Le tribunal correctionnel s’est penché lundi sur une affaire d’attentat à la pudeur survenu à l’été 2016 au sein d’un groupe de scouts à Dudelange. Dans cette affaire, ce n’est pas le parquet qui est à l’origine de sa convocation au tribunal. C’est la victime qui a lancé la procédure de citation directe.
« Monsieur a profité du sommeil de sa victime pour la caresser au niveau des parties intimes, sans son consentement », récapitulait, lundi matin, Me Céline Mertes, qui représente la victime et ses parents dans cette affaire. Les faits remontent à la nuit du 11 août 2016. Du dossier, il ressort qu’à l’époque ces deux scouts de Dudelange se connaissaient de longue date. Ils auraient dû accompagner un groupe à Esch-sur-Sûre. Pour faciliter leur départ tôt le matin vers ce camp, le plus jeune (17 ans à l’époque) avait passé la nuit au domicile de l’aîné, «le responsable du groupe». Alors que chacun dormait dans une pièce séparée, ce dernier s’était introduit dans la chambre du mineur.
Interrogé par le service protection de la jeunesse de la police judiciaire, le jeune homme, âgé de 24 ans à l’époque, avait reconnu les faits. «Début avril 2017, le parquet de Luxembourg a considéré que Monsieur s’est rendu coupable du chef d’attentat à la pudeur et lui a envoyé un avertissement formel sans donner de suites pénales aux faits reprochés», précise Me Mertes.
Si le jeune homme s’est retrouvé à la barre de la 12e chambre correctionnelle, c’est en effet à la suite de la citation directe lancée par la victime. La partie requérante lui reproche d’avoir déformé la vérité au sein du groupe de scouts : il aurait ainsi informé les autres membres que l’affaire avait été classée sans préciser que l’infraction avait été retenue et qu’il avait reçu un avertissement formel. «Il a fait en sorte que les amis communs des deux parties pensent que l’attouchement avancé était une invention de la part de mon client.» «Ce dernier est à présent considéré comme affabulateur par les scouts», conclut Me Mertes.
Ce que le citant direct réclame aujourd’hui, c’est que le tribunal retienne l’infraction de l’attentat à la pudeur. À titre d’indemnisation, Me Mertes réclame 8 000 euros pour la victime et l’euro symbolique pour les deux parents. Car outre des troubles psychologiques et du sommeil, la victime souffrirait de son «image ternie» auprès des scouts.
Il envisage d’encadrer un nouveau camp cet été…
À la barre, le cité direct n’a pas contesté les attouchements : «Nous étions des amis de longue date. Je ne voulais pas lui faire du mal.» Tels sont les mots du jeune homme, qui ne cache pas son homosexualité. Interrogé par le tribunal sur son implication actuelle chez les scouts, il a fait part de son projet d’encadrer un camp cet été, en soulignant toutefois : «C’est la première fois depuis un an et demi que je redeviens actif.»
La défense parle «d’avances faites de manière maladroite et irréfléchie» de la part de son client à l’époque. «Le parquet en est arrivé à la conclusion qu’il n’y a pas de danger. Et il l’a sanctionné par un avertissement», constate Me Pim Knaff. Pour l’avocat, la citation directe a été lancée parce qu’il «n’a pas répondu à la demande d’indemnisation de la partie adverse». Il conteste toutefois ne jamais avoir répondu à ces lettres.
Vu le repentir et l’absence d’antécédents judiciaires de son client, Me Knaff demande de lui accorder une suspension du prononcé. Ce qui signifierait que sa culpabilité serait bien retenue, mais aucune peine prononcée. Les montants d’indemnisation seraient toutefois à réduire dans leurs justes proportions, estime-t-il.
«Il n’est pas seulement question d’argent ici», a tenu à souligner Me Mertes en fin d’audience. Elle n’a pas caché ses craintes quant à une éventuelle suspension du prononcé. Car un telle décision ne l’empêcherait pas d’encadrer de nouveaux camps de scouts à l’avenir. Dans cette affaire, le parquet se rapporte à la prudence de la justice.
Le tribunal rendra son jugement le 5 juillet.
Fabienne Armborst