Il avait le droit de prendre le volant pour aller travailler mais pas pour sortir la nuit… et encore moins avec 2,26 g d’alcool. En récidive, le cuisinier a passé un mauvais quart d’heure jeudi après-midi au tribunal.
«Est-ce que vous avez vraiment envie d’aller en prison?» On était bien loin de l’ambiance festive de cette soirée du 26 juin 2019 où l’alcool semble avoir coulé à flots. Assis sur le banc des prévenus jeudi après-midi, le père de famille que la représentante du parquet ne lâche pas du regard secoue la tête : «Oh non, pas du tout.»
«Vous croyez que vous pouvez faire tout ce que vous voulez?», embraye la parquetière. Le prévenu secoue de nouveau la tête. Et pourtant, il en est à sa troisième affaire pour circulation sous influence d’alcool. La première remonte à un petit bout de temps, c’était en 2009. Mais la deuxième, accompagnée d’un délit de fuite, date de 2017. Ce qui fait que le jour des faits, il se trouvait encore sous le coup d’une interdiction de conduire de 39 mois. Il avait juste le droit de se rendre au travail. Et ce n’est définitivement pas ce qu’il faisait à 3 h 30 en pleine nuit.
Problème de levier de vitesse ou d’alcool?
En voulant enclencher la marche-arrière rue Notre-Dame à Luxembourg, il avait attiré l’attention de la police qui passait par là. Elle avait constaté qu’il y avait un problème. Ce problème, ce n’était pas le véhicule ni le levier de changement de vitesse où il fallait soulever un élément en plastique comme tentera de l’expliquer la défense… «Vous ne pensez pas que c’est plutôt le taux d’alcool…», coupera d’ailleurs la juge. Et la parquetière d’insister dans son réquisitoire : «Soyons sérieux, sans les 2,26 g par litre de sang, cela n’aurait pas été un gros problème!» On parle tout de même de plus de quatre fois le taux légal.
Le taux est visiblement ce qui explique pourquoi ce cuisinier a oublié qu’il avait juste le «droit de prendre le volant pour le travail et se rendre à la Provencale», mais que «ce n’était pas pour sortir la nuit au Saumur avec un ami», poursuit l’avocat. L’homme qui l’accompagne sur le banc des prévenus a un vague souvenir du gyrophare de la voiture de police. Mais il déclare ne plus se rappeler comment ses clés de voiture sont arrivées entre les mains de son ami. «Laisser quelqu’un qui est aussi ivre que vous utiliser votre voiture n’est pas responsable», ne manquera pas de le sermonner la parquetière. Sa chance, c’est que son casier ne renseigne aucune inscription. Son affaire de circulation qui remonte à il y a 13 ans n’y est plus répertoriée. De sorte que la parquetière réclamera une amende et une interdiction de conduire de 22 mois sans s’opposer à un éventuel sursis.
Mais pour la peine requise contre le conducteur, ce n’était pas le même son de cloche. «Lors de la troisième affaire, le parquet demande en principe la prison, car c’est la seule possibilité de vous tenir éloigné de la voiture et de la route.» C’est ainsi qu’une peine de prison de trois mois, une amende et une interdiction de conduire d’un total de 48 mois seront requises. «Incarcérer Monsieur n’est pas la solution. Il a une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Il risque de perdre son travail dans le restaurant…», donnera à considérer la défense, plaidant en faveur d’une peine intégralement assortie du sursis. Au tribunal de trancher désormais.
La 13e chambre correctionnelle rendra son jugement le 19 juin.
Fabienne Armborst