Jaloux, Joe aurait harcelé et menacé de mort son ancienne compagne en représailles de relations extraconjugales présumées. Il reconnaît les faits et estime être dans son bon droit.
Cheveux mi-longs blonds décolorés, moustache grisonnante, chemise à carreaux noirs et blancs et lunettes de soleil de modèle pilote aux verres miroirs : le prévenu a des allures de rocker. Joe est soupçonné d’avoir harcelé et menacé de mort à plusieurs reprises son ancienne compagne, Carole. Leur relation de couple a dégénéré après près d’un quart de siècle d’amour «fusionnel» et, aujourd’hui, Joe est sous contrôle judiciaire avec interdiction d’approcher Carole et son fils.
Joe, dur au cœur tendre, n’aurait, semble-t-il, pas supporté les velléités d’indépendance de sa compagne qui, a-t-il affirmé à la barre de la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg jeudi, «vivait dans le luxe chez moi, elle avait de l’argent à en crever». Selon le retraité, elle essayerait encore de lui prendre de l’argent en portant plainte contre lui. Il n’aurait fait de mal à personne, soutient-il. Il aurait même endossé le rôle du père pour le fils de Carole.
Sur fond de déception amoureuse, de dépression et de consommation d’alcool, le sexagénaire aurait perdu les pédales. Carole aurait fait de lui un fou d’amour dans le mauvais sens du terme. Complètement gaga d’elle, le sexagénaire, qui assure aujourd’hui ne plus vouloir tomber amoureux de personne, aurait téléphoné et envoyé des messages sans discontinuer à Carole, qui n’aurait pas été en reste en matière de réponses, précise l’avocat du prévenu, qui livre son sentiment : «Ils ne pouvaient pas vivre ensemble, mais ils ne parvenaient pas à vivre l’un sans l’autre non plus.»
Pourtant, la jeune femme aurait eu au moins une relation extraconjugale avec son patron de l’époque, comme ce dernier est venu le confirmer à la barre. Joe aurait envoyé un message à l’ancien associé de cet homme pour le prévenir de la relation. «Mon ancien associé savait que Carole et moi avions une relation. Nous partagions tous les trois le même bureau. C’était difficile de le cacher», a-t-il indiqué jeudi à la barre. La relation n’aurait duré que quelques mois avant que Carole ne cesse de travailler pour lui. En outre, Joe aurait surpris un autre amant présumé de sa compagne au volant de sa voiture et l’aurait suivi.
«Elle a joué avec les sentiments de Joe comme avec un élastique en lui laissant croire qu’ils étaient encore un couple et en assurant que ce n’était plus le cas à l’extérieur», ajoute l’avocat, qui estime que si son client doit être condamné, ce devrait être à une peine de prison assortie d’un sursis intégral ainsi qu’à payer l’euro symbolique aux parties civiles constituées par Carole et son fils, au lieu des 30 000 euros demandés. Son client se serait trouvé dans une mauvaise période à l’époque des faits et aurait depuis effectué une thérapie. Il vivrait sa vie tant bien que mal malgré un contrôle judiciaire qui restreindrait ses mouvements.
«Elle veut son calme»
L’avocat de Carole n’est pas du tout du même avis. Joe continuerait à observer ou espionner son ancienne compagne. Son mari aurait fait des photographies de Joe dans les environs de leur domicile. Il se rendrait régulièrement au café situé juste en face et pourrait ainsi observer toutes ses allées et venues. «Elle veut son calme, qu’il arrête de la suivre, de la chercher», indique l’homme de loi.
Selon la représentante du ministère public, Joe s’est considérablement calmé. Il est, selon elle, dans une période de latence, mais n’a pas arrêté de suivre Carole pour autant en fréquentant le café en face de son domicile. La majeure partie des faits se serait concentrée dans une période de deux ans à partir de 2015. Selon la magistrate, «le harcèlement est clair». Carole s’est plainte plus d’une fois à la police de se trouver sous «surveillance constante». Outre les nombreux appels téléphoniques pour savoir où elle se trouvait, Joe aurait suivi Carole. Ces «nombreux faits de harcèlement» seraient corroborés par des tiers.
S’il ne parvenait pas à la joindre par téléphone, il aurait contacté son fils ou aurait passé des nuits à parler à son répondeur. Voyant qu’elle ne répondait pas, il l’aurait menacé de mort à deux reprises. La jeune femme aurait également été menacée de mort après être allée dénoncer Joe à la police. «Il faut que cela s’arrête des deux côtés», a estimé la représentante du ministère public en faisant allusion aux photographies de Joe réalisées par le nouveau mari de Carole, avant de requérir une peine de 12 mois de prison ferme contre le sexagénaire sans pour autant s’opposer à du sursis.
Elle n’a pas retenu la prévention de diffamation pour le message envoyé à l’associé de l’amant de Carole, puisque le couple illégitime ne cachait pas sa relation.
Le prononcé est fixé au 28 octobre.
Sophie Kieffer