Condamné en Afrique et dans le monde musulman, la reconnaissance du Somaliland par Israël a été grandement célébrée dimanche dans cette république autoproclamée située au nord de la Somalie.
Au Somaliland, des milliers de personnes se sont réunies au stade principal de la capitale Hargeisa pour célébrer la nouvelle dimanche. Dans la foule, nombre de participants portaient des vêtements vert-blanc-rouge, aux couleurs du drapeau du Somaliland, et scandaient : «Victoire pour le Somaliland!».
Israël a en effet annoncé deux jours auparavant la reconnaissance officielle du Somaliland, une première pour cette république autoproclamée qui a fait sécession de la Somalie en 1991. Le drapeau de l’État sécessionniste du Nord a été hissé aux côtés de celui d’Israël, dans une cérémonie retransmise en direct par les télévisions du Somaliland.
«Des célébrations massives ont lieu à Hargeisa et dans les villes de la République du Somaliland, alors que les citoyens se rassemblent fièrement pour commémorer la décision historique du gouvernement d’Israël», a commenté Abdirahman Dahir Adam Bakal, le ministère des Affaires étrangères du Somaliland sur X.
«Les gens sont heureux et sont sortis aujourd’hui pour célébrer la victoire. C’est ce qu’ils attendaient depuis si longtemps», a déclaré Shamis Mohamed, l’une des personnes présentes au rassemblement. «Je n’ai pas dormi depuis le jour où la reconnaissance a été annoncée, tellement j’étais excitée».
Une violation aux yeux de la Somalie
«On ne peut pas mesurer ce que je ressens aujourd’hui. (…) Merci Dieu pour cette victoire», s’est réjoui Abdirahman Keyse, un autre habitant de Hargeisa, qui comme Shamis Mohamed a été joint au téléphone. «Nous accueillons tous les pays qui reconnaissent notre existence», a de son côté assuré Jama Suleyman, un autre habitant. «Pour le peuple de Somalie, nos voisins ne devraient pas s’inquiéter de cette victoire : nous savons qu’ils font du bruit, mais rien n’empêchera le Somaliland de viser haut.»
Selon des autorités locales interrogées, des rassemblements se sont également tenus à Burao (centre) et Gebiley (Est).
Au même moment, le président somalien, Hassan Sheikh Mohamud, dénonçait «la plus grande des violations contre la souveraineté de la Somalie», devant le Parlement et le Sénat somaliens.
Les tentatives d’Israël «de diviser» la Somalie constituent «une menace pour la sécurité et la stabilité du monde et de la région, et elles encouragent les groupes extrémistes et les mouvements sécessionnistes» partout, a-t-il lancé. «Nous mettons en garde Israël et son Premier ministre Netanyahu contre le transfert de ses guerres du Moyen-Orient vers la Somalie», a poursuivi le chef de l’État somalien.
«La Somalie n’acceptera jamais que le peuple de Palestine soit expulsé de force de sa terre légitime vers un lieu éloigné, que ce soit la Somalie ou ailleurs», a affirmé Hassan Sheikh Mohamud. Pour sa part Bassem Naïm, membre du bureau politique du mouvement islamiste palestinien Hamas, a condamné dans un communiqué l’accord de reconnaissance mutuelle signé entre Israël et le Somaliland, y voyant «un dangereux précédant et une tentative inacceptable d’acquérir une légitimité factice auprès d’une entité fasciste occupant la Palestine».
«Pas de conflit»
Le Somaliland faisait partie d’une poignée d’États africains susceptibles d’accueillir des Palestiniens de Gaza expulsés par Israël, selon des rapports de presse datant d’il y a quelques mois, que ni les autorités du Somaliland ni le gouvernement israélien n’avaient commenté.
Depuis le rassemblement d’Hargeisa, le ministre de la Présidence du Somaliland, Khadar Hussein Abdi, a toutefois balayé ces craintes. La reconnaissance du pays «et l’arrivée d’Israël ne créeront pas de violence, n’apporteront pas de conflit et ne nuiront jamais à quiconque», a-t-il assuré.
«Cela ne nuira ni à la Somalie, ni aux Arabes, ni à qui que ce soit», a-t-il avancé, ajoutant que la collaboration avec Israël se fera «dans les domaines de l’amélioration de notre économie, de la production agricole, dans lesquels Israël excelle, et de l’eau».
Le territoire du Somaliland (175 000 km2 soit près du tiers de la France) est situé à la pointe nord-ouest de la Somalie.
Il a déclaré son indépendance en 1991, alors que la République de Somalie sombrait dans le chaos après la chute du régime militaire de l’autocrate Siad Barre.
La république autoproclamée fonctionne depuis en autonomie, avec ses propres monnaie, armée et police, et se distingue par sa relative stabilité comparée à la Somalie, minée par l’insurrection islamiste des shebab et les conflits politiques chroniques.