Il est 6h50 et Gemma Rosaria, carte d’électrice à la main, est la première à patienter devant le bureau de vote de Broomhouse, dans l’est de Glasgow. Comme beaucoup d’Ecossais, c’est un bulletin « Remain » qu’elle compte déposer dans l’urne.
« Sortir de l’Union européenne serait idiot. Mais j’ai le sentiment que le remain va l’emporter », confie la jeune femme de 24 ans aux longs cheveux noirs. Sur le parking du bureau de vote, un petit bâtiment fait de briques et de bois où quelque 600 personnes doivent venir voter jeudi, les premières voiturent se garent. « Ce vote est important pour elle », sourit Amanda Walker, 42 ans, en désignant sa fille, une petite rousse en tenue d’écolière. « Il vaut mieux garder ce que l’on a plutôt que de prendre le risque d’un pari ».
A la sortie du parking, David Turner, conseiller municipal du SNP, le parti indépendantiste écossais, essaie de faire pencher le coeur des indécis.
Cheveux blancs et veste bleue, le presque quinquagénaire distribue des dépliants pro-UE. « En Ecosse, le remain va l’emporter largement », affirme-t-il. Pour l’ensemble du Royaume-Uni, il préfère ne pas s’avancer. C’est dans ce bureau de vote que la Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, est venue voter dans la journée, accompagnée de son mari.
« Les sondages montrent que ça va se jouer dans un mouchoir de poche, c’est pourquoi il est très important d’aller voter aujourd’hui », a déclaré la leader du SNP à la sortie du bâtiment.
Pour autant, en Ecosse, les jeux sont presque faits : contrairement aux Anglais, très partagés, les Ecossais sont, comme elle, largement favorables à un maintien dans l’UE.
« Le droit de quitter le Royaume-Uni »
C’est pourquoi, si le « out » (sortie) l’emporte, « les gens pousseront pour un nouveau référendum » d’indépendance de l’Ecosse, estime Michael Renfrew, étudiant en économie de 23 ans, barbe rousse et espadrilles. « Je pense que l’indépendance pourrait l’emporter cette fois-ci ».
« Ce serait le droit des Ecossais que de quitter le Royaume-Uni pour demander à rester membre de l’Union européenne », estime aussi John Gilmour, infirmier de 55 ans, devant un bureau de vote du centre de Glasgow. « L’Union européenne ne marche pas mais je vais voter +remain+ parce que je ne veux pas que le Parlement britannique concentre tous les pouvoirs », explique Connor McGarry, 25 ans.
Les nationalistes du SNP l’ont répété durant la campagne : un Brexit justifiera un nouveau référendum d’autodétermination si l’Ecosse -au contraire de l’Angleterre- votait massivement pour rester dans l’UE.
L’Angleterre et l’Ecosse « sont censés être des partenaires égaux. Si seule l’Angleterre vote pour un Brexit, ce ne serait pas juste », juge Vincent Mellon, 53 ans, assis sur banc de la vaste place George Square, dans le centre. « Ceux qui ont mené la campagne du +out+ se fichent de l’Ecosse ou de l’Irlande du Nord. Ils ne portent aucun intérêt à ce qui passe au-delà de Westminster », le parlement britannique, estime-t-il.
Alex Blackshire, elle, ne veut pas entendre parler d’un nouveau référendum d’indépendance. « Il y a eu énormément de divisions au cours de la campagne de 2014, je ne veux pas que ça se reproduise », déclare la jeune femme de 25 ans.
Au volant de son taxi, en direction du centre-ville de Glasgow, James Ballantine ira voter pour un Brexit après sa journée de travail. « Il y a trop d’immigrés européens. Ils viennent ici et profitent des avantages sociaux », estime-t-il. « Qu’ils ne viennent pas chez nous s’ils n’ont rien à offrir. Nous devons reprendre le contrôle de notre pays », ajoute-t-il, reprenant une des phrases martelées par les partisans d’un Brexit tout au long de la campagne.
Le Quotidien / AFP