Fin octobre 2014, un tragique accident était survenu sur l’autoroute entre Altwies et Frisange. Bilan : un mort et plusieurs blessés. Plus de six ans après les faits, le tribunal vient de rendre son jugement.
Il est environ 6 h 40, ce 31 octobre 2014, lorsque le conducteur d’une VW Golf mord l’accotement de l’A13 entre Altwies et Frisange avant de taper une borne d’appel d’urgence. Le choc est tel que le véhicule est propulsé sur la voie de dépassement.
Mais cela ne s’arrête pas là. Plusieurs automobilistes qui arrivent derrière la voiture accidentée ne réussissent pas à éviter l’obstacle. Au total, cinq véhicules sont impliqués dans cette collision en chaîne. Une Fiat Punto, avec à son bord trois personnes, est particulièrement touchée. L’homme de 30 ans assis sur la banquette arrière succombera à ses graves blessures.
Dépêchés sur les lieux de l’accident, les secours découvrent à côté de la victime mortellement blessée, plusieurs autres blessés. Le conducteur de la Fiat Punto et celui de la VW Golf, notamment, sont grièvement blessés. Sorti de sa voiture après son accident, ce dernier dit avoir été happé par l’Audi rouge. Depuis, le jeune homme est paraplégique. Et il se trouve en chaise roulante.
«C’est un accident extrêmement complexe», d’après les deux experts chargés de sa reconstitution. En raison de la succession de collisions, les positions des véhicules accidentés ont évolué. Et les déclarations des accidentés sont divergentes. Ce qu’on sait toutefois du médecin légiste, c’est que «l’homme assis sur la banquette arrière de la Fiat Punto était encore en vie lors de la première collision. Ce n’est que lors du deuxième choc (à l’arrière avec l’Audi A4) qu’il est décédé.»
Une vitesse inadaptée à la météo
Contrairement à d’autres accidents, il n’y avait pas d’alcool ou de drogue en jeu. Ce matin-là, la plupart étaient en route vers leur travail. Il faisait encore nuit. Et il y avait du brouillard plus ou moins épais par endroits.
Les conducteurs auraient dû adapter leur conduite aux conditions météorologiques défavorables. C’est notamment le défaut de prévoyance et de précaution ayant entraîné involontairement la mort du trentenaire et des coups et blessures que le parquet reproche aux conducteurs de la VW Golf, de la Fiat Punto et de l’Audi A4. Aujourd’hui ils ont 27, 45 et 67 ans. On est plus de six ans après le drame.
Car le procès a fait l’objet de plusieurs remises. La dernière en date – fin 2019 – en raison d’un rapport d’expertise complémentaire réalisé à la demande de la défense du conducteur de l’Audi A4. Cela a été compliqué de réunir les trois experts pour terminer les débats. Et puis il y a eu la crise sanitaire… À cause d’un changement de composition du tribunal, toute l’affaire a finalement dû être réexposée fin février 2021.
Dans son jugement rendu jeudi, la 16e chambre correctionnelle retient le dépassement du délai raisonnable. Elle en tient compte dans la détermination des peines.
L’Audi entre 80 et 100 km/h lors du choc
Le conducteur de la VW Golf à l’origine du premier accident, élément déclencheur pour les autres accidents en chaîne, a invoqué un «black-out» pour expliquer sa sortie de route. Vu les éléments du dossier, le tribunal penche plutôt vers un endormissement soudain et passager (Sekundenschlaf). Déjà condamné à la chaise roulante, le jeune homme écope de trois mois de prison avec sursis, une amende de 1 000 euros et une interdiction de conduire de 18 mois assortis du sursis.
Même peine pour le quadragénaire au volant de la Fiat Punto. Le tribunal a également tenu compte de son état de santé résultant des suites de l’accident. Grièvement blessé, il a été victime d’un AVC à l’hôpital.
Comme le demandait le parquet, l’homme au volant de l’Audi A4 est condamné à la peine la plus lourde : neuf mois de prison avec sursis, 3 000 euros d’amende et une interdiction de conduire d’un total de 36 mois. Vingt-quatre mois de cette peine sont assortis du sursis. Pour les 12 mois restants, les trajets professionnels sont exceptés. Selon les calculs des experts judiciaires, le sexagénaire roulait entre 80 et 100 km/h lorsqu’il a percuté la Fiat Punto. D’après le parquet, s’il avait adapté sa vitesse aux conditions météorologiques, l’accident aurait pu être évité.
120 000 euros alloués à la famille de la victime
Le volet civil de cette affaire n’est pas moins complexe. En résumé, le tribunal instaure un partage des responsabilités : la part du conducteur de l’Audi A4 est de 60 %, celle du conducteur de la VW Golf de 20 %, tout comme celle du conducteur de la Fiat Punto. La famille de la victime décédée se voit ainsi allouer un total de 120 000 euros. Parmi les autres parties civiles à indemniser il y a par ailleurs les deux autres automobilistes impliqués dans l’accident, mais qui n’ont pas atterri sur le banc des prévenus (aucune faute n’a pu leur être imputée), certains proches et des assurances. La plupart des préjudices seront évalués par voie d’expertise. Aussi en ce qui concerne les parties civiles des trois condamnés, le tribunal a nommé des experts médicaux.
Toutes les parties ont 40 jours pour interjeter appel contre le jugement.
Fabienne Armborst