Le patron du CSV, Luc Frieden, impose le parti comme le grand gagnant des élections législatives 2023. Un rapprochement avec les libéraux semble le plus logique.
Luc Frieden a-t-il réussi son pari ? Le revenant en politique, qui a succédé à un Claude Wiseler perdant aux dernières législatives, a surpris, certains estimant que le CSV allait faire du neuf avec du vieux. Et pourtant. Les chrétiens-sociaux ont réussi à maintenir leurs résultats et conservent leurs 21 députés. Le DP grignote deux places et s’installera à la Chambre avec 14 sièges. Faites le calcul… Les discussions entre le CSV et le DP autour d’une probable coalition à deux n’étaient un secret pour personne avant ces élections.
Il faut dire que les libéraux voyaient d’un drôle d’œil les initiatives socialistes concernant le temps de travail, le retour de l’impôt sur la fortune et le niveau d’imposition des sociétés. Difficile d’accorder ses violons dans une nouvelle coalition avec des libéraux estimant que leur programme était plus proche de celui des chrétiens-sociaux. Et cela bien avant le vote. Xavier Bettel, qui a su imposer son style depuis dix ans, a réussi à maintenir le DP dans une bonne dynamique. Dynamique qui devrait se poursuivre avec un nouveau partenaire. Mais qui sera Premier ministre ?
Au niveau des socialistes, le bilan national est satisfaisant avec un siège en plus (onze au total). Le parti a réussi à faire mieux que se maintenir et conserver ses députés. Le LSAP est ouvert aux négociations pour former un gouvernement avec un partenaire, a timidement annoncé hier soir Paulette Lenert. Mais difficile de déboucher le champagne : comment faire la fête alors qu’un des partenaires de la coalition s’est pris les pieds dans le tapis et rend impossible la suite de l’aventure d’une Gambie III ?
La grimace des écolos
Après le temps des sourires, voici donc le temps des grimaces pour les écolos. L’inquiétude chez les verts était justifiée car ils ont connu une sacrée dégringolade par rapport au dernier scrutin. Notre «une» d’il y a cinq ans présentant un Claude Turmes hilare semble bien loin. En 2013, déi gréng marquaient l’histoire politique du pays en passant de six députés à neuf, talonnant ainsi les socialistes qui avaient réussi à maintenir dix sièges. Le petit partenaire de la coalition DP-LSAP devenait un pivot important du gouvernement Bettel II.
Que reste-t-il maintenant de cette soirée alors que le parti retombe à quatre députés à la Chambre ? L’engagement du parti pour la transition énergétique a été mis à mal par les circonstances internationales qui ont totalement bouleversé nos sociétés. Déi Gréng ont pu mettre en œuvre certaines de leurs initiatives, mais ont pris de plein fouet une certaine lassitude des électeurs. La cause environnementale est belle, mais quel est le prix à payer?
Les électeurs se sont posé la question ! Et c’est sans compter les scandales qui ont émaillé la législature, avec notamment les affaires Traversini et Dieschbourg. L’explosion des prix de l’énergie, des matières premières en général et du coût de la vie a également sans doute effrayé, à tort ou à raison, des électeurs mis sous pression financièrement. Les élus déi gréng sont apparus comme ceux qui allaient alourdir, encore, la note des ménages. La bataille contre la crise climatique ne semble pas pouvoir se mener en même temps qu’une crise économique. Et pourtant, le temps presse…
Derrière les partis qui comptent leurs élus et s’organisent pour une éventuelle coalition, il y a l’ADR qui a bénéficié d’un intérêt élevé des électeurs. La personnalité de Fred Keup, dont la présence sur la scène politique remonte au fameux référendum, n’est pas pour rien dans ce résultat positif pour le parti souverainiste. L’ADR avait pour objectif d’obtenir un groupe parlementaire. Soit cinq députés. C’est gagné. Le départ de Roy Reding n’a pas eu d’impact sur les résultats et cette démission a été relativement bien gérée par l’ADR, qui est resté ferme lors de cette affaire.
Roy Reding, qui a créé son parti dans la foulée, aura grappillé malgré tout quelques voix au parti. L’ADR a résisté à cette défection et vient de franchir un cap avec l’élection de cinq députés. En 2013, 6,64 % des électeurs avaient voté pour le parti, 8,28 % en 2018 et 9,27 % en 2023. Le processus de normalisation de ce parti est-il en train d’être enclenché comme pour bon nombre de partis populistes européens? La marche semble encore bien haute pour y parvenir. Mais les militants de l’ADR pouvaient savourer leur petite victoire hier.
Les membres des pirates ont aussi eu le sourire. La surprise des élections de 2018 n’était pas un feu de paille. Il y a cinq ans, le Parti pirate envoyait deux députés à la Chambre. Il a fait mieux que confirmer hier et obtenu trois sièges. Sven Clement pouvait se montrer satisfait, car il a réussi à maintenir son parti dans le jeu politique. Déi Lenk réussit de son côté à se maintenir. Et va découvrir, à ses côtés, de nouveaux membres dans les bancs de l’opposition.
C’est bien le cas de le dire… Puisqu’au cas où vous l’auriez râté, le DP avait ces dix dernières années bien gardé les territoirs ministériels du CSV: État, Finances, Famille… et a plutôt fait ses preuves en matière de compétence en la matière.
À voir maintenant pour l’Education, la Santé, les Transports, etc.