit de s’introduire dans un lieu privé même pour y dormir sans avoir l’intention de commettre un vol.
Un casier judiciaire long comme le bras
Le témoin-clé – la victime présumée elle-même – d’une affaire de harcèlement obsessionnel manquant à l’appel, l’audience a été remise à plus tard et, après une suspension, la 16e chambre correctionnelle a traité la troisième affaire fixée pour l’après-midi de vendredi.
Arsène veut se séparer de sa voiture. Il demande au concessionnaire qui la lui a vendue quelques années auparavant de se charger de la vente. Le concessionnaire, qui est un ami, met une annonce dans un journal. Steve répond à l’annonce. Il dit chercher une voiture pour un ami. Rendez-vous est pris à Bastogne où résident le vendeur et le concessionnaire. La voiture convient à Steve. Il veut la payer par virement et venir la réceptionner le lundi suivant. Mais le samedi matin, Steve débarque sans s’annoncer au domicile du concessionnaire, témoigne ce dernier à la barre. Il lui faut la voiture immédiatement. Il remet une preuve de paiement au concessionnaire, qui ne se méfie pas et donne les clés et le véhicule à son nouveau propriétaire. Sauf que, quelques jours après la vente, l’argent n’apparaît toujours pas sur le compte du vendeur. Il réalise qu’il s’est fait arnaquer. Presque au même moment, le nouveau propriétaire le contacte : la voiture est tombée en panne.
Steve ne conteste pas les faits. Il dit avoir agi sans réfléchir alors qu’il avait rapidement besoin d’argent. Steve, grand gaillard tatoué de 42 ans, s’est rendu à la banque où il a fait un virement d’un euro au vendeur et a demandé un reçu. Reçu qu’il a ensuite trafiqué pour faire croire au concessionnaire qu’il avait bien effectué le paiement. L’arnaque aurait pu fonctionner s’il n’avait pas fait le virement en son nom.
Vendredi, Steve comparaissait donc pour abus de confiance, escroquerie ainsi que faux et usage de faux à la barre de la 16e chambre correctionnelle après avoir fait opposition à un premier jugement qui le condamnait par défaut à 24 mois de prison et à 1 500 euros d’amende. Son avocat, Me Schons, a plaidé la clémence du tribunal à l’égard de son client au casier judiciaire long comme le bras. «Il faudrait peut-être un jour penser à arrêter les conneries», lui conseille le juge. Depuis 2003, il enchaînerait les condamnations pour coups et blessures, entre autres, et aurait deux séjours en prison à son actif, de sorte que les moyens habituels pour alléger une éventuelle peine de prison sont tous épuisés. Si ce n’est les travaux d’intérêt général. Steve essayerait de reprendre sa vie en main en créant sa propre société de services.
Pour le procureur, la peine prononcée serait appropriée et clémente, d’autant que la prévention de faux en écritures est punie d’une peine de 5 à 10 ans de prison. Il a du mal, étant donné le casier judiciaire «de trois pages» du prévenu, à imaginer comment aménager sa peine ou la commuer en travaux d’intérêt général et requiert une peine de 15 mois de prison ferme. Steve sera fixé sur son sort mercredi prochain.
Sophie Kieffer