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Couple âgé braqué à Bereldange : «Je ne suis pas le petit gros au couteau»


Trois hommes et une femme avaient été condamnés pour le violent home-jacking au domicile d'un couple âgé à Bereldange en 2008. Seul l'un d'entre eux a interjeté appel à cause de la peine. (Photo : archives lq/Anne Lommel)

Face à la Cour d’appel l’un des auteurs du violent home-jacking à Bereldange en 2008, condamné à 10 ans de prison ferme en première instance, a tenté de tirer son épingle du jeu lundi après-midi. Il voulait une réduction de peine. Or le parquet général a requis 15 ans de réclusion…

Menaces au pistolet et au couteau, casserole d’eau froide, saucissonnage… C’est un véritable calvaire qu’avait subi le couple dans son appartement à Bereldange la veille du réveillon de Noël 2008. L’épouse, âgée à l’époque de 75 ans, en avait fait le récit lors du procès fin 2018. Les braqueurs s’étaient introduits chez eux en se présentant comme de potentiels acheteurs…

Ils étaient cinq sur le banc des prévenus en première instance. Tous originaires de Forbach (F) et ses environs. Quatre d’entre eux ont été condamnés à des peines allant de cinq à dix ans de réclusion ferme. Le dernier a été acquitté. Un seul a interjeté appel.

«J’ai pris une des plus grosses peines alors que mon rôle n’était pas si grand», s’est défendu Sendy F. (43 ans), lundi après-midi, à la barre de la Cour d’appel. «Le tribunal a retenu que vous étiez le meneur, le chef dans cette affaire», n’a pas manqué de lui rappeler la présidente. Mais lui conteste fermement avoir frappé les victimes. «Je ne suis pas le petit gros avec le couteau.» Et à part «jeter une gamelle d’eau», il n’aurait rien fait.

«La personne, qui est face à vous aujourd’hui, n’est pas la même que celle en 2008. J’ai évolué», a expliqué le quadragénaire. À l’époque, il raconte tout juste être sorti de psychiatrie. Et le commanditaire aurait abusé de sa faiblesse pour l‘entraîner dans cette affaire : «Il avait une grosse emprise sur moi. J’ai exécuté ce qu’il m’a dit.»

Toujours selon Sendy F., ce sont les deux autres hommes l’accompagnant sur les lieux du crime qui auraient joué les gros bras. Ce n’est pas tout à fait ce qui ressort de la description des victimes. «Vous aviez l’air très menaçant.» Jetant un coup d’œil dans le dossier, la présidente relèvera une des déclarations de la septuagénaire : «Le gros a sorti le couteau de la poche et menacé de tuer mon mari si je n’ouvrais pas le coffre-fort.»

«Si j’étais magicien pour revenir en arrière…»

«Je n’avais pas d’arme et je n’étais pas gros Madame, ça c’est une certitude», insistera le prévenu. Pourquoi son ADN avait été retrouvé sur une ceinture des victimes, cela reste un mystère pour lui. «Si j’étais magicien pour revenir en arrière… J’aimerais tellement!», dira-t-il encore en faisant part de ses regrets. Des regrets sur lesquels la Cour d’appel a exprimé des doutes: «“Désolé“, c’est vite dit. La pauvre femme a failli faire un arrêt de cœur. Et pour Monsieur qui est décédé entretemps, cela n’est pas passé inaperçu…»

«Il ne vous demande pas l’acquittement», a renchéri Me Philippe Stroesser dans sa plaidoirie. Mais d’après l’avocat, les circonstances atténuantes peuvent être étendues. Cinq ans de réclusion seraient ainsi une peine adaptée. « En 2008, des troubles mentaux ont affecté son discernement», a-t-il argué demandant de faire application de la disposition de l’article 71-1 du code pénal permettant de retenir une responsabilité pénale amoindrie. Une position que ne partage toutefois pas le parquet général. «Il était capable de planifier le coup, de repérer les lieux et d’exécuter le projet!»

« On pourrait placer l’affaire sous le proverbe „les absents ont toujours tort“», avait entamé sa représentante son réquisitoire. Pour le premier avocat général, il est bien établi que Sendy F. a joué « un rôle prépondérant » dans cette affaire et qu’il avait le couteau en main pour vider le coffre-fort. (NDLR : 3 500 euros de liquide et 50 000 euros de bijoux). « Chacun essaie de tirer son épingle du jeu et de déculpabiliser au profit des autres. »

«Vos antécédents judiciaires, c’est presque un livre»

À la différence des premiers juges, le parquet général estime qu’il n’y a pas eu dépassement du délai raisonnable. Pour ces «faits d’une brutalité inouïe», il demandera au final de prononcer une augmentation de peine: 15 ans de réclusion, soit le minimum légal pour la séquestration et le vol avec violences perpétrés la nuit dans une maison habitée. Après avoir été confondu par son ADN, le quadragénaire était en détention préventive à Schrassig entre novembre 2014 et avril 2017. Ce n’est pas son premier séjour en prison. «Vos antécédents judiciaires, c’est presque un livre. Ce sont 15 pages», avait constaté la présidente lors de son audition à la barre.

Le réquisitoire du parquet général n’a pas laissé Sendy F. indifférent. « J’ai 43 ans ce mois-ci. Si je vais en prison, je vais vous coûter cher au Luxembourg. Vous allez me nourrir et m’héberger. Si je retourne en prison, ma vie est finie. Le meilleur de moi-même est devant vous », a-t-il lâché. Son dernier mot face à la Cour d’appel : «Le rôle du procureur général : il est le méchant. Mon avenir est entre vos mains. »
Prononcé le 25 novembre.

Fabienne Armborst

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