La police indienne a arrêté mardi onze personnes pour la mort d’un musulman torturé et forcé de crier des slogans hindous, nouvelle attaque contre les minorités dans le géant d’Asie du Sud.
Les autorités ont également suspendu deux policiers pour leur gestion du lynchage de Tabrez Ansari, filmé dans une vidéo très partagée sur les réseaux sociaux en Inde. Les images, tournées la semaine dernière dans l’État pauvre du Jharkhand (est du pays), montrent le jeune homme de 24 ans pleurant et implorant ses agresseurs tandis que le groupe l’oblige à proclamer « Vive le dieu Ram ! », un slogan couramment utilisé par les radicaux hindous.
Ansari était accusé par les villageois d’avoir perpétré un cambriolage. Il a été attaché à un poteau et battu pendant douze heures, avant que la police ne l’incarcère, puis ne l’emmène à l’hôpital où il a succombé samedi à ses blessures. « Nous avons arrêté onze personnes. Deux policiers ont également été suspendus car ils n’ont pas informé leurs supérieurs de l’affaire et ont essayé de la gérer à leur niveau », a déclaré à l’AFP Karthik S., chef de la police du district de Seraikela.
D’après la presse locale, la femme de la victime accuse les forces de l’ordre d’avoir délibérément emmené son mari d’abord en prison, au lieu d’aller le faire soigner à l’hôpital, malgré la gravité de ses blessures.
Rejet des conclusions d’un rapport américain
L’Inde a rejeté la semaine dernière les conclusions d’un rapport officiel américain sur la liberté religieuse dans le monde. Selon ce document, le gouvernement du nationaliste hindou Narendra Modi laisse faire les attaques contre les minorités (musulmans, chrétiens, dalits…), de plus en plus fréquentes ces dernières années dans le pays de 1,3 milliard d’habitants.
Le ministre des affaires des minorités, Mukhtar Abbas Naqvi, a condamné ce nouveau lynchage et assuré que le gouvernement ne permettrait pas à « des forces destructrices » d’entraver sa volonté de développement économique. « Les personnes impliquées dans de tels incidents n’ont qu’une seule motivation: gâcher l’atmosphère positive créée par le gouvernement », a estimé le ministre.
Le parti du Congrès (opposition) a accusé la formation au pouvoir, le Bharatiya Janata Party (BJP), d’échouer dans son devoir de protection des minorités dans cette nation à 80% hindoue. « Le gouvernement BJP peut-il honnêtement réfuter le rapport américain sur la sécurité des minorités lorsque des musulmans et des dalits sont régulièrement lynchés en plein jour? », a déclaré Shama Mohamed, un porte-parole du Congrès.
LQ/AFP