Ce mercredi soir, Elizabeth II, 89 ans, sera la monarque britannique ayant régné le plus longtemps sur le pays. Un record jusqu’à présent détenu par la reine-impératrice Victoria. Elle a côtoyé l’empereur Hirohito, reçu des centaines de chefs d’État et adoubé douze Premiers ministres : Elizabeth II va entrer dans l’histoire et compte fêter ce record sans faste particulier, malgré l’effervescence du public.
Vers 17h30 ce mercredi après-midi, la Queen dépassera, selon les calculs de Buckingham Palace, les 63 ans, 7 mois et 2 jours sur le trône de sa trisaïeule, la reine-impératrice Victoria, au pouvoir entre 1837 et 1901. L’heure précise est impossible à déterminer car on ne sait pas exactement à quel moment son règne a véritablement commencé. Son père, le roi George VI, est décédé dans son sommeil à une heure non déterminée, au milieu de la nuit.
À l’échelle mondiale, le record du règne le plus long est toujours détenu par le roi de Thaïlande Bhumibol Adulyadej, âgé de 87 ans, qui est monté sur le trône en 1946.
Pour célébrer ce moment historique, un de plus dans sa longue carrière de monarque, la reine n’avait rien prévu au départ. «No fuss» (pas de chichi), disait-elle. «Il ne faut pas oublier que la date est calculée à partir des décès de son père et son arrière-arrière-grand-mère. Même si elle reconnaît le caractère historique, ce n’est pas pour elle une occasion de célébrer», explique une source au Palais.
Mais face à l’engouement croissant du public, elle a finalement consenti à faire une apparition publique, pour inaugurer une nouvelle ligne de chemin de fer en Écosse, où elle a l’habitude de finir ses étés, dans sa résidence de Balmoral. En compagnie du prince Philip, son époux depuis bientôt 68 ans, «mon soutien et ma force depuis toutes ces années», elle prendra place à bord d’un train à vapeur pour faire le trajet d’Edimbourg jusqu’au village frontalier de Tweedbank.
À l’arrivée, spéculent les médias britanniques, elle pourrait même se fendre d’un petit discours, un geste rarissime de sa part, en dehors des grandes occasions formelles comme son message de Noël ou l’ouverture du Parlement.
Popularité au zénith
Elle doit ensuite dîner à Balmoral en compagnie de son petit-fils, le prince William et de son épouse Kate. Son fils et premier héritier au trône, le prince Charles, sera, lui, retenu par d’autres obligations. «Prévues de longue date», avant que la reine n’accepte de donner un tour plus cérémonieux à la journée, s’est empressé de souligner un porte-parole, pour éteindre tout début de polémique.
Le fils aîné de la reine, 66 ans, détient lui aussi un record national : celui de l’héritier en devenir à l’attente la plus longue. Il risque de devoir patienter encore puisque tous les spécialistes de la monarchie s’accordent à dire que sa mère, toujours bon pied bon œil à 89 ans, n’abdiquera jamais. «Elle régnera jusqu’à son dernier souffle», souligne l’historienne Kate William. Selon elle, les plus de 23 300 jours passés sur le trône, plutôt que de provoquer une certaine lassitude, suscitent au contraire, respect et admiration.
Abîmée dans les années 1990 par les divorces de trois de ses quatre enfants et son absence de réaction face à la mort de la princesse Diana, la popularité de la reine atteint de fait des sommets inédits. Dans un sondage YouGov publié dimanche, 27 % des Britanniques la consacrent même comme la «greatest Queen», loin devant Elizabeth I (13 %) et Victoria (12 %).
La semaine dernière, l’historien David Starkey avait lancé un pavé dans la mare en déclarant que la reine Elizabeth II n’avait «jamais rien fait et jamais rien dit qui restera dans les annales». Et qu’elle se contente de multiplier les engagements publics, le plus souvent insignifiants : encore 393 l’année dernière!
La critique a provoqué une levée de boucliers des chroniqueurs royaux. Au lieu de voir le «silence» de la reine comme une faiblesse, ils préfèrent célébrer son sens du devoir et de la réserve comme une «ancre» à laquelle peut s’arrimer un peuple uni dans la tempête d’un monde en perpétuel bouleversement.
Le Quotidien / AFP
La longévité des monarques
Voici une liste de pays dont les monarques connaissent la plus grande longévité.
– THAÏLANDE : le roi Bhumibol Adulyadej, 87 ans, a accédé au trône le 9 juin 1946, après la mort de son frère dans des conditions mystérieuses, et a été couronné en 1950, sous le nom dynastique de Rama IX. Monarque constitutionnel, il est considéré comme une force morale bienveillante, dans un pays marqué par une forte instabilité politique.
– BRUNEI : le sultan Hassanal Bolkiah, 69 ans, considéré comme l’un des hommes les plus riches de la planète, règne depuis octobre 1967 sur ce petit pays enclavé en Malaisie, au sous-sol riche en hydrocarbures.
– OMAN : le sultan Qabous, 74 ans, a accédé au trône le 23 juillet 1970, en renversant son père qu’il jugeait trop conservateur. Artisan de la modernisation de ce petit pays qui contrôle, avec l’Iran, le détroit d’Ormuz, il est actuellement malade et sans héritier désigné.
– DANEMARK : la reine Margrethe II, 75 ans, a accédé au trône de la plus ancienne monarchie européenne le 14 janvier 1972, à la mort de son père.
– SUÈDE : le roi Carl XVI Gustaf, 69 ans, a succédé à son grand-père en septembre 1973, quelques mois à peine après l’accession au trône de sa cousine germaine, la reine Margrethe du Danemark.