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Retraites en France : dans l’attente fébrile du couperet constitutionnel


Est-ce qu'une validation complète signerait au contraire la fin du mouvement de contestation ? "On le décidera ensemble", avec l'intersyndicale, "mais il est clair que la CFDT ne fera pas des manifestations pendant six mois", a répondu le secrétaire général. (Photo AFP)

J-2 : le camp présidentiel comme les opposants à la réforme des retraites ont en ligne de mire les décisions très attendues du Conseil constitutionnel vendredi, qui détermineront la suite de la bataille, au lendemain d’une douzième journée de mobilisation.

Les projecteurs sont braqués en France sur le Conseil constitutionnel, qui doit mettre fin vendredi au suspense « en fin de journée » : Va-t-elle censurer la réforme ? Seulement une partie ? Et donnera-t-elle son feu vert à la procédure d’un référendum d’initiative partagée (RIP), chère à la gauche ? « Il faut attendre la décision et s’en remettre à elle », estime-t-on du côté de l’Élysée, tandis qu’Élisabeth Borne poursuit ses consultations pour préparer l’après.

En attendant, c’est l’heure des spéculations, même si partisans comme opposants à la réforme s’attendent pour la plupart à ce qu’au moins quelques mesures soient retoquées. C’est notamment le cas de l' »index seniors », un nouvel indicateur obligatoire devant mettre au jour les pratiques des grandes entreprises en matière d’emploi des salariés de plus de 55 ans. Il pourrait être qualifié selon de nombreux observateurs de « cavalier » législatif, c’est-à-dire de mesure n’ayant rien à faire dans un texte budgétaire.

Le rejet de mesures de ce type serait un moindre mal pour l’exécutif, pour qui l’essentiel est que soit validé juridiquement le coeur du texte: le recul de l’âge légal de la retraite de 62 à 64 ans, qui cristallise et fédère la contestation.

Olivier Véran « confiant » dans la décision des Sages

La décision du Conseil constitutionnel « sera l’aboutissement du cheminement démocratique », a relevé mercredi le porte-parole du gouvernement Olivier Véran. Il s’est dit « confiant » dans la décision des Sages, assurant que « beaucoup de temps » a été consacré à l’examen du texte.

« J’ai un degré de confiance assez élevé sur le fait que la procédure toute entière ne sera pas annulée », a confié de son côté un ministre mardi, en ligne avec le pronostic le plus récurrent au sein du camp présidentiel. Mais « il faut quand même un peu se méfier de Laurent Fabius », l’ancien ponte socialiste qui préside le Conseil constitutionnel, tempère un député Renaissance.

D’autres relèvent la présence parmi les Sages d’Alain Juppé, qui avait dû renoncer en 1995 à sa réforme des retraites au terme d’un grand conflit social, ou encore de l’ancienne ministre MoDem Jacqueline Gourault.

La confiance est de mise à gauche

« Il faut réfléchir à ce que les membres du Conseil constitutionnel soient véritablement totalement détachés, totalement indépendants dans leur nomination », a pour sa part relevé mercredi sur BFMTV Marine Le Pen (RN), se disant « modérément optimiste » quant à la décision de vendredi. Le Conseil « va prendre sa décision en droit, c’est ça qui est important », estime le chef de file des députés MoDem, Jean-Paul Mattei.

A gauche, la confiance reste de mise pour une « censure complète » du texte, comme l’ont rappelé mardi les députés de la Nupes, affichant leurs « grands espoirs ». Mais si la réforme est validée, « ça n’enlève rien au rejet démocratique, au rejet politique, au rejet social », a résumé mercredi Manon Aubry, eurodéputée LFI.

Cette décision « est attendue car elle va faire jurisprudence » quant au recours à un budget rectificatif de la Sécurité sociale (PLFRSS) pour mener une « réforme de ce type », a souligné l’Insoumis Éric Coquerel, président de la commission des Finances.

L’alternative du RIP

Même en cas de validation de l’essentiel du texte, la gauche fonde aussi ses espoirs dans un possible feu vert à sa demande de RIP. Cette procédure pourrait ouvrir la voie à un référendum sur une proposition de loi visant à ce que l’âge de départ à la retraite ne puisse pas dépasser 62 ans. La route resterait encore longue et incertaine vers un référendum, mais elle donnerait un nouveau point d’appui à la contestation.

Si le gouvernement « passe en force et ne suspend pas la réforme pendant le temps du référendum, alors ce serait une déclaration de guerre pour plein de gens », a prévenu mercredi la secrétaire nationale d’EE-LV Marine Tondelier. Les syndicats croient aussi dans cette option du RIP, mais une censure partielle offrirait également des perspectives.

Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, a ainsi suggéré que dans cette hypothèse le président de la République se saisisse de l’article 10 de la Constitution, qui permettrait d' »aller vers une nouvelle lecture à l’Assemblée nationale » avant une promulgation.

Est-ce qu’une validation complète signerait au contraire la fin du mouvement de contestation ? « On le décidera ensemble », avec l’intersyndicale, « mais il est clair que la CFDT ne fera pas des manifestations pendant six mois », a répondu le secrétaire général.