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Differdange : le dealer extorqué «n’était pas un ange…»


Les prévenus ont écopé en première instance de 7 à 18 ans ferme pour avoir attaqué - au couteau ou au pistolet - et extorqué à plusieurs reprises le dealer. (illustration AFP)

Pour avoir extorqué un dealer de Differdange et séquestré son ami, six hommes avaient pris jusqu’à 18 ans ferme. Lundi s’est ouvert leur procès en appel.

« Je trouve que j’ai pris une peine très sévère. » Le refrain des cinq prévenus devant la Cour d’appel ne variait guère lundi après-midi. À l’exception de José M., qui, lui, clame son innocence, tous ont interjeté appel à cause de la lourde peine dont ils ont écopé début novembre 2018. Entre 7 et 18 ans ferme avaient-ils écopé pour avoir attaqué et extorqué à plusieurs reprises un dealer à Differdange, puis avoir séquestré son ami. C’était une proie facile… jusqu’au jour où il a tout déballé à la police.

«Il n’était pas question d’attaquer quelqu’un. Le but était de lui piquer son herbe», a tenté de se défendre David D. contestant avoir exercé la moindre violence. «Laissez-moi une chance et ne m’envoyez pas en prison !», a poursuivi le trentenaire dont la peine de huit ans a été assortie d’un sursis de quatre ans.

À part «Goma» qui purge actuellement une peine à Arlon pour des faits de rébellion et José M. incarcéré à Schrassig pour une autre cause, aucun des prévenus, âgés entre 28 et 34 ans, ne se trouve en prison.

«Le dealer n’était pas un ange… Même si nous aussi on a fait des bêtises, la peine reste trop sévère», a estimé Sandro S., l’un des trois hommes qui a pris 18 ans ferme. Et d’avancer : «Mais aujourd’hui on a changé !» Il n’est pas le seul à affirmer mener entretemps une autre vie.

Le dealer, quant à lui, n’a rien oublié. Les premiers faits pour lesquels les prévenus ont été condamnés remontent au 29 décembre 2014 au soir. En l’espace d’un mois, il avait été trois fois visité à son domicile à Differdange. Armés d’un pistolet ou d’un couteau, les agresseurs lui auraient notamment soustrait 2 kg de marijuana, 30 000 euros en liquide et des sacs Gucci et Louis Vuitton…

Identifié grâce à ses clips et chansons

«J’avais peur, confirmera-t-il à plusieurs reprises lors de son récit, à la barre de la Cour d’appel. Chez toi, c’est normalement l’endroit où tu te sens le plus en sécurité…» D’après lui, tous les prévenus auraient participé. «Kevin D. n’était pas là pour fumer juste un joint avec moi», a-t-il tenu à souligner.

La dernière fois, ils s’en étaient même pris à son ami de 24 ans qui promenait son chien. C’était le 25 janvier 2015. Après ce fait, il avait décidé d’appeler la police : «J’ai eu peur de ne plus jamais le revoir ainsi que mon chien.» Son ami avait été embarqué dans une VW Golf, frappé, blessé de deux coups de couteau dans la jambe, puis sur la banquette arrière, avec le couteau sous la gorge, forcé de l’appeler pour lui annoncer leur arrivée. Visiblement, ils avaient kidnappé l’ami pour faire plier le dealer à leurs exigences.

«Ils voulaient avoir son argent, mais ils ne voulaient pas me croire qu’il n’y avait plus rien», a témoigné l’ami lundi. «Arrête de mentir !», lui aurait lancé «Goma», l’un des quatre agresseurs qu’il avait pu reconnaître. José M., quant à lui, aurait été au volant de la voiture. «Je n’ai pas eu de mal à le reconnaître, car je le connaissais bien par ses clips et chansons. Il pouvait difficilement conduire avec un masque, sinon la police l’aurait arrêté…» Le troisième homme identifié était Luis D., celui qui ne s’est jamais présenté à son procès. Et qui n’est donc pas en appel aujourd’hui.

En première instance, le dealer s’était vu allouer 5 000 euros de dommages et intérêts, son ami 8 000 euros et un autre jeune homme présent lors d’une attaque dans l’appartement 2 000 euros.

La Cour d’appel a décidé qu’elle n’entendra pas d’autres témoins. Si, en début d’audience, Me Frank Rollinger avait demandé l’audition de deux témoins afin de reposer «des questions qui n’ont pas été retenues dans le plumitif ni dans le jugement», la Cour d’appel a décidé de joindre l’incident au fond. Mercredi, la parole sera donc aux prévenus.

Fabienne Armborst