La guerre contre l’Ukraine est aussi une guerre menée contre l’architecture de paix européenne. Elle bouleverse le monde. La position de la Suisse, pays neutre mais pas inactif, est claire : face à l’attaque de la Russie, nous ne pouvons pas rester sans réagir. Le Conseil fédéral suit une ligne de conduite ferme, dans un esprit d’entraide et de solidarité, afin d’accompagner notre pays dans ces moments difficiles.
À lire juste ici ➡ La diplomatie russe fâchée par une tribune libre parue dans Le Quotidien
Chères lectrices, chers lecteurs,
Le 8 avril prochain, j’aurai à nouveau le grand plaisir de rencontrer le ministre des Affaires étrangères et européennes du Luxembourg, M. Jean Asselborn, à Vaduz au Liechtenstein. Ceci dans le cadre des rencontres annuelles des ministres des Affaires étrangères germanophones. Une occasion qui nous permettra d’avoir un échange approfondi sur la situation en Ukraine.
Dans cette perspective, et en raison des excellentes relations bilatérales entretenues par la Suisse et le Luxembourg ainsi que de l’amitié et l’estime que j’éprouve pour votre pays, que je considère comme un pays voisin, je souhaite partager avec vous quelques considérations sur la position de la Suisse et sa politique de neutralité, ses bons offices ainsi que les effets inévitables du conflit qui se ressentent également dans mon pays.
L’offensive brutale de la Russie à l’encontre de l’Ukraine sonne le glas d’une ère : depuis la Deuxième Guerre mondiale, aucun pays souverain et démocratique n’avait subi d’attaque sur notre continent. Du jour au lendemain, l’extrémité Est de l’Europe s’est transformée en poudrière.
Les conséquences sont terribles pour la vie des personnes sur le sol ukrainien, mais aussi pour le peuple russe, l’Europe et jusque dans les pays les plus pauvres, désormais menacés de famine, car privés du blé russe et ukrainien.
Alors que la confrontation entre démocratie et barbarie atteint des sommets, le monde libre réagit avec une impressionnante cohésion. Pour le gouvernement suisse, la situation est claire : la Suisse ne peut pas tolérer cette guerre sans réagir, elle doit prendre position.
Par la voie de sanctions, par l’envoi de biens de premiers secours, par des initiatives diplomatiques, et enfin par une réponse à la hauteur du destin tragique de millions de réfugiés, faisant ainsi écho à la solidarité extraordinaire dont font preuve d’innombrables Suisses et Suissesses. C’est là l’expression concrète de notre tradition humanitaire.
Cette guerre est mue par une folie dévastatrice qui fait voler en éclats tous les principes et les valeurs de notre civilisation. C’est pourquoi le Conseil fédéral a adopté dans leur intégralité les sanctions de l’UE. Cette décision ferme a été prise dans le strict respect du droit de la neutralité.
Cela signifie que la Suisse ne soutient aucun belligérant sur le plan militaire, que ce soit par la mise à disposition de troupes ou par l’envoi d’armes.
La politique de neutralité, quant à elle, ne constitue pas un dogme, elle est un instrument flexible de notre politique extérieure et de notre politique de sécurité. Intimement lié à la notion de solidarité ainsi qu’à nos valeurs, cet instrument est axé non seulement sur nos intérêts en tant que pays neutre, mais aussi sur les intérêts de la communauté internationale.
Il existe donc une marge de manœuvre. Neutralité ne signifie pas indifférence. La Russie a massivement violé l’interdiction du recours à la force, un principe ancré dans le droit international. En restant inactive, la Suisse aurait fait le jeu de l’agresseur. C’est sur ce critère que s’est fondé le Conseil fédéral pour prendre ses décisions.
Une fois les armes déposées viendra le temps de l’après. L’Histoire nous l’apprend. Afin de tendre vers une issue pacifique, la Suisse met à la disposition des belligérants et des organisations internationales sa diplomatie et ses bons offices. Il s’agit là d’un pilier de notre politique extérieure, au même titre que la défense des intérêts de notre pays.
Nous devons donc, avec toute la modestie d’un petit État comme le nôtre, nous mobiliser aux côtés des acteurs de la politique mondiale de sécurité afin de trouver des solutions à ce terrible conflit. Nous pouvons notamment jouer un rôle de médiateur.
Tout en soutenant les sanctions de manière solidaire, nous pouvons ouvrir la voie au dialogue, proposer des solutions, encourager cette voie diplomatique qui a fait notre réputation dans le monde entier.
Cette guerre plonge dans une détresse insoutenable les réfugiés, principalement des femmes et des enfants. Ce n’est qu’ensemble, en mettant en commun nos efforts, que l’Occident pourra relever ce défi. La Suisse a un rôle important à jouer notamment en maintenant à long terme ses capacités d’accueil et d’intégration.
C’est pourquoi nous avons activé un statut particulier de protection (appelé «statut S») afin de pouvoir accueillir les réfugiés ukrainiens rapidement et sans complication.
Le Luxembourg a aussi très rapidement activé un statut de protection temporaire pour les personnes fuyant le conflit en Ukraine. Ceux-ci pourront ainsi trouver un soutien au sein de la population. Ils pourront aussi, espérons-le, redonner un sens à leur vie. Personne ne sait combien de temps durera la guerre, ni quand un retour au pays sera possible.
Ce qui est sûr, c’est que des projets de reconstruction feront également partie de notre réponse face au destin tragique des réfugiés.
Ce conflit nous bouleverse. Il impacte notre quotidien, au Luxembourg comme en Suisse. Il faudra compter sur des effets à long terme. La dépendance à l’égard du pétrole, du gaz et autres matières premières russes pèse lourd du point de vue géopolitique. Nous serons confrontés à une inflation et une hausse des prix de l’énergie d’une manière durable et sensible.
Force est de constater que nous subirons en Europe les conséquences de cette guerre. Le 24 février, la face du monde a changé, et pas de la meilleure manière. Il nous faut défendre vaillamment et sans relâche la liberté et la démocratie. Cela a un prix. Un prix que la Suisse est prête à assumer.
Par Ignazio Cassis, président de la Confédération suisse, Chef du Département fédéral des affaires étrangères
La Suisse n’a de leçons à recevoir de personne en matière de droits de l’homme. La Suisse n’a jamais attaqué un autre pays.
Je vous rappelle que le souverain de la Confédération Helvétique n’est pas Monsieur Cassis mais bien le peuple, et ce dernier n’a nullement été considéré dans la prise de décision du Conseil Fédéral.
Bien des Suisses se sentent bafoués par cette décision qui prend ses aises avec la neutralité suisse qui a toujours été garante de la stabilité politique du pays mais également de sa crédibilité diplomatique.
Faire des arrangements dans la définition en disant que la neutralité est maintenue car la Suisse ne soutient pas militairement un belligérant est parfaitement hyprocrite car elle soutient les sanctions à l’encontre d’un belligérant tout de même. Les embargos et les sanctions sont des outils de guerre, nous vous en déplaise.
Si Monsieur Cassis veut continuer à vivre dans une chimère en pensant que tous les pays qui étaient susceptibles d’accorder leur confiance à la Suisse comme place diplomatique et politique neutre, il peut continuer à mettre la tête dans le sable avec ses collègues du conseil. La vérité est tout autre et ça, l’avenir nous le dira. Occulter la guerre mener en Yougoslavie doit remuer bien des émotions chez les réfugiés qui ont afflué en nombre à l’époque et qui sont des citoyens suisses à part entière même si eux, n’ont pas eu droit aux avantages nombreux des réfugiés ukraniens. La mémoire de ce monsieur est vraiment sélective.