Les rebelles prorusses, comme les forces de Kiev, assurent procéder au retrait de toutes leurs armes lourdes aux abords de la ligne de front en Ukraine. Mais ce retrait très attendu par une population éreintée par des mois de conflit, est difficile à contrôler sur le terrain.
Jusqu’à présent, les avis divergent quant au retrait effectif des armes ou non. (Photos : AFP)
« Il faut retirer ces armes, des deux cotés. J’ai vécu sous les bombardements pendant sept mois alors je peux vous dire que c’est très important », lance Tamara Slivinskaïa, 61 ans. Elle fait la queue pour récupérer un carton d’aide alimentaire sur la place Lénine, à Debaltseve, une ville dévastée par des semaines de combats et désormais aux mains des séparatistes. « On dit que les rebelles les retirent et que les Ukrainiens ne font rien », poursuit-elle. « Tant que je ne l’ai pas vu de mes propres yeux, je ne sais pas si c’est vrai », affirme Tamara, résumant les doutes autour de ce retrait.
Les accords de paix de Minsk signés en février prévoient le retrait de « toutes les armes lourdes par les deux parties » afin d’établir une zone tampon d’une profondeur de 50 kilomètres à 140 kilomètres, en fonction du type d’armes. Le processus a démarré avec du retard mais depuis plusieurs jours, les deux parties assurent qu’il est en cours, le cessez-le-feu étant relativement respecté.
Les forces ukrainiennes « ont terminé la première étape du retrait des armes lourdes de la ligne de front. Il s’agit des canons de 100 millimètres. La deuxième étape pourra commencer dès qu’on en aura reçu l’ordre », avait déclaré samedi un porte-parole militaire ukrainien, Anatoli Stelmakh. De son côté, le dirigeant rebelle Alexandre Zakhartchenko, a affirmé jeudi que ses forces avaient déjà « retiré 90% » de leurs armes lourdes.
> Mouvement ou retrait ?
Chargée du contrôle de ce retrait, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui a plus de 400 observateurs dans l’est de l’Ukraine, n’a cependant jusqu’à présent pas pu confirmer sa tenue. L’OSCE « observe » bien « des mouvements » mais il « est encore trop tôt pour dire que le processus a bien lieu », a dit vendredi un porte-parole de l’organisation, Michael Bociurkiw. « Nous réclamons un inventaire des armes qui existent et une liste des routes empruntées et des lieux où ils comptent conserver les armes ».
Depuis plusieurs jours, dans leurs compte-rendus, les observateurs décrivent les mouvements d’armes auxquels ils ont pu assister. Parfois, comme samedi, la mission décrit un processus précis. Elle a observé vendredi, à 5 km à l’est de Donetsk, « un convoi » constitué « de cinq lance-roquettes multiples Grad (…) s’éloignant de la ligne de front » pour « rejoindre un lieu présenté » par les rebelles « comme étant sa destination finale ». Et qu’elle « a l’intention de surveiller quotidiennement » par la suite.
Mais dans d’autres cas, il est très difficile de dire si les mouvements correspondent ou non à un retrait. A Ilovaïsk, dans la zone rebelle, l’OSCE indique qu’elle « a vu huit camions de type militaire rouler vers le sud » mais sans pouvoir donner plus de précisions. Près de Lougansk, les observateurs n’ont pas été autorisés à suivre un convoi jusqu’à sa destination finale.
> Mission délicate
« C’est extrêmement délicat pour ces observateurs », juge une source locale à Donetsk qui les a vus à l’œuvre. « Personne ne les connaît et tout d’un coup, il faut leur donner des informations ultra-confidentielles : le nombre, la localisation et le type d’armes que vous avez. Tous les militaires ont peur de tomber sur des espions », dit cette source. « Ajoutez à cela que le territoire à couvrir est gigantesque et que ces observateurs ont parfois le droit d’aller quelque part un jour et plus le lendemain », poursuit-elle.
Les journalistes aussi, sont incapables d’attester du retrait effectif des armes lourdes. Mercredi, les séparatistes prorusses ont montré à la presse ce qu’ils ont présenté comme le « retrait » de 14 canons mobiles de 122 mm ayant quitté selon eux la ligne de front. Mais le convoi qui a été vu quittant Obilné et roulant vers le sud dans la matinée roulait dans l’autre sens dans la même zone quelques heures après, selon d’autres journalistes occidentaux.
AFP