Double coup de tonnerre dès le premier tour de la primaire de la droite: François Fillon est arrivé largement en tête, loin devant Alain Juppé, son adversaire au second tour dimanche prochain. Nicolas Sarkozy, sèchement éliminé, s’est retiré de la vie politique.
L’ex-Premier ministre arrive en tête du premier tour avec près de 16 points d’avance (44,2% des voix) sur Alain Juppé (28,3%) et Nicolas Sarkozy (20,8%), selon les chiffres fournis à 23 heures par l’entité organisatrice du scrutin, portant sur 3,66 millions de votants et 9.036 bureaux de vote.
Loin derrière suivent Nathalie Kosciusko-Morizet (2,5%), Bruno Le Maire (2,4%) Jean-Frédéric Poisson (1,4%) et Jean-François Copé (0,3%).
François Fillon réalise donc la première sensation de cette primaire. L’ancien Premier ministre, longtemps placé en quatrième position dans la plupart des enquêtes d’opinion, prend une éclatante revanche sur Nicolas Sarkozy qui l’avait ravalé au rang de « collaborateur » après l’avoir nommé à Matignon en 2007.
« Une vague », « une dynamique puissante est enclenchée ». « Ma campagne va encore s’accélérer, s’amplifier », a déclaré M. Fillon depuis son QG de campagne, avec « une pensée particulière » pour Nicolas Sarkozy qui lui a immédiatement apporté son soutien.
L’ancien président, battu d’une courte tête par François Hollande en 2012, sorti de sa retraite en 2014, subit l’une des plus retentissantes défaites de sa carrière: celui qui avait prédit un « blast » après son entrée en campagne est éliminé dès le premier tour d’un scrutin organisé par son propre parti, dont il avait reconquis la présidence en 2014.
« J’ai beaucoup d’estime pour Alain Juppé, mais les choix politiques de François Fillon sont plus proches (…). Je voterai François Fillon », a annoncé M. Sarkozy dans une déclaration teintée d’émotion depuis son QG.
L’ancien président a également demandé à ses électeurs de « ne jamais emprunter la voie des extrêmes » pour la présidentielle 2017, ciblant le Front national, et a annoncé à mots couverts son retrait de la vie politique: « il est temps pour moi maintenant d’aborder une vie avec moins de passions publiques et plus de passions privées ».
Alain Juppé, longtemps donné largement en tête par tous les instituts, se qualifie finalement en distançant Nicolas Sarkozy d’environ 250.000 voix, selon les chiffres provisoires.
Malgré un retard très conséquent, « j’ai décidé de continuer le combat », un « combat projet contre projet » contre M. Fillon, a déclaré le maire de Bordeaux qui a enregistré le ralliement de Nathalie Kosciusko-Morizet.
Très largement distancé, cinquième derrière NKM, Bruno Le Maire a quant à lui annoncé son soutien à François Fillon.
« Thatchérisation de la droite »
Un sondage Opinionway diffusé mardi donnait M. Fillon vainqueur à 54% face à M. Juppé (46%) en cas de duel au second tour. Un autre, réalisé par Ifop Fiducial et diffusé jeudi, donnait les deux concurrents à égalité (50-50).
En attendant, la première primaire ouverte de l’histoire de la droite française est déjà un succès de participation. De 3,9 à 4,3 millions de personnes auraient pris part à la consultation, selon une projection Elabe à la fermeture des bureaux de vote à 19H00, réalisée à partir des données fournies par la Haute autorité. A 17H00, plus de 2,5 millions de votants s’étaient rendus dans 70% des 10.000 bureaux de vote. En 2011, le premier tour de la primaire socialiste avait réuni, 2,66 millions de participants.
Selon le même institut, 63% des votants sont des sympathisants de la droite et du centre, contre 15% de sympathisants de gauche, 14% affirmant n’avoir aucune sympathie particulière et 8% de sympathisants du Front national.
Les sondeurs ont donné longtemps et régulièrement Alain Juppé favori, devant Nicolas Sarkozy. Mais le duel est devenu un match à trois avec la spectaculaire remontée dans les sondages ces derniers jours de François Fillon, crédité de très bonnes prestations télévisés, notamment lors des trois débats organisés entre les sept candidats.
À gauche, où l’on brocardait le « programme commun » de la droite, la riposte se prépare. Le secrétaire d’Etat Jean-Marie Le Guen a évoqué une « thatchérisation de la droite française » incarnée selon lui par François Fillon et ses mesures « qui ne pourront jamais avoir l’assentiment des électeurs de gauche » en cas de duel de second tour face à Marine Le Pen. Laquelle perd son « meilleur adversaire » en la personne de Nicolas Sarkozy.
Le Quotidien / AFP