L’affaire de corruption qui poursuit l’ancien Premier ministre pourrait plomber la campagne du Parti socialiste pour les élections législatives du 4 octobre.
À quatre semaines des élections législatives au Portugal, l’opposition socialiste a perdu du terrain face à la coalition sortante de droite dans une campagne marquée par le retour de l’affaire Socrates.
Jusqu’ici très morne, l’actualité politique a été bousculée, vendredi soir, par la sortie de prison de José Socrates. Après avoir passé neuf mois en détention provisoire dans le cadre d’une enquête pour corruption, l’ancien Premier ministre socialiste est désormais assigné à résidence. Selon un sondage paru vendredi, le Parti socialiste (PS) recueille 36 % des intentions de vote contre 35 % pour la coalition dirigée par l’actuel chef du gouvernement, Pedro Passos Coelho, 51 ans. «C’est le plus mauvais sondage pour le PS de ces dernières années. Il révèle une remontée de la coalition contraire à toutes les attentes», s’inquiète un ancien responsable socialiste, cité sous le couvert de l’anonymat par l’hebdomadaire Expresso. L’écart, d’un point seulement, était de cinq points lorsque l’ancien maire de Lisbonne Antonio Costa, 54 ans, a pris les commandes du PS à la fin novembre, selon le baromètre mensuel de l’institut Eurosondagem, qui fait encore état de 21,1 % d’indécis.
Seule quasi-certitude, quel que soit le vainqueur le soir du 4 octobre, aucun des deux camps ne semble en mesure d’obtenir une majorité absolue au Parlement, comme c’est le cas depuis 2011 pour la coalition formée par le Parti social-démocrate (PSD, centre droit) et son partenaire minoritaire (CDS, droite).
Pedro Passos Coelho, qui défend un bilan plombé par trois années de mise sous tutelle financière de l’Union européenne (UE) et du Fonds monétaire international (FMI), suivies toutefois d’une timide reprise économique et d’un recul du chômage, compte maintenir le cap de la rigueur budgétaire tout en allégeant graduellement le fardeau fiscal.
Un sujet encombrant à éviter
Face à lui, Antonio Costa se pose en défenseur d’une autre option par rapport à l’austérité, promettant de renforcer les services publics sans pour autant remettre en cause les engagements de l’État portugais vis-à-vis de ses créanciers.
Les deux hommes ont pour l’instant exclu d’entrer ensemble au gouvernement, mais l’actuel échiquier politique ne leur offre aucun autre allié potentiel. Si le Parti communiste et le Bloc de gauche, formation apparentée au Syriza grec, pourraient obtenir au total 15 % des voix, leurs positions restent très éloignées de celles des socialistes, notamment en ce qui concerne la gestion d’une dette publique atteignant 130 % du PIB ou l’appartenance du Portugal à la zone euro. «Tout dépendra de la différence séparant les deux premiers, explique le politologue Antonio Costa Pinto. Si le vainqueur l’emporte avec près de 40 % des voix, il pourra prétendre former un gouvernement minoritaire sans trop de difficultés. Mais s’il se retrouve avec un score de 36 %, il lui faudra tenter de négocier un accord parlementaire avec l’opposition.»
Dans ce contexte, l’attention portée aux déboires judiciaires de José Socrates, mis en examen pour corruption, blanchiment d’argent et fraude fiscale aggravée, ne fait pas les affaires du candidat socialiste, qui a toujours cherché à éviter ce sujet encombrant, en attendant que la justice tranche sur une éventuelle mise en accusation. «Les gens savent séparer l’enjeu des élections d’une affaire judiciaire, même si elle est très médiatisée», a réagi Antonio Costa, dont l’intronisation à la tête du PS avait déjà été phagocytée par l’arrestation quelques jours plus tôt de celui qui a dirigé le Portugal de 2005 à 2011.
Le patron des socialistes tentera de reprendre la main et marquer des points mercredi, lors d’un débat télévisé très attendu qui l’opposera à Pedro Passos Coelho. Antonio Costa espère convaincre les électeurs grâce à un programme de relance économique en faveur de l’investissement et de l’emploi. Le Premier ministre devrait mettre en avant son principal actif, la conclusion dans les délais prévus du plan d’aide internationale demandé en 2011 par son prédécesseur José Socrates, et jouer la carte de la responsabilité face aux politiques socialistes, qui avaient selon lui conduit le pays au bord de la faillite.
Le Quotidien/AFP