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Un procureur spécial va enquêter sur Trump et la Russie


Robert Mueller, 72 ans, très respecté directeur du FBI de 2001 à 2013, pourra mener une enquête plus indépendante du pouvoir politique. (photo AP)

Un ancien chef du FBI a été nommé mercredi procureur spécial aux États-Unis pour garantir l’indépendance de l’enquête sur une éventuelle collusion entre des proches de Donald Trump et la Russie, un rebondissement qui assombrit le mandat du président américain.

Le numéro deux du ministère de la Justice, Rod Rosenstein, a annoncé la nomination de Robert Mueller, 72 ans, très respecté directeur du FBI de 2001 à 2013, sous George W. Bush puis Barack Obama. La nomination vise à isoler les investigations du pouvoir politique en réduisant au minimum la supervision du ministère de la Justice, tutelle du FBI qui enquête depuis l’été dernier dans cette affaire mêlant politique et espionnage. Le ministre de la Justice, Jeff Sessions, proche du président, avait dû se récuser en mars dans cette enquête sur les ingérences russes dans la campagne présidentielle de 2016, après avoir reconnu avoir rencontré l’ambassadeur russe à deux reprises l’an dernier.

Donald Trump, qui se plaignait encore le matin d’être maltraité par les médias, a réagi sèchement par voie de communiqué sans mentionner Robert Mueller. « Comme je l’ai dit à de nombreuses reprises, une enquête complète confirmera ce que nous savons déjà : il n’y a eu aucune collusion entre mon équipe de campagne et une entité étrangère », a déclaré le président, ajoutant : « je suis impatient que cette affaire se conclue rapidement ».

La nomination représente un revers et une surprise pour la Maison Blanche, pour qui l’enquête actuelle se suffisait à elle-même. Concrètement, Robert Mueller devient le chef de l’enquête et sera beaucoup plus indépendant qu’un procureur normal ou que le patron du FBI. Il ne peut être démis que pour faute. Dans un consensus rare, élus républicains et démocrates ont applaudi sa nomination. « Bob était un bon procureur fédéral, un grand directeur du FBI et on ne pourrait pas trouver de meilleure personne pour assumer cette fonction », a déclaré la sénatrice démocrate Dianne Feinstein. « Mueller est un superbe choix. Un CV impeccable. Il sera largement accepté », a tweeté l’élu républicain Jason Chaffetz. « Un choix excellent », a abondé la sénatrice républicaine Susan Collins. « Nous avons besoin des faits », a dit le président républicain de la Chambre Paul Ryan.

Robert Mueller est chargé d’enquêter sur « tout lien et/ou coordination entre le gouvernement russe et des individus associés à la campagne du président Donald Trump », mais aussi « tout sujet » découlant de ces investigations, ce qui lui donne de facto les coudées franches. C’est un magistrat équipé de pouvoirs similaires, Kenneth Starr, qui avait failli faire tomber le président Bill Clinton dans l’affaire Whitewater, devenue affaire Monica Lewinsky, dans les années 1990.

L’étau se resserre

Les élus démocrates du Congrès ont crié victoire, bien que certains estiment qu’il ne s’agisse que d’une première étape et réclament la création d’une commission spéciale sur la Russie, au mandat plus large que la stricte enquête policière. L’opposition réclamait unanimement la nomination d’un procureur spécial depuis le limogeage soudain du directeur du FBI James Comey, le 9 mai, soupçonnant une tentative d’entrave à la justice.

Depuis cette éviction brutale, la presse a rapporté que Donald Trump aurait fait pression sur Comey pour qu’il classe le volet de l’enquête concernant Michael Flynn, son éphémère conseiller à la sécurité nationale soupçonné de jeux troubles avec les Russes. Il aurait refusé, mais consigné cette conversation dans des notes qui ont commencé à fuiter dans les médias. Donald Trump, qui a démenti toute pression sur James Comey, a admis dans une interview que le limogeage était lié à son exaspération vis-à-vis de l’enquête sur les ingérences russes. Comey a été invité à s’expliquer lors d’auditions publiques au Congrès mais n’avait pas encore accepté mercredi soir. Le New York Times a rapporté mercredi soir que Michael Flynn avait informé l’équipe du président élu dès le 4 janvier -avant la prise de fonctions du 45e président des États-Unis- qu’il faisait l’objet d’une enquête fédérale, ce qui n’a pas empêché sa nomination à un poste sensible qu’il a dû quitter le 13 février.

A ces événements s’ajoutait une affaire distincte, reflétant selon les détracteurs de Trump son incapacité à exercer la fonction suprême. Il aurait donné au chef de la diplomatie et à l’ambassadeur russes le 10 mai des informations secrètes sur un projet d’opération du groupe État islamique, déclenchant la consternation parmi les élus et dans les milieux du renseignement.

Le Quotidien/AFP