Méfiance envers le chef du gouvernement, attachement profond à la Constitution, mécontentement général qui a déjà poussé au Brexit ou à l’élection de Donald Trump: les raisons de l’échec de Matteo Renzi à faire adopter sa réforme constitutionnelle en Italie sont multiples.
Le bouillonnant Florentin, omniprésent depuis des semaines dans les médias et sur les réseaux sociaux pour défendre « sa » réforme, est perçu comme un personnage arrogant, dont le message volontariste inspiré du « Yes we can » de Barack Obama s’est usé en 1.000 jours de pouvoir.
« Il y a une forte antipathie contre Renzi », note Antonio Noto, directeur de l’Institut de sondage et de recherches IPR Marketing. « On vote contre Renzi pour voter contre l’establishment, mais aussi contre son style ».
« Je n’aime pas Renzi. Son bilan est désastreux, il a surtout pensé à faire sa propre publicité », explique Cecila Carrara, avocate dans un cabinet international.
Comme en 2006, lorsqu’ils avaient rejeté déjà par 60% des voix une autre réforme défendue par Silvio Berlusconi, les Italiens ont montré leur réticence à toucher à l’équilibre des pouvoirs défini dans la Constitution de 1948, rédigée dans l’objectif d’empêcher tout retour du fascisme.
« La Constitution a gagné encore une fois contre l’arrogance, l’intimidation, le manque de respect pour la souveraineté populaire et les droits des citoyens », estime Carlo Smuraglia, 93 ans, président de l’association des partisans italiens.
La Constitution de 1948 a été « écrite par des gens choisis, éclairés, pas comme les politiciens que nous avons maintenant et qui ne sont pas à la hauteur », souligne Emanuela Carosi, vendeuse d’œufs dans un marché romain.
« Les familles de la classe moyenne appauvries par la crise économique, sans espoir de prospérité et de bien-être pour les enfants et les petits-enfants, ont voté non. Les jeunes sans travail, les ouvriers qui se sentent menacés par les migrants et les employés dont les salaires ne suffisent plus. C’est le peuple de la révolte », écrit Maurizio Molinari, directeur de La Stampa.
Ainsi, « sur les 100 districts au sein desquels le taux de chômage est le plus faible, le oui l’emporte à 59%. Pour les 100 districts ayant le taux de chômage le plus élevé, le non l’emporte avec 65,8% », relève Philippe Waechter, directeur de recherche économique chez Natixis asset management. Le non a d’ailleurs été encore plus fort dans le Sud défavorisé.
« La Constitution n’est pas le problème fondamental de l’Italie. C’est l’amélioration des conditions de vie de tant de gens qui souffrent et je pense que cette secousse nous fera sans doute du bien », déclare Fabrizio Sabelli, professeur d’université.
Le Quotidien / AFP