Un ex-député russe Denis Voronenkov, réfugié en Ukraine et recherché dans son pays pour « escroquerie », a été assassiné jeudi en plein centre de Kiev. Les autorités ukrainiennes y voient la main du Kremlin, des accusations jugées « absurdes » à Moscou.
Denis Voronenkov se trouvait avec son garde du corps devant l’hôtel Premier Palace, lorsqu’un « inconnu » a tiré sept ou huit fois, a déclaré aux journalistes Andreï Grichtchenko, patron de la police de Kiev. L’ex-député a été blessé mortellement « trois ou quatre fois au ventre et au cou », a-t-il déclaré, précisant que la police a retenu la piste d’un « assassinat commandité ». Le tueur et le garde du corps ont été blessés dans un échange de tir. Tous les deux se trouvent à l’hôpital.
« L’assassinat perfide dans le centre de Kiev de Denis Voronenkov est un acte de terrorisme d’État de la part de la Russie, qu’il avait dû quitter pour ses convictions politiques », a rapidement accusé le président ukrainien Petro Porochenko. Ceci parce qu’il était l’un des « principaux témoins de l’agression contre l’Ukraine et du rôle de Viktor Ianoukovitch dans l’entrée des troupes russes en Ukraine ».
« Élucubrations » et accusations « absurdes », a aussitôt rétorqué le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, qui a dit « espérer que le criminel et les commanditaires soient retrouvés ».
Accusé d’escroquerie et de corruption
Ancien député communiste, Denis Voronenkov avait fui en octobre 2016 en Ukraine avec sa femme Maria Maksakova, ancienne députée du parti présidentiel Russie unie et chanteuse d’opéra. Il avait reçu en décembre la citoyenneté ukrainienne après avoir témoigné contre l’ancien président pro-russe Viktor Ianoukovitch, chassé du pouvoir par après les manifestations réprimées dans le sang en février 2014. « Je considérais qu’il était de mon devoir d’aider mon pays et d’exposer ce salaud », avait déclaré Voronenkov dans un entretien à la presse ukrainienne.
L’ex-député s’était également désolidarisé de l’annexion de la Crimée par Moscou, alors qu’il avait voté pour, et comparé la Russie actuelle à « l’Allemagne nazie ». « La Russie est un État qui élimine les gens. Que faut-il faire, vivre en permanence dans la peur ? », avait-il lancé dans cet entretien. Ces propos, qui ont causé l’indignation dans son pays natal, sont à l’origine selon lui d’accusations d’ « escroquerie » lancées à son encontre par le Comité d’enquête russe. L’ancien parlementaire était également accusé de corruption par le Fonds de lutte contre la corruption dirigé par l’opposant russe Alexeï Navalny, qui s’étonnait qu’il puisse acheter cinq appartements, cinq voitures et une maison de vacances avec son seul salaire de député.
Denis Voronenkov avait été averti par les services de sécurité ukrainiens de « menaces » pesant contre sa vie. « Quand j’ai entendu ça, je l’ai pris au sérieux », avait-il confié. « Si je vais en Russie, je serai arrêté immédiatement. Je ne me fais aucune illusion à ce sujet. »
Le Quotidien/AFP