Le régime syrien a annoncé jeudi l’ouverture d’un corridor pour permettre aux civils le souhaitant de quitter la région d’Idleb, où une campagne militaire du pouvoir et de l’allié russe a fait des centaines de morts et entraîné un exode de la population.
Soutenu par l’aviation russe, le régime de Bachar al-Assad bombarde quasiment sans cesse depuis fin avril la province d’Idleb et des zones voisines, dans le nord-ouest du pays en guerre, dominées par les jihadistes de Hayat Tahrir al-Cham (HTS) et abritant des groupes rebelles.
Près de 900 civils ont péri dans les bombardements aériens et à l’artillerie sur Idleb et les secteurs adjacents aux mains de HTS et des insurgés dans les provinces voisines d’Alep, de Hama et de Lattaquié, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
Le « corridor » annoncé est destiné aux habitants d’une région composée de plusieurs villages, située à cheval entre le sud d’Idleb et le nord de Hama et qui se retrouve assiégée par les pro-régime après leur progression ces derniers jours.
Tout au long de ses reconquêtes ces dernières années, le pouvoir avait ouvert de tels « corridors » pour permettre aux civils de quitter des bastions rebelles et rallier les régions gouvernementales ou aux mains de ses adversaires. Craignant toutefois les arrestations, les habitants rechignent généralement à les emprunter.
« La Syrie annonce l’ouverture d’un corridor humanitaire dans la région de Sourane dans le nord de la province de Hama, pour permettre aux citoyens le souhaitant de sortir des régions sous contrôle des terroristes dans le nord de Hama et le sud d’Idleb », ont indiqué les Affaires étrangères à Damas.
La télévision d’État a diffusé des images montrant des bus verts et des ambulances stationnant à Sourane, sans préciser quand pourraient commencer les sorties.
Sommet tripartite Iran-Russie-Turquie à Ankara
L’initiative intervient alors que la Turquie, frontalière de la province d’Idleb et qui soutient des groupes rebelles syriens, a annoncé un sommet le 16 septembre à Ankara entre les présidents russe, iranien et turc axé sur la Syrie.
Elle a lieu en outre au lendemain de la reconquête par le régime de Khan Cheikhoun, une ville du sud d’Idleb.
« Avec la conquête de Khan Cheikhoun, la Russie réaffirme son rôle de premier plan dans toute discussion sur Idleb », souligne Sam Heller, du centre de réflexion International Crisis Group. Pour lui, le régime et Moscou pourraient faire une pause dans les opérations pour « donner du temps à la Turquie d’offrir des concessions ».
La région concernée par le corridor englobe aussi les localités de Morek, où se trouve un poste d’observation militaire turc, et Kafr Zita, toutes deux dans la province de Hama.
La Turquie dispose de plusieurs postes d’observation militaires dans les provinces d’Idleb et de Hama.
La présidence turque a averti qu’il n’était « pas question de fermer ou de déplacer » le poste d’observation de Morek. « Tous les autres postes seront maintenus ».
Jeudi, des avions du régime ont tiré à la mitrailleuse près d’un poste turc à Idleb, selon l’agence étatique turque Anadolu.
«Villages fantômes»
Les violences depuis avril ont poussé plus de 400 000 personnes à fuir d’après l’ONU. Parmi elles, la grande majorité des habitants vivant dans la région concernée par le corridor selon l’OSDH.
Dans les environs de Maaret al-Noomane, « la plupart des villages ont été vidés de leurs habitants », a confié Abou Hussein, un habitant qui a fui depuis deux jours cette ville. « Ce sont des villages fantômes, il n’y a plus de vie, juste des avions qui bombardent », a-t-il dit. Même si selon lui de rares habitants sont restés « pour protéger leurs maisons ».
Le prochain objectif du régime semble être la ville de Maaret al-Noomane, au nord de Khan Cheikhoun, selon l’OSDH. Jeudi, des raids du régime et russes ont visé des secteurs proches. Les deux villes se trouvent sur une autoroute stratégique qui relie la capitale Damas à Alep (nord), deux villes aux mains du régime.
La région d’Idleb était censée être protégée par un accord sur une « zone démilitarisée », conclu en 2018 par Ankara et Moscou mais cet accord n’a été que partiellement appliqué.
AFP