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Quintuple infanticide : « c’est pas une mère »


Les infanticides commis par Sylvie Horning avaient été découverts en 2017, suite à un test ADN réalisé dans le cadre d'une rixe de voisinage. (Photo illustration AFP)

« C’est une femme mais c’est pas une mère, elle n’aurait jamais dû avoir d’enfant »: les mots, très durs, des enfants de Sylvie Horning, jugée pour un quintuple infanticide à Colmar, ont résonné mercredi devant la cour d’assises.

« C’est ma génitrice, c’est pas vraiment ma mère, je n’ai jamais compté sur elle »: dans le box des accusés, la quinquagénaire pleure en écoutant témoigner la deuxième de ses trois enfants, âgée de 29 ans et elle-même mère d’une petite fille. « C’est pas la pire des mères, on n’a jamais manqué de rien, elle nous a jamais frappés. (…) La seule chose dont on a manqué, c’est l’amour », poursuit la jeune femme, qui ne voyait plus sa mère depuis presque 5 ans quand celle-ci a été interpellée, en 2017.

« Elle a détruit ma vie »

Outre le délai de 14 ans séparant la découverte des premiers cadavres de bébés et l’interpellation de Sylvie Horning, le caractère hors normes de cette affaire tient à sa chronologie : Sylvie Horning a donné naissance à deux enfants, un garçon et une fille, puis caché trois accouchements, étouffant ou étranglant les bébés, puis eu une fille, et deux autres accouchements ont encore été dissimulés et les bébés éliminés après la naissance de sa benjamine. Voix juvénile et longue chevelure, quand celle-ci se présente devant la cour, elle raconte son statut de « chouchoute de sa mère », les « bonnes relations qui les unissaient » avant son interpellation, mais évite de la regarder, même quand Sylvie Horning cherche à attirer son attention. « Elle a détruit ma vie. (…) Je sais même pas comment je vais réussir à construire ma vie avec une mère comme ça », lance-t-elle, les épaules secouées de frissons.

Dernier à prendre la parole, le fils aîné de l’accusée se présente comme « son fils vivant ». « J’aurais aimé savoir pourquoi, pourquoi elle nous a menti pendant toutes ces années. Et aussi avoir de vraies excuses », dit-il, alors qu’il est le seul de la fratrie à s’être porté partie civile, évoquant comme sa soeur « un manque réel d’affection » de la part de sa mère. Lorsque l’avocate de l’association Enfance et Partage, Me Monique Sultan, lui demande s’il considère les nouveau-nés morts comme ses frères et sœurs, il répond « exactement ». « Vous venez de leur donner vie », lance l’avocate avec solennité.

« 3 enfants, plus les 5 »

Mardi, interrogée sur le nombre d’enfants qu’elle a eus avec son compagnon, Sylvie Horning avait répondu « 3, plus les 5 », avant d’expliquer: « Pour moi, ce n’était pas des bébés, c’était des êtres qui grandissaient en moi ». Alors que les experts se sont divisés sur la thèse du déni de grossesse, elle devra expliquer pourquoi elle n’a pas considéré ces cinq nouveau-nés comme des bébés, tandis qu’elle a choisi de donner la vie aux trois autres.

Identifiée en 2017 après une bagarre entre voisins qui avait abouti à un prélèvement génétique, elle avait immédiatement reconnu les faits. « C’était presque devenu une habitude » avait-elle expliqué au gendarme qui avait recueilli ses aveux en garde à vue, François Wirtz, qui a témoigné mercredi. « C’était tellement facile la première fois, alors je l’ai refait », lui avait-elle dit. Pour ses deux premiers enfants, leur père avait appris la grossesse de sa compagne au 6ème ou 7ème mois, pour leur dernière fille seulement 3 heures avant sa naissance.

Mardi avait été évoquée son enfance saccagée par une mère pathogène et un beau-père qu’elle accuse de l’avoir violée quand elle avait 6 à 8 ans. Prenant le contre-pied de la thèse du déni de grossesse défendue la veille par le gynécologue Israël Nisand, le Dr Henri Brunner, psychiatre qui l’a expertisée, a estimé mercredi que l’accusée « désirait être enceinte mais ne voulait pas des enfants ». Une expertise décriée par l’avocat de Sylvie Horning pour avoir été rendue après un entretien de seulement 15 minutes. Le verdict est attendu jeudi.

LQ / AFP