Ni vu ni connu, un cambrioleur pensait se remplir les poches dans un café à Schifflange en passant par le toit. Cela a pris du temps, mais son sang a permis aux enquêteurs de remonter jusqu’à lui.
À l’heure actuelle, une telle expédition serait sans doute plutôt infructueuse. Depuis un mois et demi, les portes des cafés au Grand-Duché sont fermées à cause de la crise sanitaire. Les caisses ne se remplissent donc plus et les réserves financières des établissements s’épuisent sérieusement. Mais les faits sur lesquels se penchait, jeudi après-midi, la 18e chambre correctionnelle remontent à il y a trois ans. Sajmir R. (41 ans) est poursuivi pour avoir cambriolé au mois de mars 2017 un café de l’avenue de la Libération à Schifflange et d’y avoir dérobé autour de 5 000 euros. C’est du moins ce que le parquet lui reproche. Car, à la barre, le quadragénaire actuellement détenu à Schrassig a contesté avoir volé cette somme. «Je pense que c’était plutôt entre 500 et 600 euros», s’est défendu, derrière son masque, le prévenu, qui était assisté par un interprète.
Il avait pénétré dans l’établissement par le toit après avoir escaladé un échafaudage. Ce fait avait été précédé d’une première tentative en juin 2016… qui n’avait toutefois pas abouti. Toujours est-il que les deux fois, il a laissé son ADN sur les lieux, malgré lui. La police avait découvert des traces de sang sur la façade… Mais cela a pris un certain temps avant que le suspect puisse être identifié. Il avait entretemps quitté le Grand-Duché. Il a finalement été extradé dans le cadre d’une autre affaire. Confronté à ses traces, Sajmir R. avait contesté les faits au poste de police et chez le juge d’instruction. Revirement toutefois, jeudi, à la barre.
«Un acte non réfléchi», selon la défense
Le père de famille, qui déclare avoir essayé de gagner sa vie avec des travaux de peinture et de jardinage, promet de retourner au Kosovo à sa sortie de prison. Son avocate a parlé d’un «acte non réfléchi» lié à son problème d’alcool à l’époque. «On le voit aux traces de sang sur la façade», a appuyé Me Lynn Frank dans sa plaidoirie. Elle demandera au tribunal de tenir compte de «l’ancienneté des faits » au moment de la détermination de la peine. Et de soulever: «Il a déjà été condamné pour des faits postérieurs à ceux qui nous occupent aujourd’hui.»
Mais pour le parquet, il y a une explication pour cela. La concordance entre les traces prélevées sur les lieux à Schifflange et le profil ADN du suspect n’a pu être établie que plus tard. Ce qui explique que quand le résultat est tombé, il avait déjà été jugé pour l’autre affaire. «Il ne s’agit pas d’un simple écart à cause de l’alcool. Voler, c’était son occupation depuis un certain temps», a constaté la parquetière en jetant un œil dans son dossier. Car il n’y a pas que cette condamnation de 2018. Il y a aussi une autre affaire, où pas moins de huit faits lui sont reprochés entre juin et juillet 2017, et qui est toujours en cours. Comme circonstance aggravante, le parquet retient que le cambrioleur n’a pas hésité à fouiller armoires, petits trésors… et qu’il avait même enfoncé une porte lors d’un des faits.
Le parquet requiert deux ans de prison
Au final, la parquetière réclamera 24 mois de prison. Comme «il ne s’agit pas d’un fait isolé» et qu’il a déjà une condamnation en la matière, il ne mérite aucun sursis, a-t-elle estimé. Il n’y a eu aucune constitution de partie civile.
Initialement il était aussi prévu que Sajmir R. soit jugé avec un autre prévenu pour une affaire de faux et d’escroquerie. Le duo aurait voulu, en falsifiant deux tickets d’une borne internet, encaisser des gains. Ils auraient tenté leur coup dans plusieurs cafés. Le coprévenu ayant introduit un certificat médical, l’affaire a dû être décommandée. Ce qui fait que l’audience a vite été levée.
Prononcé le 11 mai.
Fabienne Armborst