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Violences en Afrique du Sud : le Nigeria va rapatrier 600 de ses ressortissants


Dans un township d'Afrique du Sud, le 5 septembre dernier (Photo : AFP).

Après une semaine « d’anarchie » et de violences xénophobes en Afrique du Sud, qui ont fait douze morts, le Nigeria va rapatrier quelque 600 de ses ressortissants: un geste hautement politique dans un contexte de tensions entre les deux grandes puissances du continent.

Après trois jours d’accalmie, de nouvealles violences ont éclaté dimanche dans plusieurs quartiers de Johannesburg. La police a été contrainte de tirer des balles en caoutchouc et des grenades paralysantes pour disperser une foule de plusieurs centaines de manifestants armés de bâtons, qui ont détruit des magasins en exigeant le départ des étrangers. Au moins deux personnes ont été tuées, a annoncé un porte-parole de la police de la ville, Xolani Fihla, portant le bilan à douze morts.

Bien que les victimes soient majoritairement des nationaux, les attaques, les pillages de commerces et les bastonnades sont, eux, dirigés contre les étrangers établis dans la première puissance industrielle du continent. La police a effectué plus de 600 arrestations et les dégâts sont considérables, particulièrement dans les townships et le centre-ville de Johannesburg, où les magasins étaient restés fermés lundi. Lundi, dans sa troisième intervention en moins d’une semaine, le chef de l’Etat sud-africain, Cyril Ramaphosa, a assuré que son « gouvernement ne laisserait pas l’anarchie et la violence » s’installer en Afrique du Sud. Il a également rappelé que « la majorité des étrangers respectent la loi et ont le droit de vivre (…) en paix ».

Réactions internationales

La semaine dernière, de nombreux pays africains avaient vivement réagi face à la violence des images qui tournent en boucle sur les réseaux sociaux, et le Nigeria, qui rivalise depuis des années avec l’Afrique du Sud pour la place de première puissance économique du continent, a pris la tête du mouvement. Lundi, la présidence nigériane a « donné les instructions nécessaires pour l’évacuation immédiate de tous les Nigérians qui souhaitent rentrer à la maison ». Le consulat nigérian à Johannesburg a déclaré à l’AFP que 600 personnes environ, sur « plus de 100.000 Nigérians » vivant actuellement en Afrique du Sud, s’étaient manifestées et devaient être rapatriés à partir de mercredi. L’émissaire spécial envoyé la semaine dernière à Pretoria pour rencontrer le président Ramaphosa, est rentré à Abuja ce week-end et en a rendu compte au chef de l’Etat Muhammadu Buhari lundi. « Le président Ramaphosa reconnaît que cette vague de violence est déconcertante et gênante », a fait savoir la présidence lundi. « Elle abîme non seulement l’image du pays, mais aussi ses relations avec ses frères, les pays africains. » Les deux présidents doivent se rencontrer en Afrique du Sud en octobre, lors d’une visite prévue depuis plusieurs semaines.

Des annulations en pagaille

Depuis une semaine, au Nigeria, chaque célébrité, petite ou grande, et chaque homme politique réagit tantôt pour annuler concerts et festivals de cinéma, tantôt pour « déclarer la guerre totale » à l’Afrique du Sud. Le président du parti au pouvoir, Adams Oshiomhole, est allé jusqu’à demander au gouvernement fédéral nigérian de « saisir » et nationaliser la compagnie sud-africaine MTN, au moment où le géant des télécoms fermait ses antennes à travers le pays pour protéger ses agents et ses clients des attaques contre l’enseigne. Dans de nombreux points de contrôle de police ou de l’armée ces derniers jours, les agents de sécurité demandaient aux étrangers s’ils étaient Sud-africains, sur un ton mi-sérieux, mi-amusé, mais de manière assez insistante pour laisser percevoir la tension qui s’est emparée du Nigeria.

« Certains politiciens en Afrique du Sud exploitent le sentiment xénophobe pour leurs propres intérêts. Certains politiciens au Nigeria exploitent les violences xénophobes en Afrique du Sud pour leurs propres intérêts. Aucun n’a le monopole de la bêtise », a conclu sur Twitter l’économiste Nonso Obikili, spécialiste des relations entre les deux pays.