Le prévenu accuse trois témoins à charge de faux témoignages et compte porter plainte. Sa vérité est la seule et unique. Il n’a pas roué son ancienne amie de coups sur la piste de danse.
«Je dis la vérité. Ils mentent.» Yannick accuse sa victime présumée et deux de ses amis de faux témoignages à la barre de la 12e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. «Que décidez-vous? Vous portez plainte pour faux témoignages ou bien devons-nous tenir compte de votre mauvaise foi lors de nos délibérations?», l’interroge le président sur un ton ferme.
Le grand jeune homme en costume-cravate ajusté opine du chef en direction de son avocate : il veut porter plainte. «Vous acceptez le risque de diffamation et de calomnie que cela comporte pour vous?», s’est enquis le juge avant de remettre l’affaire au 15 mars prochain. «Si aucune plainte n’est déposée d’ici là de votre part, nous reprendrons le procès là où nous l’avons arrêté.»
Les trois témoins ont pourtant livré la même version des faits auprès de la police ainsi que sous serment hier matin. Une version qui ne correspond absolument pas au récit des faits tel que présenté par le prévenu accusé de coups et blessures volontaires sur son ancienne petite amie.
Un récit dont le tribunal a eu la primeur hier matin puisque Yannick avait refusé de faire une déposition à la police. Il n’aurait pas apprécié le ton du policier et aurait usé de son droit au silence.
Le 7 octobre 2022, Yannick s’est rendu à une soirée sur le thème de la fête de la bière de Munich au Café des sports à Itzig, où était également présente son ancienne petite amie qui, comme il l’indique, «dansait joyeusement» avec ses amies. Elle avait rompu avec lui deux semaines plus tôt après quatre ans de relation.
Face à la chambre correctionnelle, le prévenu a livré une version enrichie de moult détails de sa soirée, à l’opposé de celle vécue par sa victime présumée et ses amis.
Attristé par la rupture, Yannick aurait préféré quitter la fête pour éviter les ennuis après une tentative de discussion infructueuse avec la jeune femme. Pressé de quitter les lieux et la mauvaise ambiance qui y régnait, selon lui, le prévenu n’aurait même pas pris le temps de récupérer son manteau et son bonnet.
Sa victime présumée l’aurait pourtant suivi à l’extérieur en lui criant dessus et en le menaçant.«Elle tenait mon bras. Je l’ai bousculée en voulant me dégager de son emprise, elle est tombée avec la tête contre la poubelle. Voilà», explique le jeune homme qui est ensuite rentré chez sa maman.
«Les trois témoins affirment que vous avez porté des coups de poing à votre ex-copine sur la piste de danse après lui avoir jeté des regards agressifs», avance le président. Sûr de son fait et avec aplomb, Yannick lui répond : «Ils mentent».
«Il lui a foncé dessus sans raison»
«J’ai avoué à Yannick que j’avais été plus heureuse ces deux dernières semaines qu’en presque quatre années de relation», reconnaît la jeune femme. «Je prenais beaucoup sur moi et je ne le supportais plus.» Contrairement à elle, Yannick semble avoir eu plus de mal à digérer leur rupture et à tourner la page.
La voir heureuse sans lui est insupportable pour le jeune homme. «Il m’a foncé dessus sans raison sur la piste de danse et m’a donné un coup de poing», a témoigné la jeune femme. «Je suis tombée dans le café et je me suis réveillée à l’extérieur. Je ne l’ai pas suivi à l’extérieur et je n’ai pas essayé de l’empêcher de partir.»
Un ami raconte la même scène. «J’ai essayé de l’empêcher de la frapper. Elle est tombée contre un des haut-parleurs avant de s’affaisser au sol. Il l’a encore frappée quatre ou cinq fois avant que je parvienne à l’emmener à l’extérieur du café.»
Juste avant, note-t-il, il aurait vu Yannick lancer des regards mauvais en direction de la jeune femme tout en marmonnant. «Yannick s’est penché sur elle et a continué à lui donner des coups à la tête. Il n’avait pas l’air d’avoir l’intention de s’arrêter», ajoute une amie. «Pour moi, il savait ce qu’il faisait.»
Dans un premier temps, la victime présumée aurait été sonnée, révèle son amie. Elle se serait ensuite relevée et se serait rendu elle-même à l’extérieur de l’établissement dans un état second. Un ami infirmier l’a prise en charge en attendant l’arrivée des secours et de la police sur les lieux.
La jeune femme a eu un œil au beurre noir, des hématomes et une déchirure des ligaments du pied. «Je subis toujours actuellement les séquelles de son geste», précise-t-elle.
Avant de leur donner la parole à chacun, le président de la chambre correctionnelle les avait prévenus : «Vous devez dire la vérité, vous témoignez sous serment.» Un rappel à l’ordre suffisant pour encourager le prévenu à se lancer sur la voie du faux témoignage.
Les trois jeunes gens vont devoir rassembler des témoignages qui corroborent leurs dires et appuient leur version des faits. Yannick a tout intérêt à les imiter pour assurer sa défense.