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Accident mortel dans une cour de ferme à Roedt : prison avec sursis pour le camionneur


La victime est décédée après avoir été écrasée par l’avant du poids lourd qui manœuvrait dans la cour de ferme. (Photo : police grand-ducale)

Début 2018, un agriculteur est mort écrasé à Roedt. Le chauffeur du camion a été condamné mercredi après-midi. Il écope aussi d’une interdiction de conduire de 24 mois avec sursis et d’une amende.

Le 31 janvier 2018 au matin, un tragique accident survient dans une cour de ferme à Roedt. Un agriculteur de 68 ans meurt écrasé lors des manœuvres du camionneur qui vient récupérer du bétail. Le 112 est immédiatement appelé. Mais les secours dépêchés sur les lieux ne peuvent rien faire.

Le quinquagénaire au volant du camion au moment du drame s’est retrouvé à la barre du tribunal correctionnel. Il a été condamné, mercredi après-midi, à trois mois de prison avec sursis, une interdiction de conduire de 24 mois – également assortie du sursis – et une amende de 1 000 euros. Conformément aux réquisitions du parquet.

La position exacte du choc n’a pas pu être déterminée. À l’arrivée de la police, la victime se trouvait déjà dans l’ambulance. Le camion avait en outre changé de position. Car après avoir senti que quelque chose n’allait pas – il parle d’un «léger ébranlement» –, le conducteur dit avoir fait marche arrière. L’absence de traces de sang n’a pas facilité la reconstitution de l’accident.

Pas de défaut technique d’après l’expert

Lors de son audition au poste de police, le camionneur avait expliqué avoir enclenché la marche arrière, mis le pied sur l’accélérateur, mais que le camion aurait fait un bond en avant. Il avait précisé que cela était lié à la mécanique de la boîte automatique, quand on n’appuyait pas à fond sur l’accélérateur. Une explication qui n’a pas pu être confirmée par l’expert qui a analysé le véhicule début 2020. Lui-même a manœuvré l’engin. Aucun défaut technique à signaler. Et il n’a ressenti ni secousses ni bonds.

Est-il envisageable que le camionneur ait actionné la marche avant au lieu de la marche arrière? Cette hypothèse n’avait pas pu être exclue par l’expert. La carte tachygraphe a également été saisie après l’accident. Mais visiblement, toutes les données de la boîte noire n’ont pas été extraites par la police. De sorte que l’expert ne disposait d’aucune indication sur la vitesse enregistrée.

Ce que l’expert avait toutefois constaté, c’est que le camion, d’un poids autorisé de 18 tonnes, ne disposait pas d’un rétroviseur frontal. Ce dernier, imposé par une directive européenne, permet de voir juste devant le camion. Il faut savoir que la cabine du conducteur est surélevée. À supposer que la victime, qui mesurait 1,82 m, se trouvait juste devant le camion, elle n’était donc pas visible. Si pour une quelconque raison elle était au sol – à cause d’une chute par exemple –, elle était encore moins visible par le conducteur. Et cela jusqu’à 4,70 mètres de distance.

L’absence de rétroviseur frontal au cœur des débats

La défense avait parlé d’un «évènement imprévisible». On ne pourrait reprocher aucune faute au prévenu. Et d’ajouter : «On se demande si l’accident aurait peut-être pu être évité si le camion avait été équipé d’un rétroviseur frontal.» D’après le parquet, la présence d’un tel rétroviseur n’aurait toutefois pas amélioré la situation, si le conducteur indique s’être «concentré à 100 % sur ce qui se passait à l’arrière du camion». Il constatait également que lors de sa toute première audition à la police, il avait dit avoir voulu avancer un petit peu…

Au cours de son réquisitoire, le parquetier avait exclu que la victime soit responsable de l’accident. D’après lui, il n’était pas pensable qu’elle se trouve longtemps immobile dans la portion non visible par le conducteur : «Elle n’avait aucune raison d’y être. Ce n’est pas là qu’elle peut faire des signes au conducteur, si elle ne peut pas le voir.»

La conclusion du parquet : l’accident est bien dû au «comportement fautif» du camionneur. «En regardant en avant, il y aurait eu une grande probabilité qu’il voie la victime. Et il y aurait eu une grande probabilité que l’accident soit évité.» La juge de la 9e chambre correctionnelle a visiblement rejoint la position du parquet. Car dans son jugement rendu, elle a reconnu le quinquagénaire pénalement responsable de l’accident mortel. Il a 40 jours pour interjeter appel.

L’assurance ayant indemnisé la famille de la victime, il n’y avait pas eu de constitution de partie civile lors du procès.

Fabienne Armborst