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Dealer tué : «Le pistolet était chargé avant qu’il ne monte dans la Mercedes»


Après la macabre découverte dans la forêt entre Leudelange et Schléiwenhaff, les agents de la police technique à la recherche d'indices avaient aussi passé les alentours au peigne fin.(Photo : Fabienne Armborst)

Le procès des homicides de Leudelange et du Fräiheetsbam en novembre 2016 a entamé mardi sa troisième semaine. Les deux prévenus, Lee K. et Alden S., contestent avoir appuyé sur la détente le soir du 9 novembre 2016. Malgré l’utilisation d’un silencieux la détonation était tout sauf inaudible, a expliqué un membre de la police technique expert en balistique.

«Au cas où le conducteur n’aurait pas été pas au courant du tir, il a dû manifestement sursauter dans le petit habitacle de la Mercedes A170!» D’après les calculs du policier expert en balistique, même si le pistolet Walther P99 était équipé d’un modérateur de son (silencieux) et chargé de munition subsonique, la déflagration de celui-ci a dû atteindre un niveau de bruit de 102 décibels. À titre de comparaison, quand on débouche une bouteille de champagne, l’intensité sonore est de 104 décibels. «Ce n’est pas comme dans les films. Ce n’est pas parce qu’on utilise un silencieux qu’on n’entend rien», a rappelé la présidente reprenant l’image utilisée par l’enquêteur la semaine passée.

Les deux prévenus, Lee K. (36 ans) et Alden S. (24 ans), se renvoient en effet la balle. Aucun ne dit avoir appuyé sur la détente la nuit du 9 au 10 novembre 2016 avant que le corps sans vie du dealer nigérian ne soit déposé dans la forêt entre Leudelange et Schléiwenhaff. Tous deux déclarent s’être trouvés au volant au moment du tir. Or aucun ne rapporte s’être effrayé ni avoir freiné à bloc. Tous deux déclarent, par ailleurs, n’avoir perçu aucun bruit dans l’habitacle avant le tir. Une chose difficilement imaginable quand on sait que le chargement d’une arme entraîne toujours certaines manipulations. Des bruits que le dealer assis sur le siège passager aurait aussi dû reconnaître…

«Est-ce possible de préparer une arme afin qu’on ait juste besoin de tirer?», voulait savoir la présidente du spécialiste en balistique.

– Oui.»

«Donc comme les deux nous décrivent qu’ils n’ont rien entendu, le pistolet devait être chargé…», en a déduit la présidente.

Pour le policier, il est aussi difficile de croire que «que le dealer était sourd et n’a rien entendu. Alors il aurait mieux fallu qu’il se casse une jambe en sautant de la voiture…» Ce qui lui fait dire que «le pistolet était déjà chargé avant que le dealer ne monte dans la Mercedes A170».

Pour les besoins de l’enquête, il avait chargé l’arme du crime avec le silencieux à plusieurs reprises, non sans difficultés. Un indice supplémentaire, selon lui, que le pistolet avait été armé à l’avance.

Pas de traces de sang sur le siège conducteur!

Le duo ne voulant pas livrer de détails sur le déroulement du crime, la police technique s’est rabattue sur les traces de sang relevées dans la Mercedes A170. Sa conclusion ne laisse entrevoir aucun doute : «Il n’est pas possible que le porteur du jean ensanglanté se soit trouvé sur le siège conducteur. Car on n’y a pas retrouvé de traces de sang.» La reconstitution, non plus, n’avait pas permis de retracer la version selon laquelle le cadavre assis sur le siège passager était tombé sur le conducteur. «Cela ne collait pas. Il a fallu que je me lève du siège pour toucher la jambe gauche du conducteur», a indiqué un policier ayant reconstitué la scène.

Bref, on en arrive au scénario selon lequel le porteur du jean ensanglanté – donc Lee K. – n’était pas le conducteur au moment du tir et que c’est donc lui qui devait se trouver sur la banquette arrière. «La tête du cadavre est tombée entre les deux sièges avant. Il saignait vers l’arrière. Cela colle aussi avec la giclée de sang sur l’appui-tête.»

Le projectile retrouvé dans la tête du dealer avait permis d’identifier l’arme du crime. C’est avec une munition de même calibre 9 mm que la prostituée, retrouvée sur le parking du Fräiheetsbam, a été tuée quatre jours plus tard. L’analyse des résidus de tir a permis d’établir que le canon se trouvait à moins de 10 cm de la tête de la jeune femme. Lors de la perquisition au domicile de Lee K., un stock de munitions de calibre 9 mm ainsi que le pistolet Walther P99 avec les traces ADN de Lee K. et des deux victimes avaient pu être saisis.

D’autres indices accablants contre Lee K. avaient été recueillis dans une poubelle à son domicile : des débris de verre de la fenêtre côté passager de la Mercedes A170, une canette de Red Bull souillée de sang, un paquet de cigarettes Lucky Strike, un parapluie. Tous des objets comportant les traces ADN de la prostituée.

«Tout le crime dans la poubelle»

«On peut donc dire que tout le crime concernant la prostituée a été jeté dans la poubelle», a résumé le procureur d’État adjoint à la fin de l’exposé de la police technique. La réponse de l’agent : «On peut le dire ainsi.»

Le procès se poursuit ce mercredi après-midi avec l’audition des derniers témoins. La 13e chambre criminelle a l’intention de commencer jeudi l’audition du prévenu Alden S. De nouveau absent pour cause de maladie, il s’est fait représenter par son avocat mardi au 9e jour du procès. «Je lui ai dit que jusqu’à jeudi, il devait se remettre sur pied», a toutefois fait savoir Me Pim Knaff en début d’audience aux juges.

Fabienne Armborst

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