Le pro-occidental Volodymyr Groïsman a été nommé jeudi Premier ministre pour mettre fin à la crise politique en Ukraine et débloquer l’aide occidentale versée à ce pays ravagé par un conflit armé avec les séparatistes prorusses et par l’impasse économique.
257 députés – 226 étaient nécessaires – ont voté en faveur de la résolution confirmant la nomination de M. Groïsman, président du parlement et fidèle du président Petro Porochenko, à la tête du gouvernement en remplacement d’Arseni Iatseniouk, critiqué pour la lenteur des réformes et des scandales de corruption.
Avant le vote, M. Groïsman devenu à 38 ans le plus jeune Premier ministre de l’histoire de l’Ukraine, a promis d' »accélérer les réformes européennes » et la lutte contre la corruption qu’il a citée parmi les principales « menaces » pour cette ex-république soviétique.
« Je jure que ce gouvernement (…) ne montrera aucune tolérance à l’égard de la corruption! » a-t-il lancé. « Je jure de servir le peuple ukrainien afin que ni vous, ni le peuple, ni le président n’aient honte de mon travail! », a-t-il déclaré aux députés.
M. Groïsman a aussi mis en garde contre « le populisme, qui représente une menace pour l’Ukraine non moindre que l’ennemi dans l’Est de notre pays », en référence aux séparatistes prorusses, ce qui a suscité les applaudissements des députés. « Je vais vous montrer ce que c’est que de gérer l’Etat! » a-t-il encore lancé.
Peu avant le vote, le président Porochenko avait pour sa part assuré les députés que le nouveau cabinet poursuivrait la politique de l' »intégration européenne ».
Le chef de l’Etat a aussi souligné la nécessité pour le nouveau gouvernement d’obtenir la reprise de l’aide financière occidentale suspendue depuis des mois en raison notamment de la crise politique, le travail du gouvernement étant de facto bloqué après une motion de censure avortée en février.
La reprise de ce soutien financier dont la part de lion relève du Fonds monétaire international (FMI) est pourtant cruciale pour l’Ukraine ravagée par une gravissime crise économique et le conflit armé avec les séparatistes dans l’Est, qui a fait plus de 9.000 morts et 1,5 million de déplacés en deux ans.
« Je souligne la nécessité impérative et sans alternative de poursuivre la coopération avec le FMI » et les autres donateurs internationaux « qui assurent le soutien financier des réformes ukrainiennes », a ainsi déclaré le président.
« Nous devons passer d’une stratégie de survie, absolument justifiée dans les années 2014-2015, à une stratégie de croissance accélérée », a-t-il fait valoir.
La procédure de vote – notamment le fait d’entériner la démission de M. Iatseniouk et la nomination de son successeur par la seule et même résolution – a suscité des critiques de certains députés, y compris ceux du camp présidentiel dont plusieurs membres ont refusé de voter.
Pour obtenir la nomination du nouveau Premier ministre et pallier la défection de certains de ses membres, la coalition a dû faire appel à une quarantaine de députés proches des oligarques, déclenchant les critiques de parlementaires qui ont dénoncé un « complot ».
Cette situation met en lumière la fragilité du soutien parlementaire pour le nouveau cabinet, ce qui risque de le rendre dépendant de la coopération avec les oligarques pourtant accusés par beaucoup de s’enrichir aux frais de la population.
M. Groïsman dirigeait depuis fin 2014 le Parlement ukrainien, après avoir été pendant plusieurs mois vice-Premier ministre au sein du gouvernement de M.Iatseniouk.
Avant sa nomination au gouvernement dans la foulée du soulèvement pro-européen du Maïdan, ayant débouché en février 2014 à la chute du régime prorusse, il avait été pendant huit ans avec succès maire de Vinnytsya, ville de 370.000 habitants dans le centre-ouest de l’Ukraine considérée comme une place forte du président Porochenko.
Après sa nomination, les députés doivent procéder à l’annonce du nouveau cabinet dans lequel plusieurs membres du gouvernement Iatseniouk devraient être reconduits et dont la composition a été pendant plusieurs jours au coeur de difficiles tractations.
Plusieurs ministres réformateurs dont notamment la ministre des Finances d’origine américaine Natalie Jaresko, très prisée par les Occidentaux et des experts, devraient quitter leurs postes.
Le Quotidien / AFP