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Deux dealers arrêtés à Pétange en aveux : «Pas le choix, pas de papiers»


Lors de leur arrestation, les deux prévenus étaient en possession de faux papiers. Aujourd'hui, ils se trouvent en détention préventive à Schrassig. (Photo : archives lq/Isabella Finzi)

Arrêtés mi-juillet 2019 à Pétange pour avoir mené un important trafic de stupéfiants, deux jeunes hommes étaient convoqués jeudi après-midi à la barre. L’aîné n’a pas mâché ses mots face aux juges.

«On a deux pauvres types qui vendaient des stupéfiants et avaient pris une chambre à deux parce que cela revenait moins cher. Voilà c’est tout. L’un était peut-être plus hardi que l’autre.» C’est le discours de la défense dans cette affaire de trafic de stupéfiants sur laquelle planchait, jeudi après-midi, la 18e chambre correctionnelle.

Depuis le 15 juillet 2019, les deux jeunes prévenus dorment à Schrassig. Fini l’hébergement au-dessus d’un café et les déplacements avec les faux papiers. Ali K., la vingtaine, dormait à poings fermés quand la police a débarqué en fin d’après-midi dans sa chambre à Pétange. Quelques heures avant, elle l’avait observé en train d’y monter par une échelle. Mais visiblement, c’est juste parce qu’il avait oublié sa clé… Salah A., pour sa part, était en route avec sa copine à bord de sa Hyundai quand les forces de l’ordre l’ont interpellé vers midi au rond-point à Pétange près de la frontière belge.

Plusieurs semaines d’observations et d’écoutes téléphoniques avaient été nécessaires pour cueillir le jeune duo. Tout avait débuté par une dénonciation. L’informatrice avait filé trois numéros de téléphone à la police. Mais vite, l’enquête lancée au mois d’avril 2019 s’était concentrée sur les deux hommes. Elle avait permis de constater que le duo effectuait un vrai travail d’équipe. L’un avait le contact avec un numéro néerlandais qui s’avérera être le fournisseur. La livraison de la marchandise se faisait via un autre contact en Belgique. Et une fois importée au Grand-Duché, le duo l’écoulait. Pour toucher une vaste clientèle, il vendait de l’héroïne, de la cocaïne et de la marijuana. D’où le constat de l’enquêteur : «Il avait mis en place quelque chose d’assez rodé. C’était bien structuré.» Les écoutes et observations avaient d’ailleurs permis aux enquêteurs de retracer 207 remises.

Les quantités saisies le jour de l’arrestation n’étaient pas des moindres non plus : pas moins de 646 g d’héroïne et 204 g de cocaïne, plus de 3 600 euros d’argent liquide, des balances, un bloc-notes… sans doute utile à leur comptabilité. Mais l’enquêteur avait fait ses propres calculs pour l’audience jeudi. Sur base des écoutes, il arrive à une commande d’au moins 1,3 kg d’héroïne et 475 g de cocaïne entre début juin et le 15 juillet 2019. Pour l’ensemble de la période d’enquête, cela fait un total de 3,6 kg d’héroïne et 1,2 kg de cocaïne.

Le parquet requiert 42 mois et 5 ans de prison

Des quantités que Salah A. avait approuvées face à la police. En aveux, le prévenu s’est avancé à la barre : «Je sais que c’est pas bien. Je regrette.» Son explication pour son comportement : «Pas le choix, pas de papiers.» L’homme d’origine tunisienne et qui jongle avec les alias raconte avoir reçu le contact aux Pays-Bas, par quelqu’un dans un café à Rodange. C’est également là qu’il aurait fait connaissance du coprévenu. Bref, tous deux sans travail se seraient entraidés. «Il faut que je l’aide, il dort trop…» Quant à l’origine de ses faux papiers italien et belge saisis sur lui, il divague. «Vous savez, des fois je me rappelle même plus ce que j’ai mangé hier», indiquera-t-il aux juges.

Ali K. sera encore plus bref. «Je n’ai rien à dire. Je demande juste pardon.» L’intervention de son avocat («Parlez aux juges maintenant!») ne changera pas grand-chose. Finalement, ce dernier parlera plus longtemps.

«C’est le pauvre type qui doit essayer de s’en sortir. Il est aux abois financièrement. Il vend des stupéfiants sur instruction et sollicitation», plaidera Me Pim Knaff. Il estime que pour son client qui n’aurait été que la «mule», «pas l’organisateur», dans ce trafic, la peine de prison ferme ne devrait dépasser les dix mois de détention préventive.

Me Hellal, défendant Salah A., plaidera en faveur d’un dernier sursis probatoire. Le casier du jeune homme affiche déjà une condamnation pour trafic de drogue en Belgique. «Il n’y aura pas de prochaine fois. En tout cas, cela sera sans moi», complètera l’avocat.

«Ils sont en aveux, mais essayent de minimiser leur implication», constatera la parquetière. Son réquisitoire fera bondir les avocats…. Vu l’importance des quantités vendues et la durée du trafic – entre début 2018 et 15 juillet 2019 – elle a requis cinq ans de prison et une amende contre Salah A. Contre Ali K., dont l’implication dans le trafic n’a pas pu être prouvée avant mars 2019, 42 mois de prison et une amende ont été demandés. Rendez-vous le 11 juin pour le prononcé.

Fabienne Armborst