Le président américain Donald Trump a dévoilé mardi son plan de paix pour le Proche-Orient fondé sur une solution à « deux États » dans lequel il accorde à Israël nombre de concessions qui devraient susciter de vives réactions dans le camp palestinien.
« Ma vision présente (…) une solution réaliste à deux États », a lancé Donald Trump en donnant des garanties inédites à son « ami » Benjamin Netanyahu. Celui-ci a salué « une journée historique ». Affichant son optimisme sur le devenir de ce projet « très détaillé » de 80 pages, le locataire de la Maison Blanche a estimé qu’il pouvait permettre de faire « un grand pas vers la paix ».
Un plan de paix que le Hamas, premier à réagir dans le camp palestinien, a immédiatement rejeté. Le futur État palestinien ne verrait le jour que sous plusieurs « conditions », dont « le rejet clair du terrorisme », a immédiatement souligné le milliardaire républicain, détaillant un projet qui avait été rejeté d’avance, avec force, par les Palestiniens. Jérusalem restera « la capitale indivisible d’Israël », a-t-il par ailleurs assuré, restant évasif sur les moyens de concilier cette promesse avec la proposition qu’il a reprise à son compte de créer une capitale de l’État palestinien à Jérusalem-Est.
Mise en garde lancée aux Palestiniens
Le Premier ministre israélien a de son côté souligné que le plan de la Maison Blanche octroierait à Israël la souveraineté sur la vallée du Jourdain, vaste zone stratégique de la Cisjordanie occupée où l’armée israélienne vient de renforcer sa présence. Martelant sa conviction que les Palestiniens méritaient « une vie meilleure », Trump leur a aussi lancé une mise en garde. Il a annoncé avoir envoyé une lettre au président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas l’exhortant à saisir « une chance historique », et peut-être « la dernière », d’obtenir un État indépendant. « Je lui ai expliqué que le territoire prévu pour son nouvel État resterait ouvert et sans développement » de colonies israéliennes « pendant une période de quatre ans », a-t-il précisé.
L’ancien homme d’affaires de New York, qui se targue d’être un négociateur hors pair, avait confié au printemps 2017 à son gendre et conseiller Jared Kushner, novice en politique, l’épineuse tâche de concocter une proposition susceptible d’aboutir à « l’accord ultime » entre Israéliens et Palestiniens. L’objectif : réussir là où tous ses prédécesseurs ont échoué. Mais la partie s’annonce très difficile.
Selon de hauts responsables palestiniens, le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a refusé au cours des derniers mois les offres de dialogue du président américain et juge son plan « déjà mort ». Et le Premier ministre palestinien, Mohammed Shtayyeh, a appelé par avance la communauté internationale à boycotter le projet, contraire selon lui au droit international. « Ce n’est pas un plan de paix pour le Moyen-Orient », a-t-il martelé, jugeant que l’initiative visait avant tout à protéger « Trump de la destitution » et « Netanyahu de la prison ».
Un État palestinien « démilitarisé »
Signe que le calendrier est délicat, à un mois de nouvelles élections en Israël où Benjamin Netanyahu est aux prises avec une inculpation pour corruption, le locataire de la Maison Blanche a aussi reçu lundi son principal opposant, Benny Gantz. Mais c’est avec « Bibi » qu’il a choisi d’apparaître devant les caméras, et le Premier ministre israélien, qui se rendra dès mercredi à Moscou pour informer le président russe Vladimir Poutine des détails du plan, n’a pas dissimulé son enthousiasme. « Monsieur le président, votre accord du siècle est la chance du siècle », a-t-il lancé depuis la Maison Blanche.
Dimanche, Saëb Erekat, secrétaire général de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), a indiqué qu’il se réservait le droit de se retirer des accords d’Oslo, qui encadrent leurs relations avec Israël. Aux termes de l’accord intérimaire dit d’Oslo II de septembre 1995 entre l’OLP et Israël, la Cisjordanie avait été partagée en trois zones : A, sous contrôle civil et sécuritaire palestinien, B, sous contrôle civil palestinien et sécuritaire israélien, et C, sous contrôle civil et sécuritaire israélien.
Or le plan de Donald Trump « va transformer l’occupation temporaire en occupation permanente », a dénoncé Saëb Erekat. Selon la Maison Banche, le projet propose un État palestinien « démilitarisé ». Le projet américain avait aussi été rejeté par avance par le Hamas, qui contrôle la bande de Gaza, enclave palestinienne de deux millions d’habitants séparée géographiquement de la Cisjordanie, où se limite l’autorité de Mahmoud Abbas. Le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a mis en garde contre une « nouvelle phase » de la lutte palestinienne contre l’occupation israélienne.
LQ/AFP
Réunion de la Ligue arabe samedi au Caire
Une réunion extraordinaire de la Ligue arabe, en présence du président palestinien, Mahmoud Abbas, se tiendra samedi au Caire afin d’évoquer le plan de paix pour le Proche-Orient que Washington devait dévoiler ce mardi, a indiqué son secrétaire général, Hossam Zaki. Cette « réunion extraordinaire », en présence de Mahmoud Abbas et des ministres des Affaires étrangères des pays membres, se tiendra à la suite « d’une demande palestinienne », est-il précisé dans un communiqué.
Maintes fois reporté, le plan de paix doit être dévoilé à la Maison-Blanche par le président américain Donald Trump et le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, en l’absence de la partie palestinienne, qui juge l’administration Trump partiale.
Le grand imam de la mosquée d’al-Azhar, grande institution de l’islam sunnite, a de son côté violemment critiqué ce plan lors d’une conférence internationale pour la réforme du discours religieux au Caire. « Nous n’avons plus d’identité (…) en tant qu’Arabes et musulmans. Nous ne sommes plus rien. (…). Je me suis senti terriblement déshonoré quand j’ai vu (Donald) Trump avec (le Premier ministre) israélien », a affirmé mardi le grand imam Ahmed al-Tayeb. « Ce sont eux qui prévoient, discutent, décident et résolvent nos problèmes. Il n’y a aucun Arabe ou musulman », a-t-il déploré.