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Au tribunal de Luxembourg : «J’ai acheté un coffre-fort»


Leonardo était l’une des seules personnes à connaître l’existence de la collection de bijoux et de lingots de Sébastien. (photo Sophie Kieffer)

Tout indique que Leonardo est l’auteur d’un vol de bijoux de collection que la spécificité rend facilement identifiables. Pourtant, le jeune homme nie malgré les coïncidences.

«Seules deux personnes savaient que je conservais ma collection dans la cave de mon domicile», témoigne Sébastien à la barre de la 13e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Une de ces deux personnes était assise entre deux agents de police sur le banc des prévenus. Il s’agit de Leonardo, l’ancien petit ami de la belle-fille de Sébastien. Le jeune homme de 26 ans, en détention préventive depuis un peu moins d’un an, est suspecté du vol avec effraction d’une partie de cette collection, ainsi que de blanchiment et de recel. Le trentenaire nie l’évidence.

Sébastien revient de quelques jours au camping quand il réalise que quelqu’un s’est introduit par la fenêtre de sa cuisine à son domicile eschois. Il réalise alors que le voleur s’est uniquement concentré sur la cave et n’a pas pris la peine de visiter le reste de la maison. «Mes bijoux, mes lingots et mes pièces de collection étaient exposés sur des présentoirs dans ma cave. Depuis le vol, j’ai acheté un coffre-fort», explique la victime présumée qui estime qu’environ 17 kilogrammes de métaux précieux lui ont été volés. «170 lingots ont disparu» entre le 19 et le 21 juillet à 21 heures. Une collection qui lui a pris dix ans à constituer.

Un indice supplémentaire

«Pourquoi avoir soupçonné Leonardo d’être l’auteur du vol depuis le début ?», interroge la présidente de la chambre correctionnelle. «Le voleur ne pouvait être que quelqu’un qui connaissait l’existence de la collection et son emplacement à la cave», explique-t-il avant d’indiquer avoir mis le jeune couple à la porte quelques semaines avant les faits après un différent et changé les serrures. «Quand ma belle-fille oubliait ses clés, elle rentrait toujours par la fenêtre de la cuisine.» Un indice supplémentaire qui le met sur la piste du voleur présumé. Du vol, il ne récupérera que ce que le ou les voleurs n’auront pas eu le temps de revendre à un commerce qui rachète de l’or et de l’argent.

Leonardo nie le vol et la revente dans la foulée avec acharnement. Oui, dit-il, il a revendu des bijoux, mais ils lui appartenaient. Il les avait achetés, à Sébastien entre autres, pour les revendre. Sébastien mentirait pour toucher l’assurance. «Il avait des problèmes d’argent. J’ai souvent donné de l’argent à sa femme», se défend le prévenu dont le casier judiciaire ne joue pas en sa faveur. Leonardo a été condamné par deux fois pour des vols qualifiés en 2016 et il a écopé de 30 mois de prison dont 12 avec sursis en 2021 pour une série de sept cambriolages commis en 2016, lui rappelle la juge.

Un coup monté contre le prévenu

Le caractère spécifique des bijoux volés ne joue pas non plus en sa faveur. «Ils sont facilement identifiables», précise la présidente de la chambre correctionnelle. «Ce serait une sacrée coïncidence que vous ayez justement vendu des bijoux identiques deux jours après le vol. En outre, vous étiez en couple avec la belle-fille de la victime.» Le prévenu s’entête : il n’a vendu que des bijoux lui appartenant. «Si c’étaient les vôtres, pourquoi les vendre au nom de la jeune femme alors? Pourquoi vous compliquer les choses?», rétorque la juge. «Et pourquoi les revendre dans un commerce très peu regardant sur la provenance des objets?»

Le prévenu ne répond pas. Son avocate, Me Khaldia Djeldjal, réitère la thèse du coup monté fomenté par la victime présumée qui aurait vu d’un mauvais œil la relation entretenue entre sa belle-fille et «un jeune Portugais connu de la justice». Le prévenu n’aurait revendu que quelques petits bijoux ayant appartenu à Sébastien après les lui avoir rachetés. Quant aux 170 lingots d’or et d’argent de collection et aux pièces de monnaie, il n’aurait rien à voir dans leur disparition. Me Djeldjal plaide en faveur de l’acquittement de Leonardo et demande au tribunal de faire preuve «de clémence et d’indulgence» en lui donnant droit à du sursis probatoire et à du travail d’intérêt général. La juge lui a rappelé que le prévenu avait épuisé toutes ses chances de sursis.

Le procureur a requis une peine de 24 mois de prison ferme et une amende appropriée à l’encontre de Leonardo pour vol et blanchiment du produit du vol. Le magistrat est persuadé que le trentenaire a fait le coup. «Il avait connaissance de la configuration des lieux» et «selon les constatations de la police technique, l’auteur du vol s’est précipité directement vers la cave», note-t-il, rappelant une nouvelle fois la spécificité des bijoux et du casier judiciaire de Leonardo.

Le prononcé est fixé ce jeudi.