Le Venezuela attend samedi une journée cruciale de manifestations contre la réélection du président Nicolas Maduro, qui ne cesse de menacer les chefs de l’opposition contraints de se cacher.
Rendez-vous a été donné par la cheffe de file des adversaires de Nicolas Maduro, Maria Corina Machado, pour une mobilisation en milieu de matinée sur l’une des grandes avenues de la capitale Caracas. Mais le spectre de la répression de 2017 qui avait fait une centaine de morts, déjà sous Nicolas Maduro, génère une certaine peur de descendre dans les rues alors que le dirigeant chaviste multiplie les attaques.
Sans surprise, l’autorité électorale a confirmé vendredi la réélection de Nicolas Maduro, avec 52% des voix face à l’opposant Edmundo Gonzalez Urrutia (43 %), sans pour autant donner les résultats détaillés. « Nous avons gagné! », a rétorqué du tac-au-tac sur X Maria Corina Machado, déclarée inéligible par le pouvoir et qui avait été remplacée au pied levé par Edmundo Gonzalez.
« Nous devons continuer à aller de l’avant pour affirmer la vérité. Nous avons les preuves et le monde les reconnaît déjà », a lancé Maria Corina Machado, qui considère comme une « farce » les chiffres mis en avant par le Conseil national électoral (CNE).
« Maudite » Maria
Selon le décompte de l’opposition, M. Gonzalez a recueilli 67 % des voix. Au moins 11 civils et un militaire ont été tués, et plus de 1.200 personnes arrêtées lors des manifestations spontanées qui ont éclaté un peu partout dans le pays dans les deux jours qui ont suivi le scrutin.
L’opposition, qui a fustigé une « répression brutale », parle de 20 morts et 11 disparitions forcées. Vendredi, elle a dénoncé le saccage de son siège à Caracas dans la nuit par un groupe d’hommes armés et cagoulés, de même que la « détention arbitraire » de l’un de ses responsables, le journaliste Roland Carreño, arrêté dans la capitale.
De son côté, Nicolas Maduro s’en est pris de nouveau avec véhémence à ses adversaires, cet « assassin de Gonzalez », et la « maudite Maria » Machado, qu’il avait déjà menacés de faire emprisonner. Au cours d’une conférence de presse à la présidence, il a accusé ses rivaux de préparer des attentats contre la police lors des marches prévues samedi.
Revenant sur les manifestations ayant suivi le scrutin, il a de nouveau condamné un « plan prémédité » par des « fascistes », des « criminels et des drogués » qui s’en sont pris aux « symboles du chavisme bolivarien ».
La question de la capacité de l’opposition à mobiliser dans ce climat d’extrême tension se pose et la journée de samedi paraît importante pour la séquence des jours à venir.
Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a par ailleurs exprimé son « inquiétude » quant à la sécurité de Maria Corina Machado et Edmundo Gonzalez Urrutia lors d’une discussion vendredi avec les deux intéressés, a rapporté le département d’Etat dans un communiqué.
« Preuves incontestables »
Héritier d’Hugo Chavez, Nicolas Maduro, au pouvoir depuis 2013 et officiellement réélu pour un troisième mandat jusqu’en 2031, a reproché à Edmundo Gonzalez de ne pas avoir répondu ce vendredi à une convocation de la Cour suprême, le menaçant de « conséquences légales gravissimes ».
Une nouvelle fois, il n’a eu de cesse de brocarder le « coup d’Etat » mené selon lui « par les Etats-Unis et l’extrême droite internationale » depuis sa réélection contestée. « Les USA se prennent pour l’autorité électorale au Venezuela et dans le reste du monde », a-t-il critiqué, s’en prenant à plusieurs reprises nommément à Antony Blinken.
Jeudi, Antony Blinken, arguant de « preuves incontestables », a estimé que l’opposant Edmundo Gonzalez Urrutia avait gagné la présidentielle. Dans la foulée de cette déclaration, cinq pays d’Amérique latine ont reconnu vendredi la victoire de l’opposant, parlant eux aussi de « preuves incontestables » de cette victoire.
« Une vérification impartiale des résultats »
Selon la diplomatie américaine, l’écart en faveur de Edmundo Gonzalez Gonzalez se compte même en « millions de voix ». Le Pérou a été le premier pays, mardi, à reconnaître Edmundo Gonzalez Urrutia comme le président élu « légitime », ce qui a poussé Caracas à rompre ses relations diplomatiques avec Lima.
En face, le Nicaragua, l’un des fidèles alliés du pouvoir chaviste avec la Russie et l’Iran notamment, a reconnu la victoire de Nicolas Maduro proclamée officiellement par le Conseil national électoral.
Le dirigeant socialiste a « remercié » les présidents du Brésil, Luiz Inácio Lula da Silva, de la Colombie, Gustavo Petro, et du Mexique, Andrés Manuel López Obrador, qui « travaillent ensemble pour que le Venezuela soit respecté et que les États-Unis ne fassent pas ce qu’ils font », a déclaré Nicolas Maduro.
Ces trois pays entretenant plutôt de bonnes relations avec le Venezuela chaviste avaient demandé « une vérification impartiale des résultats » de l’élection.